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Algérie : l’exigence démocratique

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    Algérie : l’exigence démocratique




    L’actualité de ces dernières semaines met une fois de plus l’Algérie à la une, en nous rappelant les violations répétées des droits de l’homme qui y ont cours en même temps que l’immense espoir qui s’y dégage autour de la revendication légitime de tout un peuple pour une Algérie libre et démocratique.

    En tant que démocrate français, on ne peut qu’éprouver un attachement profond à ce pays et à son peuple. Cet attachement témoigne également de l’espoir que nous partageons en France : l’espoir d’une Algérie forte et unie, où régneraient les valeurs de paix, de respect de l’autre, une Algérie qui trouverait sa vraie place au sein du monde méditerranéen et au-delà ; au sein de la communauté internationale, enfin, une Algérie qui serait un véritable partenaire de la France.

    Au-delà des clivages politiques et des divergences philosophiques et culturelles qui composent le peuple algérien, notre objectif doit être d’apporter aux Algériens notre compréhension, notre solidarité mais surtout, notre soutien dans leur quête de moyens afin de s’épanouir pleinement dans un Etat démocratique, respectueux des libertés individuelles, collectives et publiques.

    Parce que l’histoire nous enseigne que la véritable force d’une nation réside dans son unité et dans les potentialités de chaque individu et parce que l’histoire nous montre que l’oppression et l’injustice, lorsqu’elles sont politiquement organisées, ne conduisent qu’à l’immobilisme et la régression. Nous devons inscrire notre action dans une démarche constructive et positive de soutien aux démocrates algériens qu’ils se trouvent à l’intérieur de partis politiques ou en dehors, à travers les syndicats, les mouvements associatifs (de femmes, culturels...). Parce que la politique menée à l’issue de la guerre pour l’indépendance se résume à l’accaparement de tout le pouvoir au profit d’une minorité, parce que l’Algérie doit appartenir à tous les Algériens, et parce que la souveraineté revient au peuple, les démocrates français doivent s’investir dans ce combat en refusant bien évidemment d’être tentés par une espèce d’ingérence que nous devons rejeter même si on ne doit pas rester indifférents au sort de ce peuple ami et qui nous est si proche historiquement mais aussi géographiquement.

    Cette reconnaissance de la dignité et de la responsabilité de chaque Algérien s’oppose encore une fois aux tentatives et à l’accaparement du pouvoir à travers un régime qui, aujourd’hui, veut prendre les apparences d’une démocratie dont personne n’est dupe. Aux heures les plus graves de l’histoire algérienne, le peuple algérien a su montrer, malgré sa diversité, une unité réelle que ni islamiste ni corrompu n’a su mettre en échec.

    L’échec par contre des dirigeants algériens est d’abord un échec politique : la « Révolution » confisquée constitue le prolongement direct de ce que l’on a coutume d’appeler le néo-colonialisme, car nous savons tous aujourd’hui que des intérêts occultes ont déterminé et conduit de façon quasi permanente les différentes politiques menées depuis l’indépendance en 1962.

    Soutenir la construction d’un Etat moderne, un Etat témoin de la souveraineté du peuple, garant de la même justice pour toutes et tous, au-delà des passe-droits ou des privilèges de quelques-uns, voilà le fondement qui doit guider notre action. Participation, responsabilité et transparence politique demeurent à ce jour les seuls leviers susceptibles de rendre aux Algériens leur indépendance encore une fois confisquée. La corruption et l’irresponsabilité des gouvernements algériens successifs, voilà les terribles cancers qui ont miné l’Algérie et que nous devons aider à éradiquer.

    En plus du désastre politique, l’Algérie vit également un désastre économique et social, et c’est la raison pour laquelle notre soutien doit aller au-delà de la construction d’un Etat de droit de l’autre côté de la Méditerranée. Notre soutien doit privilégier la libération de toutes les forces vives de ce pays. Dans ce cadre, l’Etat doit être le garant de la liberté d’entreprendre. La liberté du commerce et de l’industrie n’a pas encore totalement franchi les rives-ci de la Méditerranée. La libre concurrence et l’instauration d’une économie de marché sont les seuls gages du développement économique et social. L’Algérie dispose de potentialités énormes : réserves minières, hydrocarbures, capacités hydrauliques et agricoles, potentialités touristiques que bien des pays lui envient. Mais la richesse fondamentale de ce pays reste l’Algérien.

    Son ingéniosité, son courage, sa capacité d’adaptation, y compris en France, restent son principal atout. Sortir l’Algérie du marasme économique, que près de 40 ans d’autoritarisme ont accentué, passe non seulement par la privatisation des appareils de production selon les lois universelles du marché mais aussi par une évolution ou plutôt une révolution des mentalités. Aujourd’hui, les dirigeants algériens procèdent au bradage systématique des biens publics en dehors de toute transparence et à travers des réseaux occultes. L’Algérie doit être rendue aux Algériens, à ceux qui y travaillent, à ceux qui y vivent, à cette jeunesse qui lui témoigne un attachement sincère.

    L’instauration d’un cadre politique et économique libéral n’exclut pas un Etat fort qui assure et assume le contrôle notamment des secteurs économiques, dits stratégiques : défense, politique énergétique, télécommunications… L’Etat moderne est un Etat qui se trouve au centre d’un réseau de protection des individus. La légitimité du rôle social de l’Etat doit demeurer une priorité, car elle atteste de la volonté démocratique au sein des sociétés inégalitaires.

    Elle atteste surtout d’une volonté de redistribuer les richesses, et l’Algérie dispose des moyens matériels et humains nécessaires à l’aboutissement d’une politique sociale cohérente et juste. Désastre politique, désastre économique et social, l’Algérie vit dans ces heures sombres et tragiques un désastre culturel. En réaction à la politique d’isolement et de dirigisme bureaucratique, il faut répondre par une politique d’ouverture et d’échange.

    Le concept de la nation traduit un sentiment d’appartenance à une communauté humaine très large. Cette conception exige que soit reconnue la diversité des cultures qui composent l’Algérie en reconnaissant notamment la culture amazigh (berbère) dans sa plénitude et en reconnaissant officiellement la langue berbère. Alors que les échanges économiques et culturels entrent dans une phase de globalisation, de mondialisation, les gouvernants algériens optent pour la politique de la fuite en avant en menant une arabisation forcée complètement décalée par rapport au monde qui nous entoure.

    Alors que les différents systèmes éducatifs des principaux pays développés optent pour une diversification des enseignements, les dirigeants algériens enferment leur peuple dans une logique de repli sur soi dont les effets à long terme seront dûment ressentis. Dans cette perspective, chaque Algérien doit pouvoir s’épanouir à travers sa propre culture, le droit de cultiver sa spécificité au sein d’une nation unie qui transcende les particularismes locaux. Il faut en finir avec le préjugé selon lequel une culture unique doit s’imposer à tout un peuple.

    La diversité culturelle est commune à toutes les nations, elle ne constitue en aucun cas un danger pour ce pays en tant qu’Etat centralisateur, autonome et indépendant. Il faut demeurer ferme sur le principe de la souveraineté, de l’intégrité, et de l’indivisibilité territoriale de l’Algérie, car nous y sommes également attachés pour la France mais nous croyons surtout que c’est à travers son histoire et l’acceptation de ses cultures diverses que l’Algérie pourra s’affirmer et s’unir davantage.

    Soutenir l’édification d’un Etat respectueux de la volonté du peuple, un Etat qui aura définitivement cessé de violer son intégrité par une conception frauduleuse de la démocratie, voilà le sens que doit prendre l’engagement des démocrates français pour faire œuvre utile dans l’intérêt de ce peuple ami.

    L’auteur est Diplômé de l’Institut des hautes études internationales Professeur de droit au CNFPT Avocat aux barreaux de Paris et Marseille

    (el watan)
    Hacen Boukhelifa
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