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Les vacances de Nadia : Le cœur partagé

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  • Les vacances de Nadia : Le cœur partagé

    Un été, deux destinations de vacances. Chaque été, le Var et la Kabylie. Et des fois, le contraire.

    Cela fait 3 ans que ça dure, depuis que les parents de Nadia ont décidé de se séparer.

    « J’ai tout en double, dit-elle. Deux anniversaires, deux domiciles, deux "vacances". Tout est multiplié par deux. Enfin, peut-être pas l’essentiel. Cette année, rebelote pour les vacances. »


    Je pars en Algérie. Comme chaque année, depuis 3 ans, j’y passerai tout le mois d’août. Juillet est réservé pour Toulon, dans un petit village perdu dans l’arrière-pays. Les deux rives de la Méditerranée.

    J’aimerais bien faire autre chose, aller ailleurs mais mon père insiste pour m’emmener en Kabylie. C’est important pour moi, me répète-t-il. Pour mes racines, mon avenir et tout ça.

    Je ne parle même pas le kabyle ! Je m’ennuie à mourir chez les parents de mon père. Ma grand-mère ne comprend rien à ce que je dis, elle ne fait que m’enlacer et me baver dessus.

    Puis, j’en ai marre, tout est interdit ! Et quand je demande pourquoi, tout le monde me répond : c’est comme ça, en me lançant un regard surchargé de pitié.

    Ou alors, quand on fait l’effort d’être poli, on me dit : nous, c’est comme ça qu’on fait.

    Et quand je demande, c’est qui nous ? Malheur ! On me toise de haut. Nous, les Algériens, bien sûr ! Facile de m’exclure pour eux.

    Ils me renvoient toujours à la France. Vous autres, disent-ils, sans jamais définir ce « vous » culpabilisant. Enfin, censé le faire.


    La Kabylie de mon père a un grand défaut. Elle n’a pas de mer. Les montagnes du Djurdjura sont peut-être belles, mais qu’est-ce qu’il y fait chaud ! De 10 h à 16 h, c’est opération ombre.

    Les habitants se réfugient chez eux. Les plus aisés mettent leur climatisation à fond. La colline brûlée. Le soleil est implacable, il n’a aucune pitié pour les humains. Il est comme suspendu à une dizaine de mètres au dessus de nos têtes et s’amuse à assommer ceux qui osent le défier en sortant de l’ombre.


    Une adolescente parisienne dans un village kabyle, ça peut donner lieu à un bon film plein de rebondissements. Tout d’abord, question dépaysement, faut repasser. Y a plus d’émigrés, comme ils disent ici, et d’Algérois que de locaux.

    Le village passe de 70 habitants en hiver à plus de 300 en été. Ça parle français partout, sauf chez ma grand-mère toujours scotchée devant BRTV. Je n’aime pas trop le comportement de mes amis. Ils prennent les gens de haut.


    Mon père dit que c’est à cause de l’euro. Que c’est un problème de lutte des classes. Que les immigrés deviennent subitement très riches en débarquant en Algérie grâce au change parallèle. Un pour cent.

    Mon oncle est méprisant quand il parle de dinar.


    Dans sa bouche, le dinar ressemble à une insulte. Pour une fille, passer ses vacances dans un village kabyle n’est pas très réjouissant. Il y a peu d’activités, plein de tabous, un ennui profond, une forme de léthargie physique et cérébrale. Y a pas que ça évidemment.


    Les mariages, c’est tous les jeudis et vendredis. Difficile de s’y retrouver. Je ne savais pas que j’avais autant de cousins et de cousines.

    Quand j’ai un coup de blues ou que ma mère me manque, mon père s’empresse de me proposer d’aller à la mer.

    Et ça devient très vite une expédition. De Michelet (je n’arrive pas à prononcer Ain El Hammam), au Petit Paradis, le voyage est épique.

    Je ne me retrouve jamais seule avec mon père. A la plage, il y a au moins la moitié du village. Un cortège de nombreuses voitures.


    A mourir de rire. C’est, d’ailleurs, ce qui nous arrive toujours. Heureusement qu’on meurt pour de faux. On revient de la plage tout rouges comme des crevettes.

    Tous, sans exception. Des montagnards à la mer, ironise mon oncle. Cette année, mon père arrive deux semaines après moi. Je redoute mon séjour sans lui.

    Tout comme je redoute la fin des vacances. Mon père a raison. J’ai fini par aimer ce pays, mon autre pays.


    Rémi Yacine

  • #2
    nedjma

    Ton histoire me rappelle mon adolescence mais nadia a de la chance elle pouvait aller à Petit paradis alors que moi j'ai du attendre l'an 2000 pour avoir enfin le bonheur de savoir ce qu'était ce fameux petit Paradis.....Franchement, je deteste, il y a tout le village là bas et il faut faire attention à tout ce que tu fais sinon gare à la rumeur........
    Les libertés ne se donnent pas, elles se prennent

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    • #3
      trèsjoli récit
      merci

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      • #4
        Bonsoir Janna

        Bienvenue parmi nous ........

        c'est un récit que j'ai énormément apprécié

        je l'ai trouvé ds le quotidien El watan

        j'aime beaucoup les articles qui parlent de la vie des gens en Kabylie



        @ zwina

        desolée d'avoir réveillée en toi de douleureux souvenirs

        moi aussi j'ai du attendre trés longtemps pour y'aller ....

        vaut mieux tard que jamais .........

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