A noter, cette inteview a ete faite avant que le Maroc ne presente les details du plan d'autonomie, si khat chahid est aujourd'hui favorable a cette solution mediane, c'est qu'il juge qu'elle est serieuse. A part ca, l'interview parle d'elle meme sur ce qui se passe dans les camps...
Interview Mahjoub Salek : "Le Maroc n’a rien compris au Sahara"
Mahjoub Salek
(D.B / TELQUEL)
Co-fondateur du Front Polisario, Mahjoub Salek est surtout le porte-parole de “Khat Achahid”, un mouvement qui se pose comme une alternative à l'actuelle direction du Front. Entretien avec le premier opposant sahraoui de Mohamed Abdelaziz.
Vous êtes le porte-parole et la figure publique du mouvement Khat Achahid. Quelle est la nature réelle de ce mouvement ?
C'est un mouvement réformateur au sein du Front Polisario. Nous œuvrons pour l'établissement de la justice et de la démocratie sur la base de la liberté d'expression et de l'alternance politique. Notre
mouvement est constitué de militants, de cadres et de guerriers du Front Polisario. Nous n'avons pas d'estimations chiffrées sur le nombre de nos militants, mais nous savons que la majorité des Sahraouis révoltés par ce qui se passe actuellement sont des sympathisants de notre mouvement, sans qu'ils y adhèrent forcément au niveau des organisations.
“Révoltés par ce qui se passe”… que voulez-vous dire par cette phrase ?
Quinze longues années de statu quo. Quinze années durant lesquelles le Maroc a été incapable de gérer convenablement le territoire qu'il administre, où l'ONU a fini par reconnaître son impuissance et où des vieillards, des jeunes, des femmes et des enfants continuent de survivre sur une terre aride où le thermomètre affiche 62 degrés en été et zéro en hiver.
Votre appellation officielle est “Polisario Khat Achahid”. Pourquoi vous insistez pour reprendre l'appellation du Front ?
Le Polisario est l'âme du peuple. Personne n'en a donc le monopole. Nous avons été parmi les fondateurs du front. Il se trouve que l'actuelle direction a dévié de la voie tracée par El Ouali Mostapha Sayed (NDLR : fondateur du Polisario). Notre objectif est donc de remettre la direction sur le bon chemin.
Il y a quelques semaines, vous avez publié un communiqué où vous réclamiez la démission de l'actuelle direction. Vous avez revu vos revendications à la baisse ?
Aujourd'hui, nous réclamons un congrès populaire, libre et démocratique. Nous voulons qu'une commission indépendante établisse de réelles lois électorales pour que l'opération de vote ne soit pas mise sous la tutelle de l'actuelle direction. On pourra alors répondre à une question essentielle : que veut le peuple ? Et c'est justement la perspective qui fait peur à nos dirigeants aujourd'hui. Ils ont peur de la colère des Sahraouis et de l'opposition. Aujourd'hui, l'actuelle direction n'a fait preuve que d'impuissance et d'égoïsme. A partir de là, elle n'a plus que deux choix : se reprendre en main ou accepter le jugement populaire.
Pourquoi dit-on souvent que vous êtes une création des services secrets marocains ?
Ce n'est pas nouveau. La direction du Polisario a toujours utilisé la carte de la trahison pour liquider ses opposants. Dans les années 1970, lorsque pour la première fois, nous avons critiqué la direction du Front, nous avons été accusés de collaboration avec le Maroc. Nous avons été torturés et jetés en prison par les réels traîtres de la nation. Ceux qui ont rallié le Maroc quelques années plus tard comme Omar Hadrami. Mais aujourd'hui, cela ne trompe plus personne et le peuple sahraoui est suffisamment conscient pour distinguer les véritables militants des traîtres.
Si vous êtes certains de l'attrait de votre mouvement auprès des populations sahraouies, qu'attendez-vous pour évincer l'actuelle direction ?
Nous n'adhérons pas aux méthodes putschistes. Nous sommes, je le répète, un mouvement réformateur au sein du Polisario. Jusqu'à maintenant, nous nous contentons de réclamer et de pousser vers l'organisation d'un congrès populaire, franc et transparent. Nous ne voulons pas en arriver à déclarer la rupture.
En juillet dernier, vous avez traité l'actuelle direction du Front “d'ennemi interne”. La rupture n'est-elle pas déjà consommée ?
C'est effectivement une expression qui a choqué plusieurs militants et plusieurs cadres de notre mouvement. Mais elle sied parfaitement à une direction incapable de réaliser les aspirations du peuple et qui bloque toute initiative nationaliste pour la résolution du problème.
À part vous, qui sont les membres les plus influents de Khat Achahid ?
Je ne suis pas un membre influent mais un simple militant au sein du mouvement Khat Achahid. Nous avons désigné notre représentant dans les camps. Son nom de guerre est Tchourouni, c'est un guerrier qui a déjà été blessé trois fois au combat. Notre devise est claire : un seul héros, le peuple. Un seul martyr, El Ouali. Nous ne voulons pas créer de symboles, ni personnaliser la lutte. Nous avons un programme pour lequel nous militons. Et c’est sur la base de ce programme que nous voulons être jugés.
Vous entretenez encore des relations avec la direction du Front que vous critiquez ?
Une relation normale entre Sahraouis appartenant à la même organisation. Ceci dit, lorsqu'on reste plus de trente ans au pouvoir, on finit par croire qu'on a été créé pour régner. C'est alors qu'on considère tout opposant comme un ennemi.
Vous avez eu des contacts avec Mohamed Abdelaziz ?
Le dernier contact entre nous a été cette lettre ouverte que nous lui avions adressée en sa qualité de président du front. On y réaffirmait notre appel à un congrès extraordinaire pour mettre fin à plusieurs années de souffrance. Au lieu d'accéder à notre demande, Abdelaziz a reporté le congrès d'une année. La loi l'y autorise une fois. Nous verrons ce qu'il aura à proposer dans quelques mois.
Quelle est votre position par rapport au plan d'autonomie élargie proposé par le Maroc ?
C'est attristant de constater que le Maroc, après plus de 35 ans, n'a encore rien compris au Sahara et aux Sahraouis. Il est impossible de résoudre, d'une manière unilatérale, un conflit lié à la légalité internationale. Et puis où est cette autonomie? Comment peut-on parler d'autonomie élargie quand des jeunes sont battus et arrêtés par la police lorsqu'ils brandissent le drapeau sahraoui à Laâyoune ? Toutes les autonomies dans le monde disposent de drapeaux et de symboles locaux. Est-ce que les Sahraouis gèrent leur territoire aujourd'hui ? La réponse est évidemment négative. C'est ce qui m'amène à penser que cette histoire d'autonomie élargie est exclusivement destinée à la consommation médiatique. Je crois plutôt que le jeune roi Mohammed VI devrait ouvrir les portes de son palais aux Sahraouis pour que les choses évoluent réellement.
Le roi propose aujourd'hui une solution politique négociée. Ce qui veut dire que ses contours ne sont pas encore arrêtés et que les sahraouis (y compris vous) ont encore leur mot à dire…
De notre côté, nous travaillons également sur un projet de résolution du conflit. Toutes les composantes de Khat Achahid planchent dessus. Lorsqu'il sera prêt, ce projet sera envoyé au Maroc, au Polisario, à l'Algérie, à la Mauritanie, à l'Espagne, à l'Union européenne et à l'ONU. Mais je ne peux pas vous en dire plus pour l'instant.
Vous acceptez de négocier avec les membres du Corcas ?
Nous sommes prêts à négocier avec n'importe qui. Khat Achahid est contre la politique de la chaise vide. Le problème est : que représente le Corcas et qu'a-t-il fait de concret sur le terrain ?
Vous avez déjà rencontré des membres du Conseil royal ?
Officiellement, non. Mais on se rencontre souvent en Mauritanie ou ailleurs. N'oubliez pas que ce sont nos cousins. Nous discutons longuement dans un cadre familial ou amical. Eux-mêmes disent ne pas avoir de pouvoir. Je redis que la résolution du conflit du Sahara passe d'abord par le retour des réfugiés sahraouis chez eux. Ils devront ensuite gérer eux-mêmes leurs ressources.
Vous êtes habilités à négocier au nom du peuple sahraoui aujourd'hui ?
Jamais, puisque nous sommes une partie du Polisario, seul et unique représentant reconnu du peuple sahraoui.
Interview Mahjoub Salek : "Le Maroc n’a rien compris au Sahara"
Mahjoub Salek
(D.B / TELQUEL)
Co-fondateur du Front Polisario, Mahjoub Salek est surtout le porte-parole de “Khat Achahid”, un mouvement qui se pose comme une alternative à l'actuelle direction du Front. Entretien avec le premier opposant sahraoui de Mohamed Abdelaziz.
Vous êtes le porte-parole et la figure publique du mouvement Khat Achahid. Quelle est la nature réelle de ce mouvement ?
C'est un mouvement réformateur au sein du Front Polisario. Nous œuvrons pour l'établissement de la justice et de la démocratie sur la base de la liberté d'expression et de l'alternance politique. Notre
mouvement est constitué de militants, de cadres et de guerriers du Front Polisario. Nous n'avons pas d'estimations chiffrées sur le nombre de nos militants, mais nous savons que la majorité des Sahraouis révoltés par ce qui se passe actuellement sont des sympathisants de notre mouvement, sans qu'ils y adhèrent forcément au niveau des organisations.
“Révoltés par ce qui se passe”… que voulez-vous dire par cette phrase ?
Quinze longues années de statu quo. Quinze années durant lesquelles le Maroc a été incapable de gérer convenablement le territoire qu'il administre, où l'ONU a fini par reconnaître son impuissance et où des vieillards, des jeunes, des femmes et des enfants continuent de survivre sur une terre aride où le thermomètre affiche 62 degrés en été et zéro en hiver.
Votre appellation officielle est “Polisario Khat Achahid”. Pourquoi vous insistez pour reprendre l'appellation du Front ?
Le Polisario est l'âme du peuple. Personne n'en a donc le monopole. Nous avons été parmi les fondateurs du front. Il se trouve que l'actuelle direction a dévié de la voie tracée par El Ouali Mostapha Sayed (NDLR : fondateur du Polisario). Notre objectif est donc de remettre la direction sur le bon chemin.
Il y a quelques semaines, vous avez publié un communiqué où vous réclamiez la démission de l'actuelle direction. Vous avez revu vos revendications à la baisse ?
Aujourd'hui, nous réclamons un congrès populaire, libre et démocratique. Nous voulons qu'une commission indépendante établisse de réelles lois électorales pour que l'opération de vote ne soit pas mise sous la tutelle de l'actuelle direction. On pourra alors répondre à une question essentielle : que veut le peuple ? Et c'est justement la perspective qui fait peur à nos dirigeants aujourd'hui. Ils ont peur de la colère des Sahraouis et de l'opposition. Aujourd'hui, l'actuelle direction n'a fait preuve que d'impuissance et d'égoïsme. A partir de là, elle n'a plus que deux choix : se reprendre en main ou accepter le jugement populaire.
Pourquoi dit-on souvent que vous êtes une création des services secrets marocains ?
Ce n'est pas nouveau. La direction du Polisario a toujours utilisé la carte de la trahison pour liquider ses opposants. Dans les années 1970, lorsque pour la première fois, nous avons critiqué la direction du Front, nous avons été accusés de collaboration avec le Maroc. Nous avons été torturés et jetés en prison par les réels traîtres de la nation. Ceux qui ont rallié le Maroc quelques années plus tard comme Omar Hadrami. Mais aujourd'hui, cela ne trompe plus personne et le peuple sahraoui est suffisamment conscient pour distinguer les véritables militants des traîtres.
Si vous êtes certains de l'attrait de votre mouvement auprès des populations sahraouies, qu'attendez-vous pour évincer l'actuelle direction ?
Nous n'adhérons pas aux méthodes putschistes. Nous sommes, je le répète, un mouvement réformateur au sein du Polisario. Jusqu'à maintenant, nous nous contentons de réclamer et de pousser vers l'organisation d'un congrès populaire, franc et transparent. Nous ne voulons pas en arriver à déclarer la rupture.
En juillet dernier, vous avez traité l'actuelle direction du Front “d'ennemi interne”. La rupture n'est-elle pas déjà consommée ?
C'est effectivement une expression qui a choqué plusieurs militants et plusieurs cadres de notre mouvement. Mais elle sied parfaitement à une direction incapable de réaliser les aspirations du peuple et qui bloque toute initiative nationaliste pour la résolution du problème.
À part vous, qui sont les membres les plus influents de Khat Achahid ?
Je ne suis pas un membre influent mais un simple militant au sein du mouvement Khat Achahid. Nous avons désigné notre représentant dans les camps. Son nom de guerre est Tchourouni, c'est un guerrier qui a déjà été blessé trois fois au combat. Notre devise est claire : un seul héros, le peuple. Un seul martyr, El Ouali. Nous ne voulons pas créer de symboles, ni personnaliser la lutte. Nous avons un programme pour lequel nous militons. Et c’est sur la base de ce programme que nous voulons être jugés.
Vous entretenez encore des relations avec la direction du Front que vous critiquez ?
Une relation normale entre Sahraouis appartenant à la même organisation. Ceci dit, lorsqu'on reste plus de trente ans au pouvoir, on finit par croire qu'on a été créé pour régner. C'est alors qu'on considère tout opposant comme un ennemi.
Vous avez eu des contacts avec Mohamed Abdelaziz ?
Le dernier contact entre nous a été cette lettre ouverte que nous lui avions adressée en sa qualité de président du front. On y réaffirmait notre appel à un congrès extraordinaire pour mettre fin à plusieurs années de souffrance. Au lieu d'accéder à notre demande, Abdelaziz a reporté le congrès d'une année. La loi l'y autorise une fois. Nous verrons ce qu'il aura à proposer dans quelques mois.
Quelle est votre position par rapport au plan d'autonomie élargie proposé par le Maroc ?
C'est attristant de constater que le Maroc, après plus de 35 ans, n'a encore rien compris au Sahara et aux Sahraouis. Il est impossible de résoudre, d'une manière unilatérale, un conflit lié à la légalité internationale. Et puis où est cette autonomie? Comment peut-on parler d'autonomie élargie quand des jeunes sont battus et arrêtés par la police lorsqu'ils brandissent le drapeau sahraoui à Laâyoune ? Toutes les autonomies dans le monde disposent de drapeaux et de symboles locaux. Est-ce que les Sahraouis gèrent leur territoire aujourd'hui ? La réponse est évidemment négative. C'est ce qui m'amène à penser que cette histoire d'autonomie élargie est exclusivement destinée à la consommation médiatique. Je crois plutôt que le jeune roi Mohammed VI devrait ouvrir les portes de son palais aux Sahraouis pour que les choses évoluent réellement.
Le roi propose aujourd'hui une solution politique négociée. Ce qui veut dire que ses contours ne sont pas encore arrêtés et que les sahraouis (y compris vous) ont encore leur mot à dire…
De notre côté, nous travaillons également sur un projet de résolution du conflit. Toutes les composantes de Khat Achahid planchent dessus. Lorsqu'il sera prêt, ce projet sera envoyé au Maroc, au Polisario, à l'Algérie, à la Mauritanie, à l'Espagne, à l'Union européenne et à l'ONU. Mais je ne peux pas vous en dire plus pour l'instant.
Vous acceptez de négocier avec les membres du Corcas ?
Nous sommes prêts à négocier avec n'importe qui. Khat Achahid est contre la politique de la chaise vide. Le problème est : que représente le Corcas et qu'a-t-il fait de concret sur le terrain ?
Vous avez déjà rencontré des membres du Conseil royal ?
Officiellement, non. Mais on se rencontre souvent en Mauritanie ou ailleurs. N'oubliez pas que ce sont nos cousins. Nous discutons longuement dans un cadre familial ou amical. Eux-mêmes disent ne pas avoir de pouvoir. Je redis que la résolution du conflit du Sahara passe d'abord par le retour des réfugiés sahraouis chez eux. Ils devront ensuite gérer eux-mêmes leurs ressources.
Vous êtes habilités à négocier au nom du peuple sahraoui aujourd'hui ?
Jamais, puisque nous sommes une partie du Polisario, seul et unique représentant reconnu du peuple sahraoui.
Commentaire