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Algérien, où est ta place ?

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  • Algérien, où est ta place ?

    Je ne supportais plus ma situation. Misère pendant mes études primaires, dèche pendant mes études universitaires et désespoir après la fin de mes études.

    Après quelques mois de chômage puis un poste sans avenir, le constat fut accablant, ce pays n’est pas fait pour les intellectuels ou les ambitieux. Ce système qui encourage la précarité, qui prône l’indifférence et qui parsème la haine ne peut être combattu et l’escapade est plus qu’un recours, c’est l’unique recours. Une chose était sûre dans mes pensées : « ma place n’est pas ici »…

    Je fis ce que firent mes autres frères et des millions de mes semblables, je mis les voiles. Je me suis retrouvé dans un autre monde, un monde plus juste, plus correct, plus respectueux, plus dynamique, en deux mots incomparablement meilleur.

    Mais jour après jour, je compris qu’on ne pouvait tout avoir et qu’un étranger basané restera toujours l’étranger basané venu d’ailleurs. J’ai peut être un avenir, un espoir ici mais ma pensée va vers les millions de gens là bas qui ont oublié ce que veut dire avenir ou espoir.

    Mes pensées vont vers mes parents laissés seuls parce qu’ils refusaient d’abandonner le village natal. Je frôle la crise cardiaque à chaque fois que l’indicatif de mon pays s’affiche sur mon téléphone, une maladie, un décès ? Souvent je pense que je suis un lâche pour avoir abandonné les personnes qui ont donné leur vie pour moi et qui ont piétiné leurs cœurs en nous laissant nous en aller. Lâche quand je pense que je n’étais pas là lorsqu’ils avaient le plus besoin de moi. Lâche lorsqu’ils me disent au téléphone que tout va bien mais qu’au fond des choses, tout le monde sait que ce n’est pas vrai. Certes ici je suis étranger mais du coup, en m’en allant, mon père et ma mère le sont devenus aussi et dans leurs propre pays.

    Je ne me suis jamais senti à l’aise dans ce pays qui ne te comprend pas, qui ne partage pas tes idéaux et qui ne te laisse pas exercer librement ta foi. J’en ai marre de cette vision du tiers-mondiste venu d’ailleurs, des gens qui me regardent d’en haut et de ce regard m’accusant d’avoir participé dans la croissance du taux de chômage. Mais je me ressaisis et je me rappelle de mes sombres jours dans mon pays, des incompétents qui nous gouvernent et des malfrats qui sont traités comme des héros et cette fougue soudaine s’évanouit petit à petit.

    Mais une pensée est certaine dans mon esprit : « ma place n’est pas ici non plus ». Où peut donc être ma place ?
    J'étais là...

  • #2
    simplenova bonjour et bienvenue

    Ton sujet avec ce fort témoignage sont poignants et déchirants. Tu résumes bien les non choix qui sont proposés à l’algérien :
    mourir à petit feu dans un monde ne favorisant ni l’honnêteté, ni l’ambition « dans l’honnêteté », ni épanouissement intellectuel, personnel, …
    ou
    s’exiler avec tous les inconvénients inhérents aux expatriés.
    Souvent je pense que je suis un lâche pour avoir abandonné les personnes qui ont donné leur vie pour moi et qui ont piétiné leurs cœurs en nous laissant nous en aller. Lâche quand je pense que je n’étais pas là lorsqu’ils avaient le plus besoin de moi. Lâche lorsqu’ils me disent au téléphone que tout va bien mais qu’au fond des choses, tout le monde sait que ce n’est pas vrai. Certes ici je suis étranger mais du coup, en m’en allant, mon père et ma mère le sont devenus aussi et dans leurs propre pays.
    Mais pourquoi culpabiliser pour autant ? Peut on aider les siens dans un environnement dans lequel on ne peut même pas s’aider soit même ? En t’exilant, tu fais juste un mauvais choix, mais le moins mauvais, car te laisser pourrir la vie serait non seulement un mauvais choix, mais surtout le plus mauvais. C’est notre destin ?
    Je suis père et fais de mon mieux au regard de cette citation :
    L'exemple, c'est tout ce qu'un père peut faire pour ses enfants. Thomas Mann

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    • #3
      Mais pourquoi culpabiliser pour autant ?
      Bonjour,

      ça ne me concerne pas directement mais j'étais avec un vieil homme dont les enfants sont tous partis. Il m'a dit : "je me sens moi aussi étranger". Ses dires et sa solitude m'ont brisé le coeur.

      Je ne discute pas le choix des gens qui sont partis, au contraire - et je l'ai dit dans mon texte - c'est l'unique recours. Mais il y a des moments comme les maladies ou les décès où c'est la présence et rien que la présence qui est indispensable.

      Merci
      J'étais là...

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