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Crise ivoirienne : deux diplomates occidentaux jugent durement la France

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  • Crise ivoirienne : deux diplomates occidentaux jugent durement la France

    Est-ce une des conséquences du départ de Jacques Chirac de l’Elysée ? En l’espace de quelques semaines, deux diplomates occidentaux qui ont suivi de près la crise armée en Côte-d’Ivoire (2002-2007 ?), l’un d’Abidjan l’autre depuis New York, sortent du bois pour critiquer vertement la politique qui a été celle de la France - et d’une certaine façon de l’ONU - durant la crise ivoirienne.

    Le premier s’appelle Johannes Kunz. Il a été ambassadeur de Suisse en Côte-d’Ivoire de 2001 à 2005. Il a vécu, à Abidjan, le début et les développements d’une crise dont les tentatives de règlement se sont très rapidement internationalisées avec l’endossement des Accords de Linas-Marcoussis par le Conseil de sécurité de l’ONU, et l’implication de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). Après la signature des accords de Ouagadougou, qui scellent la réconciliation entre le pouvoir du président Laurent Gbagbo et la rébellion dirigée (du moins ouvertement) par Guillaume Soro, il s’est exprimé dans le quotidien La Liberté, édité à Fribourg. Il a vertement critiqué l’inefficacité de l’ONU, cornaquée par une France officielle ayant des motifs de politique intérieure - soutenir les figures du parti unique contre les forces du changement. Lisons-le.

    « L’ONU semble mal inspirée dans ses interventions sur le continent noir. Certains pensent qu’elle est un obstacle à la paix. Ainsi les deux principaux protagonistes de la grave crise qui secoue la Côte-d’Ivoire depuis le 19 septembre 2002, le président Laurent Gbagbo et le chef rebelle Guillaume Soro, assistés par Blaise Compaoré, chef de l’Etat burkinabé et président en exercice de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), ont signé, le 4 mars 2007 à Ouagadougou, un accord sur la résolution du conflit en excluant du règlement l’organisation qui, pendant quatre années, y a engagé de gros moyens politiques et militaires. (...) Tout comme le chaos somalien et la désolation du Darfour, l’espoir de paix en Côte-d’Ivoire est fondé sur le refus de normes et interventions internationales qui ne manquent souvent pas d’ambiguïté. Ainsi l’opération de l’ONU en Côte-d’Ivoire était dominée par l’ancienne puissance coloniale. Le contingent français des troupes de paix internationales ne répondait pas aux ordres de New York mais de Paris, où chaque résolution du Conseil de sécurité était rédigée, souvent dans le but de protéger les vieilles élites et de marginaliser les forces du changement. Si la paix en Côte-d’Ivoire, qu’on doit souhaiter imminente, porte, de par le court-circuitage du système onusien, les stigmates du "politiquement incorrect", l’organisation elle-même pourrait bien ne pas sortir indemne de l’aventure ivoirienne. Même s’il est évident que le soutien de l’ONU reste indispensable pour le retour à la normale en Côte-d’Ivoire, l’organisation mondiale peut paraître en Afrique tout aussi inefficace dans le règlement pacifique de différends qu’elle l’est dans la prévention de conflits. Pour les Africains, par contre, l’épisode ivoirien peut marquer la naissance d’une confiance renforcée en leurs propres capacités de négociation et de règlements de conflits. La communauté internationale entière y gagnerait. » On croirait entendre ce que les médias parisiens appellent, avec un certain sens de la dramatisation, un « farouche partisan de Laurent Gbagbo »...

    John Bolton aussi...

    L’icône des élites néoconservatrices américaines, John Bolton, qui était ambassadeur des Etats-Unis à l’ONU durant une partie de la crise dans l’ancienne colonie française, s’est également exprimé sur l’action de la diplomatie hexagonale en Côte-d’Ivoire. Il a accepté de répondre aux questions de Calixte Tayoro, collaborateur du quotidien ivoirien Le Courrier d’Abidjan. « Par bien des aspects, je pense que la France et les Européens en général se comportaient comme si la Côte-d’Ivoire était encore une colonie. Ils administraient ses affaires, décidaient de qui devaient diriger le pays ; en fait, ils décidaient des moindres aspects de la situation politique interne en Côte-d’Ivoire. Et, une fois de plus, je ne pense pas que cela contribue, sur le long terme, à la solution que les parties en présence sur le terrain devaient elles-mêmes trouver. Alors, plutôt que d’essayer de favoriser l’intérêt d’un camp ou de l’autre, je pense que le rôle du Conseil de sécurité devrait être de résoudre la dispute ; et, dans ce cas précis, le désaccord avec la France portait sur une décision prise par l’Union africaine au sujet de l’extension de la durée du mandat du président et de l’autorité à accorder au Premier ministre. La France, le Ghana et la République démocratique du Congo étaient favorables à une résolution qui était clairement différente de celle adoptée par l’Union africaine. Or, d’habitude, lorsque l’UA trouve un accord, elle vient au Conseil de sécurité et lui demande simplement de l’adopter tel quel. La position française marquait donc une différence flagrante avec la manière dont nous avons procédé auparavant. Cela peut ne pas être une mauvaise chose, et je ne pense pas que l’Union africaine ait toujours raison. Mais soyons clairs : ceci était une déviation par rapport à la pratique habituelle. Et je pense que la Tanzanie a été d’accord avec nous ; l’Afrique du Sud - qui n’était pas encore membre du Conseil, mais qui devait le devenir en janvier - a été d’accord également, ainsi que d’autres membres », a-t-il affirmé au sujet de la bataille diplomatique autour du vote de la résolution 1 721 des Nations unies sur la Côte-d’Ivoire. Paris entendait en ce moment engager le Conseil de sécurité à mettre son ancienne colonie sous tutelle de l’ONU et à transformer le président Laurent Gbagbo en reine d’Angleterre au profit de l’ancien Premier ministre Charles Konan Banny.

    Interrogé sur l’accord d’Ouagadougou, signé entre le président Laurent Gbagbo et le leader de l’ex-rébellion Guillaume Soro (devenu Premier ministre), et dont la particularité est qu’il est une initiative africaine, conçue par le numéro un ivoirien, John Bolton dit : « Dans la mesure où les accords précédents ont échoué, nous ignorons évidemment si celui-ci sera respecté. Mais j’étais très surpris lorsque j’ai appris par la presse la signature de l’accord d’Ouagadougou. Il est apparemment intervenu suite à des négociations directes entre le président et la direction des Forces nouvelles. Et pour moi, cela montre que l’ONU n’était pas en train de jouer son rôle et, comme dans la résolution de la plupart des conflits, lorsque les parties ne sont pas décidées à passer un véritable accord, elles ne signent pas. Et j’espère de tout coeur que cet arrangement réussira pour le bien de tout le peuple ivoirien, et que cela mettra fin à la division du pays et qu’il continuera son développement économique. Mais si cet accord réussit, il montrera certainement que l’ONU a échoué puisqu’elle n’a pas joué un rôle actif dans la signature de cet accord ».

    John Bolton, qui égratigne au passage Kofi Annan - qui « a très clairement pris fait et cause pour la position de la France » - plaide dans cette interview pour une réforme du Conseil de sécurité qui renforcerait les Etats membres et diminuerait le rôle du secrétariat général. Amertume liée à l’activisme de Kofi Annan contre la guerre en Irak ? Peut-être.

    Il n’en demeure pas moins vrai que, quelques mois après le départ du pouvoir de Jacques Chirac, des voix autorisées s’élèvent pour critiquer très sèchement son activisme en Côte-d’Ivoire, placée sous le sceau de ce qu’on pourrait appeler un « multilatéralisme opportuniste », consistant à enrôler l’ONU et les grandes puissances dans des batailles qui ne visent pas à préserver la paix et la sécurité internationales, mais les intérêts et le rang de la France.

    Pour en savoir plus :

    http://kouamouo.afrikblog.com/archiv...7/5645305.html

    http://coupercoller.**************/
    The truth is incontrovertible, malice may attack it, ignorance may deride it, but in the end; there it is.” Winston Churchill
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