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Le travail au noir "emploie" près de 1 300 000 personnes en Algérie

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  • Le travail au noir "emploie" près de 1 300 000 personnes en Algérie

    Le “monstre’’ de l’économie informelle par lequel sont remises en cause la bonne marche et les performances du recouvrement de la fiscalité, du niveau de vie des populations, de la qualité des marchandises commercialisées, de la santé des populations et du système des retraites prend de plus en plus des proportions inquiétantes, soit, d’après les statistiques officielles, un taux de croissance de 8% par an.

    À elle seule, l’économie parallèle emploierait quelque 1 300 000 personnes. L’une des plus récentes conséquences de ce phénomène est la menace qui pèse sur la pérennité du système de retraite. La CNR se plaint en effet d’un déficit de cotisations par rapport aux prestations fournies mensuellement. L’une des raisons de ce manque à gagner étant les emplois non déclarés. Les autres motifs sont bien sûr directement liés à la peu performante politique de création de l’emploi dans notre pays, au système de la retraite anticipée mise en œuvre au cours des années 90 et à une structure démographique qui commence à ‘’faire vieillir’’ relativement la population algérienne.

    A-t-on réellement besoin de fines statistiques pour se rendre compte de l’étendue de ce qui est prosaïquement appelé le travail au noir ? Que l’on se rende dans les cafés et estaminets du quartier ou dans les mégamarchés de Tadjenent ou Sidi Aïssa, les activités soumises à la législation du travail et aux rigueurs du fisc représentent un infime volume par rapport aux autres activités et échanges qui s’y effectuent. Une loi élaborée par le ministère des Finances au cours de l’année 2006 prévoyait de limiter les échanges en monnaie liquide au montant de 50 000 dinars. Au-delà de cette somme, il faudra régler les payements en chèque ; c’est une loi qui a pour ambition de juguler un tant soit peu l’évasion fiscale qui se compte actuellement en milliards de dinars et de faire barrage au blanchiment de l’argent sale. Cependant, on ne sait pour quelle raison, ce département ministériel avait fait marche arrière en décidant de renvoyer sine die l’application de cette mesure. Quoi qu’il en soit, même si elle venait à être appliquée sur le terrain, la tâche ne sera pas des plus aisées. Dans une aire de plusieurs hectares où se vendent et s’achètent des tracteurs, des camions, de l’électroménager et du bétail, les procédures de vérification des montants des transactions sont tout simplement impossibles à réaliser. Il faut certainement beaucoup plus d’imagination pour pouvoir encadrer non seulement le secteur du commerce informel dans les grands marchés, mais aussi toutes les transactions immobilières et foncières qui revêtent un caractère plus discret.

    Sur un autre plan, les pouvoirs publics et la société ont partout essayé de produire une législation respectant les grands principes moraux et ergonomiques du secteur économique : âge minimal de travail, couverture sociale, droits à la retraite et d’autres conditions qui ont pour souci de préserver la santé, le niveau de vie et la dignité des travailleurs. Néanmoins, entre l’intention portée par une loi et la pratique vécue, il y a un fossé béant. Car, les conditions de naissance et de durabilité du travail au noir sont réglées d’abord par l’implacable loi de l’offre et de la demande qui régit le marché du travail. Ce dernier est mû par ses propres mécanismes tels que la croissance économique en général et la formation qualifiante en particulier.

    Le travail au noir est, pour simplifier, directement lié au phénomène du chômage, lequel constitue un fertile vivier pour toute forme d’exploitation de la main-d’œuvre. Certains économistes ultra-libéraux, comme J.Rueff, sont allés jusqu’à soutenir que le chômage provient essentiellement des allocations de chômage puisqu’elles inciteraient les chômeurs à se contenter des subsides de la solidarité nationale.

    Le travail au noir dans l’Algérie indépendante n’a commencé à prendre des dimensions inquiétantes qu’a partir du milieu des années 90, époque qui a connu les plus grands déplacements des populations vers les villes et les banlieues suite à l’insécurité qui s’est abattue sur l’arrière-pays rural. L’économie administrée qui avait consacré le système de l’État-providence misait chimériquement sur le plein emploi par le moyen de sureffectifs dans les entreprises publiques et les administrations pour acheter, du moins temporairement, la paix sociale. Un peu plus de deux décennies plus tard, le réveil fut douloureux. Les entreprises publiques rentrèrent dans l’ères des ‘’plans sociaux’’ qui se sont traduits par des dégraissages massifs, tandis que la Fonction publique a réduit drastiquement ses plans de recrutement.

  • #2
    Les abysses d’une réalité frappée par l’omerta

    Une nouvelle faune d’entrepreneurs commençait à prendre le relais d’une économie publique moribonde. Dans presque tous les secteurs d’activité, des miro-entreprises de travaux, de prestations de service ou de production ont vu le jour. Le recrutement du personnel s’est limité au strict minimum pour faire des gains de productivité, partant, des gains de marge bénéficiaire. Cela dans le cas où l’employé est déclaré à la sécurité sociale. Souvent, ce n’est pas le cas. Dans plusieurs villes d’Algérie, des ateliers de fabrication de chaussettes et de culottes, de petites usines de confection en maroquinerie, emploient des travailleurs et des travailleuses à “huisclos’’, c’est-à-dire les portes fermées, de peur d’une visite inopinée de l’Inspection du travail. Nous avons rencontré Kamal, qui a trimé dans l’obscurité et l’humidité des caves abritant un atelier de chaussettes. Il abat un travail de 13 heures par jour pour une bouchée de pain, soit autour de 5000 dinars. Il nous apprend que 80% du personnel, pour la majorité féminin, n’est pas déclaré aux assurances. Une petite consolation de misère quand même : deux paires de chaussettes prises des rebuts à chaque fin de mois. Installé aujourd’hui en France, Kamal emploie son savoir-faire, acquis dans les bas-fonds de l’atelier en Algérie, dans une grande fabrique de la banlieue parisienne.

    Un autre cas rencontré à la limite des wilayas de Béjaïa et Bouira. Bélaïd a trimé pendant des années sur un concasseur dans l’oued Sahel. Il n’a jamais bénéficié des prestations sociales ou des allocations familiales. Métier hautement dangereux de par les risques d’accidents mécaniques, d’inhalation de poussières et de nuisances sonores, Bélaïd en ramena une surdité de l’oreille gauche par perforation du tympan. Il a fini par quitter son poste pour aller vendre des sandwichs dans le train Beni Mansour-Béjaïa et sur les plages de Souk El Tenine afin de nourrir ses quatre enfants et ses parents démunis.

    Les exemples de travail au noir sont malheureusement fort nombreux. Ahmed trouve que le plus révoltant des cas qui se présentent ces dernières années c’est celui des entreprises créées ex-nihilo, ayant reçu un plan de charges des administrations publiques, mais qui n’arrivent pas à se conformer aux lois primaires du travail. Cela est dû essentiellement à une cynique cupidité des entrepreneurs, mais aussi au laxisme intéressé de l’administration qui n’arrive pas à suivre les dossiers des déclarations sociales des travailleurs. Lui, blessé au tibia dans un chantier de gabionnage, sait de quoi il parle. Dans un ravin où il transportait entre les mains de gros galets, il subira une fatale glissade qui fera tomber un galet sur son pied. La douleur du moment lui fera perdre connaissance. Transporté par ses collègues en auto-stop vers le service des urgences de l’hôpital de la région, il se fit délivrer un certificat d’arrêt de travail de dix jours qui, en réalité ne servira à rien puisqu’il n’est pas déclaré à la sécurité sociale. Pour toute ‘’récompense’’, il se fera virer de son chantier par l’entrepreneur sans autre forme de procès.

    En utilisant une main-d’œuvre taillable et corvéable à merci, parfois trop jeune pour les travaux, les patrons et les entreprises ne gagnent pas seulement la part des cotisations sociales qui auraient dû être versées aux organismes spécialisés, mais aussi toutes les autres prestations telles que les versements forfaitaires (35%), les allocations familiales et les impôts sur les revenus de leurs employés.

    Un secteur qui s’accroît de 8% par an


    Le travail au noir fait partie de ce grand ‘“secteur’’ appelé économie informelle qui emploie, selon le bilan du CNES établi septembre 2004, quelque 1 249 000 personnes, soit 17% de l’emploi total. Sur ce chiffre, 35% reviennent à l’activité commerciale non déclarée. Le taux de la population exerçant dans le secteur informel s’accroît annuellement d’environ 8%, selon la même source. Sa contribution dans la formation du PIB (Produit intérieur brut) hors hydrocarbures serait de 20 à 25%, selon les estimations données par Abdellatif Benachenhou, ancien ministre des Finances. Le CNES apporte aussi des précisions concernant les catégories de la population gravement affectées par ce phénomène du travail au noir. Les plus grands ‘’gisements’’ se trouveraient dans les populations non scolarisées ou bien celles touchées par la déperdition scolaire. Presque 1 200 000 jeunes âgés entre 6 et 18 ans sont hors du système éducatif. 71% d’entre eux appartiennent à la catégorie des 16/18 ans et constituent une ‘’armée de réserve’’ pour le travail informel en l’absence de perspective de formation qualifiante. Les diplômés de l’université ne sont pas en reste puisque, déjà à la fin de l’année 2004, ils étaient 160 000 en chômage. Une grande partie de cette masse déclarée inoccupée est réellement versée dans le travail informel.

    Comme on l’a observé à partir de certains témoignages, le travail au noir ne se limite pas à des activités commerciales non déclarées, mais il a aussi gangrené une partie des activités légales où les patrons d’entreprises bien installées ne déclarent pas la totalité du personnel recruté. La peur qui plane sur des emplois déjà précaires ne peut aboutir qu’à la loi de l’omerta. D’ailleurs, très peu de plaintes sont déposées au niveau des inspections de travail des wilayas se rapportant au non respect des lois du travail. A ce niveau, les connivences sonnantes et trébuchantes entre l’administration et certains patrons sont un secret de Polichinelle.

    Tout le monde se souvient des grandes manifestations de Ouargla en 2004 au cours desquelles les chômeurs de la ville ont brûlé les édifices publics et dressé des barricades. L’affaire avait pris des proportions si inquiétantes que le gouvernement, ayant déclenché une enquête, éplucha les dossiers des sociétés qui sous-traitaient le recrutement de la main-d’œuvre pour les sociétés pétrolières. Il en ressortira une corruption à grand échelle qui faisait monnayer les candidatures. Devant un tel “barrage’’ fait à l’emploi régulier, que restait-il pour les centaines de candidats malheureux qui n’ont pas avec quoi marchander leurs postes ? Le travail au noir dans les palmeraies, le trabendo à Debdab, sur la frontière algéro-lybienne, le trafic de drogue ou l’ “exportation’’ des camélidés par l’entremise des réseaux sévissant sur la frontière algéro-tunisienne.

    Une enquête menée par le CREAD (Centre de recherche en économie appliquée pour le développement) révèle que sur 7500 PME, 42% des effectifs ne sont pas déclarés et 30% de leur chiffre d’affaires échappent au fisc.

    L’ampleur prise par le travail au noir et l’économie informelle dans notre pays trouve une large explication dans les difficultés de la période de transition qui consiste, pour l’administration et l’économie algériennes, à passer d’un système dirigiste, monopolistique, à un système ouvert à la libre entreprise. Cela va prendre du temps. Même la dernière Tripartite qui a scellé, en septembre 2006, le fameux Pacte économique et social, n’a pas trop insisté sur le phénomène de l’économie informelle et les voies et moyens qu’il y a lieu de mobiliser pour l’insérer dans l’économie structurée.

    La culture de l’entreprise, la libre syndicalisation des ouvriers et la réhabilitation des valeurs du travail constituent, à n’en pas douter, un processus qui va de pair avec les efforts de la démocratisation de la société et de la consécration de la citoyenneté.

    Par la Dépêche de Kabylie

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    • #3
      Tout simplement parce qu'on Algérie les banques ne jouent pas leurs rôles et les services du FISC aussi.

      Toute personne en Algérie peut alimenter son compte avec des milliers, voir de millions de dinars sans que s'attire l'attention de la banque.

      Tous ces personnes qui travaillent au noir gardent bien leurs argent à la banque donc la banque doit mener des enquêtes ou bien ils achètent des biens avec leurs argent : voitures, maisons.... et dans ce cas c'est au fisc de s'interroger !

      Il suffit juste d'une volonté politique ce que malheureusement le Gouvernement algérien manque cruellement.

      Du temps de OUYAHIA un avant-projet de loi visait à obliger tout citoyen a passer par un chèque si la transaction dépasse les 50.000 Da !!! la loi a été vite enterrée. Pourquoi ? "Si Ahmed" pourait un jour nous donner une réponse claire et nette sur le sujet !!!!


      Si on rétablit le paiement scriptural en Algérie : chèque, carte bleu, virement.......... 80 % du travail en noir sera éliminé.


      Encore une fois tout est une question de volonté politique.

      Qu'attendez Monsieur Belkahdem ?

      Monsieur le Premier Ministre la balle est dans votre camp !!

      Stanislas
      Dernière modification par Stanislas, 14 août 2007, 11h46.
      “If you think education is expensive, try ignorance”
      Derek Bok

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