Ouyahia se rallie à Belkhadem comme attendu, Ahmed Ouyahia, chef du RND, parti satellite de l’alliance présidentielle, vient de rendre public son soutien au projet de révision de la Constitution et à la réélection de Abdelaziz Bouteflika pour troisième mandat en 2009. Se jouant de mots et des médias à coup de petites phrases censées laisser planer le doute sur ses intentions ou pour le moins donner la preuve de son « autonomie de décision », après des semaines de supposé suspense, l’ancien chef du gouvernement a fini par dévoiler son jeu − une sinistre mystification politicienne dont nous sommes la cible −, avec cette déclaration sans ambiguïtés, « nous soutenons la révision de la constitution et la réélection du président Bouteflika ! », lancée jeudi lors de l'installation à Alger de la commission nationale de préparation du 3ème congrès ordinaire de son parti. Ce faisant, ouyahia abandonne définitivement le dossard d’opposant qu’il avait essayé d’enfiler, il y a quelques mois, lorsque les spéculations donnaient Bouteflika usé et malade, inapte à assumer sa charge. Porté par des médias oublieux de ses antécédents politique, et profitant de la confusion ambiante, Ouyahia n’avait pas hésité à surfer sur la vague d’agitation sociale qui secouait le pays durant le mois de ramadhan pour se payer, à moindre frais, une cure d’opposition, derrière laquelle se dessinait en filigrane son ambition de se poser en alternative crédible à la succession de Bouteflika au cas où… En stratège avisé, il avait tenté de disqualifier, par d’acerbes critiques, son challenger potentiel, Belkhadem, l’islamo-conservateur du FLN qui lui a ravi sa place. Certains commentateurs de presse s’étaient alors empressés de nous présenter ce qui n’était somme toute qu’un sordide affrontement au sein du sérail comme les prémices d’un changement. Et de nous dépeindre Ouyahia en chevalier blanc défenseur du secteur public, du pouvoir d’achat, des libertés publiques, de la veuve et de l’orphelin, Ouyahia opposant irréductible, pourfendeur de la politique de son ancien chef, Bouteflika. Pourtant, les faits d’armes de l’inventeur de la formule « terrorisme résiduel » restent inscrits en lettres de sang dans les annales du pays. Par deux fois chef du gouvernement, Ouyahia avait ouvert une véritable chasse aux sorcières contre les gestionnaires du secteur public, à l’issue de laquelle 3 000 cadres d’entreprises − celles-là même que Belkhadem est en train de brader −, furent jetés en prison. Des milliers d’autres prirent le chemin de l’exil. Le démantèlement du tissu industriel public, contre lequel il semblait protester, avait bien commencé aux cours de son premier gouvernement. Rappelé aux affaires au printemps 2003, il avait endossé les couleurs de Bouteflika, puis devenu très vite porte-drapeau de sa politique de réhabilitation de l’islamisme, soutenu et appliqué avec zèle la charte dite « pour la paix et la réconciliation nationale ». Le ralliement du RND de Ouyahia n’a donc rien d’une surprise, bien au contraire, il est tout à fait dans la logique politique de la coalition gouvernementale au pouvoir. Il ne reste à Belkhadem, chef d’orchestre de la campagne préparant le viol de la constitution, qu’à gagner le troisième larron de la coalition, le MSP, à son projet. Ce qui ne saurait tarder.
Meriem Benmehdi
Meriem Benmehdi
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