Le chef libyen arrive ce lundi à Paris pour une visite de cinq jours. C’EST LA première visite en France du colonel depuis 34 ans. D’importants contrats sont attendus. La gauche s’indigne.
Ce n’est pas une visite d’État. Juste un « voyage officiel ». Mais même si le séjour du colonel Kadhafi (le premier depuis trente-quatre ans dans l’Hexagone !) n’est pas placé sous le plus haut signe protocolaire, le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il suscite la controverse.
À partir de ce lundi et durant cinq jours, le leader libyen sera l’hôte de Nicolas Sarkozy. Le président français le recevra à trois reprises et l’accueillera même à dîner à l’Elysée ce soir. Le colonel Kadhafi sera par ailleurs reçu à l’Assemblée nationale et devrait rencontrer des représentants du patronat français. Une visite au Château de Versailles et une autre à Colombey-les-deux-Eglises, sur la tombe du général de Gaulle – dont Kadhafi vante le côté « révolutionnaire » –, sont également envisagées. Pour que le leader libyen soit tout à fait à l’aise et puisse recevoir ses hôtes comme il aime à le faire chez lui, une tente de Bédouin sera même installée dans les jardins de l’hôtel Marigny, près de l’Elysée !
Serait-ce un signe de l’embarras diplomatique qu’elle suscite ? La visite du dirigeant libyen n’a en tout cas été confirmée à Paris que vendredi. Une confirmation qui a aussitôt déclenché un torrent de critiques. Le leader centriste François Bayrou juge cette visite « indigne » de la France. Le premier secrétaire du parti socialiste François Hollande et l’ancienne candidate à la présidentielle Ségolène Royal, à l’unisson, l’estiment « choquante ». Et le philosophe Bernard-Henri Lévy n’est pas en reste : « On n’invite pas un grand terroriste et un preneur d’otages international », tonne-t-il.
Le chef de l’État français assume, pourtant. Ce week-end, en croisant le colonel Kadhafi à Lisbonne pour le sommet Union européenne-Afrique, il l’a même ostensiblement salué. « Je suis très heureux de vous accueillir en France, lui a-t-il indiqué devant les caméras. Plus tard, devant la presse, Nicolas Sarkozy s’est justifié. Si nous n’accueillons pas des pays qui prennent le chemin de la respectabilité, que devons nous dire à ceux qui prennent le chemin inverse ? »
Depuis que Tripoli a officiellement renoncé aux armes de destruction massive et a accepté d’indemniser les victimes des attentats de Lockerbie (270 morts dans la destruction d’un Boeing de la Panam au-dessus de l’Écosse en 1988) et du DC10 d’UTA (170 morts, dont 54 Français, dans l’explosion de l’appareil au-dessus du désert du Ténéré en 1989), la Libye est officiellement redevenue fréquentable. Paris n’est d’ailleurs pas la seule capitale à normaliser ses relations avec Tripoli : Londres et Madrid, où le dirigeant libyen se rendra d’ailleurs après sa venue en France, ont suivi la même voie.
Mais le régime du colonel Kadhafi n’en demeure pas moins très controversé. Peine de mort, torture, emprisonnement ou disparition d’opposants politiques : les associations des droits de l’homme continuent de pointer les exactions d’un régime qui prétend être devenu « respectable ». Les propos tenus ce vendredi encore par le dirigeant libyen ont choqué : Mouammar Kadhafi, tout en indiquant que les attentats du 11 septembre 2001 étaient selon lui « un acte de folie », n’en a pas moins indiqué que « le terrorisme des faibles contre les forts était parfois justifié ». Autre terrain glissant : il a réclamé des indemnités pour les anciens pays colonisés, un propos qui pouvait directement viser la France, l’une des principales anciennes puissances coloniales. Et de fustiger aussi le pouvoir « dictatorial » du Conseil de sécurité des Nations unies.
« Si je n’avais pas parlé au colonel Kadhafi, les infirmières bulgares ne seraient toujours pas libérées », se défend Nicolas Sarkozy, qui s’était rendu à Tripoli fin juillet après la mission de « médiation » de son ex-épouse Cécilia. L’Elysée continue de démentir que cette visite en France du dirigeant libyen soit la contrepartie de la libération des infirmières bulgares et du soignant palestinien. Mais la polémique sur les compensations accordées à Tripoli bat son plein. D’autant que le voyage en France de Mouammar Kadhafi devrait se solder par la signature d’importants contrats. Des Airbus, une centrale nucléaire, des équipements militaires : le montant des marchés devrait atteindre 3 milliards d’euros.
Après les promesses de « rupture » en matière diplomatique du candidat Sarkozy durant la campagne présidentielle (il ne manquait pas une occasion d’évoquer les droits de l’homme), le retour à la « realpolitik » est saisissant.
Le ministre des Affaires étrangères Bernard Kouchner, qui peine décidément à trouver ses marques dans ce gouvernement, a qualifié la visite libyenne à sa manière : « De temps en temps, dit-il, il faut avaler son chapeau dans ce métier. »
Le Soir
Ce n’est pas une visite d’État. Juste un « voyage officiel ». Mais même si le séjour du colonel Kadhafi (le premier depuis trente-quatre ans dans l’Hexagone !) n’est pas placé sous le plus haut signe protocolaire, le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il suscite la controverse.
À partir de ce lundi et durant cinq jours, le leader libyen sera l’hôte de Nicolas Sarkozy. Le président français le recevra à trois reprises et l’accueillera même à dîner à l’Elysée ce soir. Le colonel Kadhafi sera par ailleurs reçu à l’Assemblée nationale et devrait rencontrer des représentants du patronat français. Une visite au Château de Versailles et une autre à Colombey-les-deux-Eglises, sur la tombe du général de Gaulle – dont Kadhafi vante le côté « révolutionnaire » –, sont également envisagées. Pour que le leader libyen soit tout à fait à l’aise et puisse recevoir ses hôtes comme il aime à le faire chez lui, une tente de Bédouin sera même installée dans les jardins de l’hôtel Marigny, près de l’Elysée !
Serait-ce un signe de l’embarras diplomatique qu’elle suscite ? La visite du dirigeant libyen n’a en tout cas été confirmée à Paris que vendredi. Une confirmation qui a aussitôt déclenché un torrent de critiques. Le leader centriste François Bayrou juge cette visite « indigne » de la France. Le premier secrétaire du parti socialiste François Hollande et l’ancienne candidate à la présidentielle Ségolène Royal, à l’unisson, l’estiment « choquante ». Et le philosophe Bernard-Henri Lévy n’est pas en reste : « On n’invite pas un grand terroriste et un preneur d’otages international », tonne-t-il.
Le chef de l’État français assume, pourtant. Ce week-end, en croisant le colonel Kadhafi à Lisbonne pour le sommet Union européenne-Afrique, il l’a même ostensiblement salué. « Je suis très heureux de vous accueillir en France, lui a-t-il indiqué devant les caméras. Plus tard, devant la presse, Nicolas Sarkozy s’est justifié. Si nous n’accueillons pas des pays qui prennent le chemin de la respectabilité, que devons nous dire à ceux qui prennent le chemin inverse ? »
Depuis que Tripoli a officiellement renoncé aux armes de destruction massive et a accepté d’indemniser les victimes des attentats de Lockerbie (270 morts dans la destruction d’un Boeing de la Panam au-dessus de l’Écosse en 1988) et du DC10 d’UTA (170 morts, dont 54 Français, dans l’explosion de l’appareil au-dessus du désert du Ténéré en 1989), la Libye est officiellement redevenue fréquentable. Paris n’est d’ailleurs pas la seule capitale à normaliser ses relations avec Tripoli : Londres et Madrid, où le dirigeant libyen se rendra d’ailleurs après sa venue en France, ont suivi la même voie.
Mais le régime du colonel Kadhafi n’en demeure pas moins très controversé. Peine de mort, torture, emprisonnement ou disparition d’opposants politiques : les associations des droits de l’homme continuent de pointer les exactions d’un régime qui prétend être devenu « respectable ». Les propos tenus ce vendredi encore par le dirigeant libyen ont choqué : Mouammar Kadhafi, tout en indiquant que les attentats du 11 septembre 2001 étaient selon lui « un acte de folie », n’en a pas moins indiqué que « le terrorisme des faibles contre les forts était parfois justifié ». Autre terrain glissant : il a réclamé des indemnités pour les anciens pays colonisés, un propos qui pouvait directement viser la France, l’une des principales anciennes puissances coloniales. Et de fustiger aussi le pouvoir « dictatorial » du Conseil de sécurité des Nations unies.
« Si je n’avais pas parlé au colonel Kadhafi, les infirmières bulgares ne seraient toujours pas libérées », se défend Nicolas Sarkozy, qui s’était rendu à Tripoli fin juillet après la mission de « médiation » de son ex-épouse Cécilia. L’Elysée continue de démentir que cette visite en France du dirigeant libyen soit la contrepartie de la libération des infirmières bulgares et du soignant palestinien. Mais la polémique sur les compensations accordées à Tripoli bat son plein. D’autant que le voyage en France de Mouammar Kadhafi devrait se solder par la signature d’importants contrats. Des Airbus, une centrale nucléaire, des équipements militaires : le montant des marchés devrait atteindre 3 milliards d’euros.
Après les promesses de « rupture » en matière diplomatique du candidat Sarkozy durant la campagne présidentielle (il ne manquait pas une occasion d’évoquer les droits de l’homme), le retour à la « realpolitik » est saisissant.
Le ministre des Affaires étrangères Bernard Kouchner, qui peine décidément à trouver ses marques dans ce gouvernement, a qualifié la visite libyenne à sa manière : « De temps en temps, dit-il, il faut avaler son chapeau dans ce métier. »
Le Soir
Commentaire