Annoncée en grande pompe après une longue période de gestation, la nouvelle grille des salaires de la Fonction publique, voulue par le pouvoir comme un cadeau de la rentrée sociale destiné à améliorer la qualité du service public, aura produit, selon toute apparence, le contraire de l’effet escompté. Hormis la centrale syndicale, l’UGTA, qui s’est empressée de pavoiser et de se féliciter de l’adoption par le Conseil des ministres de cette nouvelle grille poussant l’euphorie jusqu’à se fendre d’un communiqué à la gloire de Bouteflika à qui il est attribué la paternité de cette mesure, du côté des autres syndicats autonomes l’heure est plutôt à la contestation. La puissante Fédération nationale des travailleurs de l’éducation (FNTE) affiliée à l’UGTA a décidé dans cette affaire de se démarquer de la centrale syndicale. Par ailleurs, sept organisations syndicales autonomes dont certaines ont pignon sur rue sur la scène syndicale et représentant plusieurs secteurs de la Fonction publique tels la santé, l’éducation, la formation, l’enseignement supérieur... viennent d’appeler à une grève générale pour le 6 octobre prochain pour dénoncer les injustices dont cette grille est porteuse à leurs yeux. On vous donne d’une main ce que l’on vous prend de l’autre : les quelques dinars que devraient gagner les travailleurs de la Fonction publique à la faveur de la nouvelle grille des salaires sont vite rattrapés par les réalités économiques du pays et les effets de l’inflation qui rendent virtuelle et illusoire l’augmentation des salaires annoncée. Et c’est ce marché de dupes que dénoncent avec force les syndicats autonomes. Il faudra donc s’attendre dans les prochains jours à un durcissement et à un élargissement du mouvement de contestation avec toutes ses conséquences sur le fonctionnement des services publics et des secteurs vitaux comme l’éducation et la santé. Une telle épreuve de force entre les partenaires sociaux et le gouvernement n’aurait-elle pas pu être évitée ? Encore une fois, le pays paie les frais d’une gestion administrative et centralisée pour ne pas dire improvisée des affaires publiques. Ce qui se passe sur le front social est le résultat, une fois de plus, de l’absence de concertation érigée en mode de gouvernance entre le pouvoir et les acteurs sociaux. Alors que dans les pays où la démocratie participative est une réalité de tous les jours, les citoyens sont associés aux petites et grandes décisions qui se prennent et qui concernent leur quotidien, chez nous, on se méfie comme de la peste des partenaires sociaux, particulièrement des organisations jalouses de leur liberté de réflexion et d’action par rapport au pouvoir. L’expérience a pourtant montré dans plusieurs conflits sociaux (le plus symptomatique fut l’abrogation de la loi sur les hydrocarbures suite aux remous qu’elle avait suscités dans le pays) que le pouvoir a fini par reculer et revoir sa copie. Même si elles n’ont pas le statut et les moyens de véritables contre-pouvoirs, les organisations sociales, celles qui ont notamment un caractère revendicatif, peuvent jouer néanmoins le rôle efficace de la mouche du coche.
Omar Berbiche
Omar Berbiche
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