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La crise des "subprimes" pourrait coûter 2 000 milliards de dollars

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  • La crise des "subprimes" pourrait coûter 2 000 milliards de dollars

    Jusqu'où la facture de la crise financière grimpera-t-elle pour le secteur bancaire mondial ? A mesure que la situation se dégrade sur le marché du logement américain – "un déclin sans précédent depuis la Grande Dépression" de 1929, estime la banque américaine Wells Fargo –, les banques révisent en hausse le montant de leurs pertes. Celles-ci atteignent désormais un montant cumulé de 65,3 milliards de dollars (44,3 milliards d'euros), dont les trois quarts pour les banques américaines (48 milliards de dollars).

    Pris dans la tourmente, le numéro un mondial, Citigroup, a déjà dû rayer près de 16 milliards de dollars de valeur dans ses livres. Il pourrait subir 15 milliards de dollars de dépréciations d'actifs supplémentaires, selon les calculs de sa rivale américaine Goldman Sachs.

    Cette inflation arithmétique affole les boussoles. Depuis quelques jours, les économistes employés par les grandes institutions financières revoient à la hausse leurs prévisions du coût de la crise pour les années à venir. Après l'estimation de 400 milliards de dollars calculée par la Deutsche Bank fin octobre, un chiffre fondé sur des hypothèses économiques déjà pessimistes, Goldman Sachs pousse aujourd'hui le curseur à 2 000 milliards de dollars.

    C'est plus que le produit national brut (PNB) de l'Italie (1 724,9 milliards de dollars en 2005) et presque autant que celui de la France (2 177,7 milliards). Pour mémoire, aux débuts de la crise financière, cet été, la Réserve fédérale américaine (Fed) en avait chiffré l'impact à 100 milliards de dollars.

    Ces nouveaux chiffrages, bâtis sur des scénarios catastrophes, s'efforcent d'anticiper au maximum les effets de la crise partie des Etats-Unis. Ils agrègent des pertes directes (crédits immobiliers impayés) et indirectes (importantes pertes de valeurs sur des instruments financiers adossés à ces crédits, activité bancaire au ralenti etc.), déjà constatées comme à venir.


    UN SECTEUR FORTEMENT CAPITALISÉ

    Ainsi, pour parvenir à son chiffrage de 2 000 milliards de dollars, Goldman Sachs a considéré qu'une perte d'un dollar sur un crédit hypothécaire entraîne une diminution de dix dollars sur la production de crédits nouveaux. Ce calcul répond à une logique simple : moins les banques gagnent d'argent, moins elles en prêtent. Toute crise entraîne un effet de rationnement du crédit.

    Bien que ces chiffrages soient sujets à caution – la plupart des modèles économiques des banques restant bâtis sur une crise à 200 milliards de dollars –, ils posent la question de la capacité de résistance du secteur bancaire mondial à une crise financière violente et durable. Pourrait-il affronter un tel choc ? Quelles en seraient les conséquences ?

    D'un point de vue global, l'inquiétude n'est pas de mise. Pour violente qu'elle soit, la crise n'a altéré, à ce jour, que les résultats des banques sans entamer leurs fonds propres. Même si cela devait être le cas, le niveau élevé de capitaux du secteur bancaire a de quoi rassurer.
    Selon l'éditeur d'informations économiques Bureau van Dijck, qui développe l'outil Bankscope, sur les 1 000 plus grandes banques mondiales, 467 possèdent des données exploitables. Elles affichent ensemble 4 427 milliards de dollars de fonds propres, un confortable coussin de sécurité face à une crise même coûteuse. Cela, bien sûr, n'exclut pas des accidents et des défaillances localisées, d'établissements spécialisés de taille modeste.

    Les autorités bancaires européennes sont sereines face à ce qu'elles ne qualifient pas encore de crise financière mais de "correction significative des marchés". Certes, la brutalité avec laquelle la crise de liquidités de l'été s'est manifestée en Europe – obligeant la Banque centrale européenne (BCE) à injecter de l'argent pour rétablir la confiance – a surpris les banquiers les plus expérimentés.

    Mais la bonne santé des banques les rassure : la crise intervient à un moment où celles-ci ne sont jamais aussi bien portées. Au prix d'importantes restructurations et de fusions depuis dix ans, elles ont renforcé leur capacité de résistance.

    "La rentabilité des banques s'est encore améliorée en 2006, notamment pour les moyennes et les grandes", relève la BCE dans un rapport sur la stabilité bancaire paru le 14 novembre. Pour la BCE, "la forte rentabilité des banques (…), ainsi que le renforcement de leur solvabilité, feront office d'amortisseurs face à d'éventuelles pertes, prévues ou pas".

    RISQUES ACCRUS

    Ce discours n'empêche pas la BCE de rester prudente. "Les risques à court terme se sont accrus (…), les interrogations des marchés sur les prévisions de résultats aussi, avertit la BCE, ces problèmes pourraient être aggravés par des développements inattendus sur le marché des crédits hypothécaires américains (…)."


    La même analyse prévaut dans les agences de notation. Tout en s'attendant à "d'importantes fluctuations des résultats trimestriels" après des années records, Arnaud de Toytot chez Standard and Poor's juge "les banques robustes" et "leur capacité de résistance solide".

    S'agissant de la France, Stéphane LePriol de Moody's voit les banques "bien armées pour affronter une crise, étant solidement capitalisées et dotées de modèles d'activités équilibrés". Il parle d'"une crise gérable, en regard d'une exposition limitée aux risques, sauf si celle-ci devait s'aggraver et s'étendre à d'autres actifs".


    Moody's a soumis toutes les banques françaises à des "stress-tests" et, rapporte M. Le Priol, "même dans le pire des cas [si toutes les activités souffraient], toutes retrouveraient, dès juin 2008, c'est-à-dire en un an, leur niveau de solvabilité de juin 2007".



    Anne Michel (Le Monde)
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