LIBERTÉS SYNDICALES
L'Algérie épinglée
La Confédération syndicale internationale (CSI) a rendu public, mercredi passé, un rapport accablant sur les libertés syndicales en Algérie. Il s’agit là d’un premier rapport de cette organisation syndicale, créée il y a moins d’une année et qui représente 168 millions de travailleurs au sein de 305 organisations nationales affiliées de 153 pays.
Les rédacteurs de ce rapport ont dénoncé «les persécutions et les intimidations continues sur les différents syndicats autonomes ». Rappelant la ratification par l’Algérie des conventions fondamentales de l’OIT, la CSI insiste sur les droits des travailleurs de constituer des syndicats et dénonce les délimitations infligées par le gouvernement dans l’octroi des autorisations d’exercice de l’activité syndicale. «Le Syndicat national autonome du personnel de l’administration publique (Snapap) n’a toujours pas été officiellement enregistré. Le droit de grève continue d’être frappé de restrictions. À ce titre, les grèves susceptibles de provoquer une crise économique sont notamment interdites», note le rapport, ajoutant «qu’une mission de l’Internationale des services publics (ISP) en visite en Algérie, en novembre 2006, a mis en lumière des preuves de représailles administratives et légales continues et constantes à l’encontre de dirigeants et membres de syndicats». Dans l’introduction de son rapport général, la CSI a souligné que «la plupart des dirigeants et employeurs africains se sont à nouveau distingués en 2006 par leur incapacité à nouer un dialogue de bonne foi avec les travailleurs unis en syndicats ». La Confédération estime que ces dirigeants africains ne peuvent se retrancher derrière l’excuse de la pauvreté pour justifier un tel bilan. «Le respect des droits syndicaux ne dépend pas de la richesse d’un pays, mais bien de la capacité de ses dirigeants et employeurs à entamer un dialogue social constructif avec les travailleurs», précise-t-on dans le rapport général. Dans son rapport sur l’Algérie, la CSI ne s’est, toutefois, pas étalée sur le contexte politique à l’origine de la dégradation des conditions de l’exercice syndical. Depuis 2004, une véritable cabale a été déclenchée contre les syndicats autonomes, qui ont vu le principal de leurs activités interdites, leurs leaders emprisonnés et les syndicalistes harcelés et intimidés par des convocations à la justice ou des sanctions dans leur milieu de travail. La confédération met l’accent, dans ce premier rapport, sur les restrictions imposées par le gouvernement algérien aux syndicats autonomes, notamment sur le droit de grève. «Les tribunaux ont le pouvoir de dissoudre un syndicat qui entreprend des activités illégales, tout comme il peut interdire une grève s’il estime qu’elle risque de provoquer une grave crise économique», signale-t-on. Selon la CSI, l’OIT a maintes fois demandé au gouvernement algérien d’abroger ces dispositions, qui sont en contradiction avec les droits fondamentaux articulés dans les différentes conventions ratifiées par l’Algérie. Le rapport a dressé un état des lieux qui s’est appuyé sur les témoignages recueillis auprès des différents syndicats autonomes (Snapap, Cnes, Cnapest), qui ont fait l’objet de lourdes pressions de la part des pouvoirs publics. «Le gouvernement a refusé d’enregistrer le Snapap au statut de Confédération nationale et a exigé que l’organisation lui fournisse préalablement une liste complète de ses effectifs, ainsi que les cartes syndicales des adhérents», dénonce le rapport, en précisant que «l’OIT a, à plusieurs reprises, rappelé au gouvernement qu’une telle requête contrevenait aux principes de la liberté d’association, vu qu’elle exposerait les membres au risque de discrimination antisyndicale ». Plus loin encore, il relève quelques illégalités permises par les autorités. «Les autorités font parfois obstruction à l’enregistrement de nouveaux syndicats en refusant simplement d’accuser réception de leur demande d’enregistrement. Les syndicats indépendants, plus petits, ont des problèmes du fait qu’ils ne représentent généralement pas plus de 20% des travailleurs d’une entreprise et du fait que la systématisation des contrats temporaires dans le secteur public complique aussi l’adhésion à l’organisation syndicale ». Par ailleurs, les rapporteurs constatent également les dépassements enregistrés dans le secteur privé, ou l’implantation syndicale est très réduite. «Les secteurs privés et informels connaissent un essor considérable et sont synonymes de dégradation des conditions de travail, d’inapplication de la réglementation du travail, d’absence de protection sociale et d’absence de libertés syndicales ». La Confédération ne comprend pas que de nombreuses entreprises privées n’appliquent pas les règles de droit du travail. «Souvent, les employeurs ne déclarent pas la plupart de leurs employés, les privant ainsi de tous les droits conquis. Ils n’ont ni salaire minimum, ni sécurité sociale, ni retraite. Dans le secteur textile où les femmes sont très nombreuses, cette précarité rend toute tentative de syndicalisation très difficile car ces travailleuses craignent de perdre leur emploi si elles adhèrent à un syndicat», rapporte-t-on.
Rosa Mansouri
L'Algérie épinglée
La Confédération syndicale internationale (CSI) a rendu public, mercredi passé, un rapport accablant sur les libertés syndicales en Algérie. Il s’agit là d’un premier rapport de cette organisation syndicale, créée il y a moins d’une année et qui représente 168 millions de travailleurs au sein de 305 organisations nationales affiliées de 153 pays.
Les rédacteurs de ce rapport ont dénoncé «les persécutions et les intimidations continues sur les différents syndicats autonomes ». Rappelant la ratification par l’Algérie des conventions fondamentales de l’OIT, la CSI insiste sur les droits des travailleurs de constituer des syndicats et dénonce les délimitations infligées par le gouvernement dans l’octroi des autorisations d’exercice de l’activité syndicale. «Le Syndicat national autonome du personnel de l’administration publique (Snapap) n’a toujours pas été officiellement enregistré. Le droit de grève continue d’être frappé de restrictions. À ce titre, les grèves susceptibles de provoquer une crise économique sont notamment interdites», note le rapport, ajoutant «qu’une mission de l’Internationale des services publics (ISP) en visite en Algérie, en novembre 2006, a mis en lumière des preuves de représailles administratives et légales continues et constantes à l’encontre de dirigeants et membres de syndicats». Dans l’introduction de son rapport général, la CSI a souligné que «la plupart des dirigeants et employeurs africains se sont à nouveau distingués en 2006 par leur incapacité à nouer un dialogue de bonne foi avec les travailleurs unis en syndicats ». La Confédération estime que ces dirigeants africains ne peuvent se retrancher derrière l’excuse de la pauvreté pour justifier un tel bilan. «Le respect des droits syndicaux ne dépend pas de la richesse d’un pays, mais bien de la capacité de ses dirigeants et employeurs à entamer un dialogue social constructif avec les travailleurs», précise-t-on dans le rapport général. Dans son rapport sur l’Algérie, la CSI ne s’est, toutefois, pas étalée sur le contexte politique à l’origine de la dégradation des conditions de l’exercice syndical. Depuis 2004, une véritable cabale a été déclenchée contre les syndicats autonomes, qui ont vu le principal de leurs activités interdites, leurs leaders emprisonnés et les syndicalistes harcelés et intimidés par des convocations à la justice ou des sanctions dans leur milieu de travail. La confédération met l’accent, dans ce premier rapport, sur les restrictions imposées par le gouvernement algérien aux syndicats autonomes, notamment sur le droit de grève. «Les tribunaux ont le pouvoir de dissoudre un syndicat qui entreprend des activités illégales, tout comme il peut interdire une grève s’il estime qu’elle risque de provoquer une grave crise économique», signale-t-on. Selon la CSI, l’OIT a maintes fois demandé au gouvernement algérien d’abroger ces dispositions, qui sont en contradiction avec les droits fondamentaux articulés dans les différentes conventions ratifiées par l’Algérie. Le rapport a dressé un état des lieux qui s’est appuyé sur les témoignages recueillis auprès des différents syndicats autonomes (Snapap, Cnes, Cnapest), qui ont fait l’objet de lourdes pressions de la part des pouvoirs publics. «Le gouvernement a refusé d’enregistrer le Snapap au statut de Confédération nationale et a exigé que l’organisation lui fournisse préalablement une liste complète de ses effectifs, ainsi que les cartes syndicales des adhérents», dénonce le rapport, en précisant que «l’OIT a, à plusieurs reprises, rappelé au gouvernement qu’une telle requête contrevenait aux principes de la liberté d’association, vu qu’elle exposerait les membres au risque de discrimination antisyndicale ». Plus loin encore, il relève quelques illégalités permises par les autorités. «Les autorités font parfois obstruction à l’enregistrement de nouveaux syndicats en refusant simplement d’accuser réception de leur demande d’enregistrement. Les syndicats indépendants, plus petits, ont des problèmes du fait qu’ils ne représentent généralement pas plus de 20% des travailleurs d’une entreprise et du fait que la systématisation des contrats temporaires dans le secteur public complique aussi l’adhésion à l’organisation syndicale ». Par ailleurs, les rapporteurs constatent également les dépassements enregistrés dans le secteur privé, ou l’implantation syndicale est très réduite. «Les secteurs privés et informels connaissent un essor considérable et sont synonymes de dégradation des conditions de travail, d’inapplication de la réglementation du travail, d’absence de protection sociale et d’absence de libertés syndicales ». La Confédération ne comprend pas que de nombreuses entreprises privées n’appliquent pas les règles de droit du travail. «Souvent, les employeurs ne déclarent pas la plupart de leurs employés, les privant ainsi de tous les droits conquis. Ils n’ont ni salaire minimum, ni sécurité sociale, ni retraite. Dans le secteur textile où les femmes sont très nombreuses, cette précarité rend toute tentative de syndicalisation très difficile car ces travailleuses craignent de perdre leur emploi si elles adhèrent à un syndicat», rapporte-t-on.
Rosa Mansouri
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