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Faut-il avoir peur de la Chine?

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  • Faut-il avoir peur de la Chine?

    Les dépenses de la Chine en matière de défense ont augmenté à une vitesse vertigineuse ces dernières années. Washington estime que la modernisation militaire chinoise est « impressionnante ».

    La Chine a même testé cette année, avec succès, une arme antisatellite. Cette réalité est trop souvent occultée par ceux qui sont fascinés par la Chine et qui se content de la voir comme « l’usine du monde ».

    C’est ce qu’affirme Stéphane Marchand, journaliste au quotidien français Le Figaro. Auteur du livre Quand la Chine veut vaincre, paru récemment chez Fayard, il soutient que l’empire du Milieu se prépare à la guerre et qu’il faut s’en méfier.
    Il a expliqué à La Presse l’impact de l’essor de la Chine en tant que puissance militaire.

    Q: Vous affirmez que la Chine se prépare à la guerre. Vous soulignez l’essor saisissant de la puissance militaire chinoise. Faut-il avoir peur de la Chine ?

    R: J’essaie d’expliquer qu’il y a une version militaire de l’émergence de la Chine en tant que grande puissance. Que si ce qu’il se produit actuellement n’était que l’accession de la Chine à son espace naturel et à sa dimension militaire naturelle, il faudrait quand même faire très attention. Si la Chine occupe tout l’espace stratégique qui lui est normalement dévolu, c’est un tremblement de terre. Un séisme considérable évidemment en Asie et dans le Pacifique, mais aussi de manière globale parce que c’est une puissance globale. Il ne faut pas avoir peur. Parce que la peur est mauvaise conseillère. Mais il faut être conscient que ce que la Chine est en train de faire aura des répercussions massives sur les équilibres stratégiques en Asie et dans le monde.

    Q: Ces derniers temps, la Chine semble s’amuser à mettre des bâtons dans les roues des grandes puissances occidentales. Dans les dossiers du Darfour, de l’Iran et de la Birmanie par exemple.

    R: Dans ces trois cas, l’intérêt de la Chine est énergétique. (…) La chine a besoin d’énergie. Elle va donc en général chercher les producteurs de pétrole et de gaz qui ne plaisent pas trop aux Occidentaux. Mais au-delà de cette logique, il y a le fait que la Chine a très peur qu’on conteste sa légitimité dans un certain nombre d’endroits, notamment au Tibet. Alors elle est solidaire avec tous les pays qui sont montrés du doigt par la communauté occidentale.

    Q: Vous écrivez que la stratégie chinoise pour « gagner la guerre » est de « ronger les forces de l’ennemi à la manière de termites ». Comment le pays se préparer-t-il à la guerre ?

    R: Il est tout à fait clair qu’en ce moment, ce qui structure l’effort militaire chinois, c’est le scénario taiwanais. Il est tout simple : la Chine veut être capable d’empêcher Taiwan d’éventuellement matérialiser son indépendance. Et surtout, elle veut être capable d’empêcher les États-Unis de venir en aide à Taiwan. Elle veut que les Américains comprennent que le coût de cette aide serait insupportable. La quasi-totalité des armements que la Chine achète aujourd’hui, c’est pour se prémunir contre une intervention américaine. Un accent énorme est donc mis sur les bateaux de la marine américaine. Par exemple, pour être capable de couler un porte-avions américain, la Chine fabrique des sous-marins. (…) La Chine se prépare aussi à endommager la panoplie spatiale américaine. Ou du moins à faire croire aux Américains qu’elle en est capable.

    Q: Une cyberguerre figurerait aussi dans les plans de la Chine ? Vous évoquez un éventuel Pearl Harbor informatique.

    R: Les Chinois veulent s’attaquer au cœur de la machine militaire américaine. Un Pearl Harbor, c’est-à-dire une attaque massive contre les ordinateurs, est tout à fait possible. Personne ne sait vraiment si ça peut marcher ou pas, mais qui peut prendre le risque ? (…) Cette idée de cyberguerre est donc prise très au sérieux par les Américains.

    Q: Cela dit, rien ne semble indiquer que la Chine soit ou puisse devenir une puissance belliqueuse ?

    R: C’est vrai. Ce n’est pas dans sa tradition. C’est un pays qui, a priori, n’est pas belliqueux et se méfie des aventures militaires. Ça pourrait nous rassurer un petit peu. Mais la guerre telle qu’elle est envisagée aujourd’hui n’est plus du tout une guerre d’invasion. On ne s’arme pas pour envahir l’autre. On s’arme pour peser, pour avoir de l’influence, pour être incontournable. Dans une négociation commerciale, par exemple.

    Q: D’après vous, nous n’assistons pas à une guerre froide, mais bien à une guerre sourde entre les États-Unis et la Chine.

    R: Ça n’a rien à voir avec le rapport entre les États-Unis et l’Union soviétique jusqu’en 1991. Je pense que le rapport avec la Chine est beaucoup plus compliqué. Vous avez une compétition stratégique qui peut déboucher sur une confrontation militaire, mais aussi une coopération commerciale, financière. La dette américaine est largement possédée par la Chine. Ça donne à la Chine un levier énorme sur les États-Unis. Elle ne peut pas l’utiliser parce qu’elle se nuirait à elle-même. Mais qui sait ? Il ne faut jamais oublier que la Chine est une dictature communiste, contrôlée par un parti unique et que les réactions de ces pays-là sont imprévisibles.

    Q: On raconte d’ailleurs qu’avant l’arrivée de George W. Bush à la Maison-Blanche en 2001, la CIA lui a fait savoir que les trois plus grandes menaces à l’égard de son pays étaient : Oussama ben Laden, la prolifération des armes de destruction massive et la montée en puissance de la Chine.

    R: Il ne faut pas être naïf. Il ne faut pas tomber dans le travers qui consiste à ne voir dans la Chine qu’une gigantesque plateforme industrielle. Dire avec des trémolos émus dans la voix que c’est l’usine du monde. (…) Vous avez tout à fait raison de mentionner ben Laden. Le 11 septembre 2001 a complètement bousculé l’ordre des priorités et, d’une certaine manière, l’a dissimulé. Je pense que la Chine est un danger beaucoup plus grand que ben Laden. ben Laden est une forme latente d’insurrection anti-américaine. C’est la forme qu’elle prend maintenant après avoir pris plein d’autres formes dans l’histoire. Mais la Chine, c’est la montée d’un véritable ennemi.

    - AFP
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