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Des députés veulent légaliser les statistiques ethniques

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  • Des députés veulent légaliser les statistiques ethniques

    Le recueil de données sur les origines raciales pourrait devenir possible en France. La commission des lois de l'Assemblée nationale a adopté un amendement en ce sens, mercredi 12 septembre, dans le cadre du projet de loi sur l'immigration. Ce texte lèverait l'interdiction de recueillir des données relatives à l'origine raciale ou ethnique dans le cadre d'études sur "la mesure de la diversité des origines des personnes, de la discrimination et de l'intégration".
    La proposition a été aussitôt condamnée par SOS-Racisme. Dominique Sopo, son président, a estimé, jeudi 13 septembre, que cette initiative parlementaire avait un "drôle de relent colonial" et constituait "la première phase de la mise en place d'une vision ethnicisée de la société française".
    L'amendement s'inspire directement d'une recommandation émise en mai par la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL), en pleine controverse sur l'usage des statistiques ethniques. Le droit français n'a toujours autorisé que la collecte de données sur la nationalité et le lieu de naissance, interdisant aux entreprises ou aux organismes de recherche de "recueillir des données relatives à l'origine raciale ou ethnique, réelle ou supposée". Mais depuis deux ans, face à l'ampleur des discriminations en France, de plus en plus de voix s'élèvent pour demander la levée de cette interdiction.
    Longtemps restée dans le droit fil républicain, la CNIL a décidé, fin 2006, d'engager la réflexion. A l'issue d'une série d'auditions, elle a proposé de modifier la loi de 1978 sur l'informatique et les libertés afin de faciliter les recherches sur la mesure de la diversité des origines des personnes, les discriminations et l'intégration, tout en protégeant les données personnelles.
    La CNIL écartait l'idée d'une classification ethno-raciale dans toute la statistique publique, constatant qu'il n'y avait pas de consensus sur la question. Elle estimait cependant que, dans le cadre de recherches publiques, des enquêtes sur le "ressenti des discriminations, incluant le recueil des données sur l'apparence physique des personnes", pourraient être réalisées, dès lors que le recueil de telles données serait fondé sur le volontariat et l'anonymat.
    L'amendement, proposé par les députés UMP Michèle Tabarot et Sébastien Huygue, tous deux membres de la CNIL, garantit ces principes. Aussi, les personnes pourront-elles s'opposer à ce que ce type de renseignements soient collectés. Le traitement des données sera en outre soumis à autorisation de la CNIL. Celle-ci aura la faculté "en raison de la complexité de l'étude envisagée" de saisir un comité scientifique ad hoc. "Chacun s'accorde sur la nécessité de lutter contre les discriminations, plaident les auteurs de l'amendement. Encore faut-il pouvoir les identifier et les mesurer." Les deux députés reconnaissent toutefois que cette problématique est "complexe et délicate".

    DISCRIMINATIONS

    Sur ce sujet, comme sur celui des tests ADN pour les candidats au regroupement familial, le débat est vif. Certains voient dans le comptage ethnique une méthode lourde de risques, nourrissant une logique de séparation des communautés et portant en germe le racisme. D'autres plaident pour une mise en évidence des discriminations afin de mieux les combattre.
    La controverse transcende le clivage gauche-droite, comme l'ont montré les réponses des candidats à la présidentielle au questionnaire que leur avait adressé le Conseil représentatif des associations noires (CRAN). Dans leurs réponses, Nicolas Sarkozy, François Bayrou, Marie-George Buffet et Dominique Voynet se disaient ouverts à la production de telles données avec certaines précautions. Seule Ségolène Royal jugeait la question "délicate". La candidate socialiste craignait que cela débouche sur "le fichage des citoyens en fonction de critères contraires aux valeurs républicaines".
    Favorable à un usage encadré des statistiques ethniques, le député (PS) de l'Essonne, Manuel Valls, souhaite néanmoins que cette disposition soit retirée du projet de loi et puisse faire l'objet d'un "travail de fond parlementaire".

    Laetitia Van Eeckhout (Le Monde)
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