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500 milliards de dollars gérés selon la charia dans le monde

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  • 500 milliards de dollars gérés selon la charia dans le monde

    Longtemps taboue, l'arrivée en France des banques et des techniques financières conformes aux préceptes de l'islam est désormais à l'ordre du jour. De nombreux signes témoignent de l'intérêt de la place de Paris, comme la tenue du premier Forum français de la finance islamique, jeudi 6 décembre. Au moment où les pétrodollars affluent, Paris veut concurrencer Londres, pionnière en Europe, et envoyer un signal aux investisseurs et aux clients du Golfe. Les banques s'intéressent aussi aux perspectives de ce marché en France ou au Maghreb.

    La finance islamique proscrit notamment l'usage de l'intérêt - auquel est préférée une marge bancaire - ou l'investissement dans l'alcool, l'armement, les jeux d'argent, etc. Existant depuis trente ans, principalement au Moyen-Orient, elle croît à un rythme évalué à 15 % par an. Un rapport sénatorial publié en octobre, "L'âge d'or des fonds souverains au Moyen-Orient", évalue les actifs gérés par les banques islamiques entre 265 et 500 milliards de dollars dans le monde.


    "AMÉNAGEMENTS"
    Son avenir en France pourrait être abordé jeudi 20 décembre - même s'il n'est pas à l'ordre du jour - lors du prochain Haut comité de place, qui réunit les acteurs de l'industrie financière parisienne et est présidé par la ministre de l'économie Christine Lagarde. Des propositions doivent être présentées début 2008 par Paris Europlace. Bercy, qui "ne voit pas actuellement d'obstacles majeurs" au développement de la finance islamique, se déclare "très ouvert s'il fallait procéder à des aménagements" que les acteurs de la place souhaiteraient voir figurer dans le projet de loi de modernisation de l'économie prévu au printemps. "C'est un élément important de l'attractivité de la place de Paris. Il faut identifier et traiter certains frottements fiscaux qui risquent de rendre prohibitifs le coût de certaines opérations et travailler sur la régulation bancaire en adaptant l'interprétation des normes de solvabilité, sans sacrifier la solidité financière et la transparence", explique Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances du Sénat. Dans certains cas, la finance islamique prévoit une double transaction pour la même opération, et donc potentiellement une double perception de TVA ou de droits de mutation.


    Londres a déjà éliminé ce type d'obstacles : élargissement des exemptions fiscales dont bénéficient les sociétés émettant des bons du Trésor aux obligations islamiques (sukuk) ; suppression du double droit de timbre frappant les prêts hypothécaires islamiques ; lancement, en février, d'un deuxième marché de négoce des sukuk ; création de départements spécialisés au sein de la Banque d'Angleterre et de la Financial Services Authority et encouragement à la Islamic Bank of Britain, première banque de détail islamique agréée outre-Manche en 2004. "Le Royaume-Uni peut devenir une plate-forme commerciale avec le monde musulman, mais seulement s'il devient aussi un centre pour la finance islamique", déclarait Gordon Brown, alors, chancelier de l'Echiquier, en mars 2006.

    "En tant que tel, le marché domestique, constitué de 2,5 millions de Britanniques musulmans, est trop petit pour concurrencer Dubaï ou Bahreïn. La force de Londres, c'est la City", souligne un professionnel londonien. C'est justement ce qui aiguillonne les autorités françaises alors que les grandes banques hexagonales sont actives depuis longtemps au Moyen-Orient. "En matière de finance islamique, toutes les opérations des banques françaises remontent sur la place de Londres où elles sont compensées ou refinancées, car elle s'est organisée depuis dix ans pour les accueillir. C'est assez dommage et paradoxal", déplore M. Marini.

    En France, les produits et services islamiques peuvent être proposés par des banques déjà agréées et pourraient l'être par des banques anglaises démarchant en France ou d'autres établissements islamiques demandant un agrément. "Des projets d'implantation ont été portés à la connaissance des autorités françaises. Aucun n'est encore arrivé à maturité, mais leur existence montre que le sujet est d'actualité", a expliqué le sous-gouverneur de la Banque de France, Jean-Paul Redouin, lors du Forum français de la finance islamique. Il a rappelé les conditions qui s'imposent à tous les établissements agréés, tels que la qualité des dirigeants, la sécurité de la clientèle, le contrôle interne et notamment "les dispositifs de prévention du blanchiment des capitaux et du financement du terrorisme", prenant note "avec beaucoup d'intérêt" de l'action menée par les organismes islamiques spécialisés - l'Islamic Financial Services Board et l'Accounting and Auditing Organization of Islamic Financial Institutions - "en vue d'une plus grande harmonisation des normes comptables des établissements islamiques".

    La première demande a été déposée à la commission bancaire en décembre 2006 par FS International Partners, basé à Genève. Cette société indique sur son site Web qu'elle est conseillée en Europe par Pierre Ceyrac, un ancien député du Front national plus connu autrefois pour son engagement en faveur de la secte Moon... Au-delà de cette anecdote, l'autorisation de "banques halal" pourrait rouvrir le débat sur la laïcité en France.
    Marc Roche (à Londres) et Adrien de Tricornot

    Le Monde Economique
    édition du 18.12.07.
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