Annonce

Réduire
Aucune annonce.

Les raisons du gel de la privatisation du Crédit Populaire d’Algérie

Réduire
X
 
  • Filtre
  • Heure
  • Afficher
Tout nettoyer
nouveaux messages

  • Les raisons du gel de la privatisation du Crédit Populaire d’Algérie

    A l'argumentaire avancé par la ministre déléguée à la Réforme financière pour justifier «la suspension» du processus de privatisation du CPA, les banquiers en donnent un autre, celui rappelant «l'existence de rapports de force au sein des centres décisionnels qui obligent à gérer en premier des intérêts personnels».

    Le seul motif de ce gel de dernière minute, dit Fatiha Mentouri, est que «ce sont les incertitudes extrêmement sévères qu'a induites cette crise des subprimes en terme de visibilité des marchés financiers et sur le jeu de la concurrence et ses conséquences sur la décote qu'il pourrait y avoir sur le prix de la cession du CPA».

    La ministre délégué à la Réforme financière affirme vouloir «expliciter la décision de suspendre le processus de privatisation du CPA dans l'esprit de la grande transparence dans ce que fait le gouvernement». Elle demande aux journalistes «une petite faveur pour réellement transcrire et rapporter les propos comme ils sont dits ici parce que c'est un dossier éminemment sensible». C'est que la ministre se veut absolument convaincante à propos d'une décision qui a laissé perplexes les observateurs les plus avertis des marchés financiers mondiaux.

    A ceux qui doutent de la bonne foi des décideurs, elle affirme que «les options prises en matière financière, à savoir l'ouverture du secteur ou sa privatisation, sont irréversibles». Soulignant bien sûr «l'optique dans laquelle s'inscrit l'ouverture du capital des banques loin de toute approche dogmatique». Optique dans laquelle a été inscrit «le CPA d'abord et la BDL ensuite - deux banques qui constituent le coeur de la finance d'Alger de par leur potentiel - et qui est un moyen privilégié pour introduire la modernité dans le secteur, un catalyseur et un canal de transmission du savoir-faire», dit Mentouri.

    Et des options qui plus sont prises, dit-elle, «en toute souveraineté, et également en toute souveraineté que la décision a été prise de reporter la privatisation du CPA». La ministre doit en principe savoir que la décision en question n'a pas interloqué par le fait qu'elle aurait été dictée de l'extérieur mais parce qu'elle serait l'oeuvre exclusive de centres décisionnels «qui par des rapports de force obligeraient à gérer en premier des intérêts personnels». C'est peut-être pour cette raison que «techniquement, la décision de suspendre n'a pas été bien évaluée», font remarquer avant toute chose les spécialistes de la finance.

    Mais la ministre déléguée tente par des détails et un timing précis marquant les différentes phases du processus de cession du CPA, de lui donner un sens qu'elle veut responsable et réfléchi.

    Récit de la ministre: initié en 2005, le processus de privatisation du CPA a débuté par le recrutement d'une banque d'affaires qui a entamé sa mission le 20 février 2006 en procédant à la bio-diligence, à définir ou à peaufiner la stratégie de privatisation.



    «LE CPA A VALEUR D'EXEMPLE...»


    Il y a eu préqualification des investisseurs en octobre 2006, elle devait s'achever le 26 novembre 2006 par la présélection de l'offre. Elle note que les offres n'ont pas encore été réceptionnées. Evocation du pacte des actionnaires, il fallait être vigilant.

    Le 20 mai 2007, le nombre de documents était d'à peu près 400. Chemin faisant, ce nombre s'est multiplié par deux. Il fallait donc un autre data room qui a été achevé le 26 juillet 2007. Le 13 août 2007, transmission de la dernière version aux banques préqualifiées. Nous avons reçu leur proposition d'amendements des documents. Le tout a été transmis le 29 octobre 2007.

    Les offres étaient attendues pour aujourd'hui (NDLR, hier) seulement dans l'intervalle, il s'est passé un certain nombre de choses. Il y avait dans la course le Crédit Agricole, la Citibank la Société Générale, BNP Paribas, la Santander. Mai 2007, Santander qui était engagée dans une opération de fusion-acquisition d'une grande banque européenne s'est retirée à son corps défendant mais son intérêt pour l'Algérie demeure entier. Le 23 novembre 2007, le Crédit Agricole a souhaité de voir reporter la date limite de la remise des offres. En fin de course, ne restaient que trois banques, ce qui risquait d'altérer d'une certaine façon le jeu de la concurrence. Crise de «subprimes» en plus des turbulences qui agitent les marchés hypothécaires particulièrement aux Etats-Unis. Donc, s'abstenir de prendre des décisions stratégiques telle la reprise du CPA. S'obliger à un recul. Incidences sur de très grandes banques internationales. Beaucoup de mal à circonscrire et à en évaluer les conséquences. D'ailleurs, la Citibank a été obligée d'engager un processus de restructuration et de recomposition de sa stratégie de management. Son président a démissionné pour avoir mésestimé ou pour avoir fait une appréciation optimiste des conséquences de la crise. Nous avons réellement souhaité qu'elle soit dans la course jusqu'au bout. Les effets de la crise sont préoccupants. Entre 400 et 500 milliards de dollars de perte aux USA qui sont l'épicentre de ce mini-séisme. Federal Reserve n'est pas le seul à penser que les choses ne vont pas s'améliorer de sitôt. La présidence portugaise de l'Union européenne partage la même appréciation. Face à cette volatilité quotidienne exceptionnelle des marchés, l'Etat a privilégié une attitude de prudence mesurée. Il est prêt à rouvrir ce dossier quand le moment sera jugé opportun. Le CPA a valeur d'exemple, ce qui devra déterminer la suite à donner à l'opération de l'ouverture du secteur financier. Fin du récit de la ministre. «Les effets sont venus tardivement, beaucoup de pertes pour les banques internationales, déstabilisation de leurs stratégies», répond-elle à une question sur le pourquoi du gel à la dernière minute, à la veille de l'ouverture des plis. Elle persiste et signe: «Le motif est bien celui-là, il n'est que celui-là pour notre pays, le peu de concurrence risquait de ne pas produire tous ses effets pour l'actionnaire qu'est l'Etat. Il est dans l'obligation de veiller aux intérêts des institutions financières.» Elle continue: «Nous ne pouvons pas vendre le CPA à un prix au-dessous de sa valeur ou de celui du marché.» Quand l'Etat aura-t-il une visibilité ? lui est-il demandé. «C'est vraiment la question à 1000 euros, j'aimerais bien qu'on me le dise, on ne peut pas fixer les choses ni les prévoir, on est dans l'expectative, vraiment à l'écoute des marchés pour reprendre le processus», souligne-t-elle. La reprise du processus se fera «là où il s'est arrêté», selon elle.

    Elle indique qu'il est aussi question d'élargir l'éventail pour remplacer les banques qui se sont retirées. «Je crois que ces banques ont parfaitement compris nos motivations, on ne peut pas avancer par temps de brouillard», affirme la ministre déléguée. Au passage, Mentouri estime que la crise n'aura pas de répercussions négatives sur les réserves de change. Elle est convaincue que «leur placement a été fait d'une manière la plus sûre possible, il vise des bons de trésor américain et non des titres sur les crédits hypothécaires». Elle explique que les réserves de change sont placées «une partie en dépôts pour nos besoins quotidiens, une autre en titres longs (bons de trésor).

    La banque d'Algérie diversifie à telle enseigne qu'elle a placé une partie en yens et en livres sterling alors que nos importations en ces monnaies sont limitées.» La ministre déléguée est persuadée que les banques étrangères soumissionnaires vont revenir «parce qu'elles ont fait le choix de s'implanter en Algérie». Elle affirme par ailleurs que «les présidents de banques publiques ont toujours été associés à leur processus de privatisation.

    Nous sommes en train de mettre en oeuvre un processus de restructuration dans lequel ils participent tous».

    Mohamed Djellab, PDG du CPA, à ses côtés, conforte ses propos par l'affirmative. Interrogé sur le pourquoi de ne pas avoir donné ces détails dans le premier communiqué du ministère, Mentouri répond: «Initialement, j'avais fait un communiqué très étoffé, mais compte tenu de mon agenda, on m'a demandé de faire un communiqué très court et de tenir un point de presse.»


    Par Le Quotidien d'Oran
Chargement...
X