Annonce

Réduire
Aucune annonce.

Les meuble importés d'Asie bouleversent le secteur de l'ameublement en Algérie

Réduire
X
 
  • Filtre
  • Heure
  • Afficher
Tout nettoyer
nouveaux messages

  • Les meuble importés d'Asie bouleversent le secteur de l'ameublement en Algérie

    Avec l'éclatement de la famille patriarcale et l'avènement du ménage, l'aspiration au confort domestique s'est généralisée en Algérie. En plus de la chambre à coucher, l'équipement de la salle de séjour, de la chambre d'enfants et l'agencement de la cuisine au goût du jour deviennent dès lors des objectifs que s'assignent les nouveaux couples à la recherche de plus d'intimité et de création de conditions de vie décentes.

    Or, devant les prix exorbitants et surtout la qualité des produits exposés, il devient difficile de fixer un choix liant goût et coût.

    Au regard des styles produits localement, on peut conclure que le retour aux anciens styles, généralement plus sobres et mats, est de nos jours très en vogue. Néanmoins, certains ébénistes vous diront qu'à ce niveau, les normes de fabrication ne sont plus respectées. Il s'agit du choix du bois qui convient à chaque style. La sculpture sur bois blanc ou même rouge est en soi une contrefaçon, car ces deux qualités ne sont utilisées que pour la menuiserie générale. Les styles rustiques ne peuvent être conçus en dehors du hêtre, de l'acajou et du chêne notamment. Mais pour faire beau, les ébénistes s'efforcent de rendre un travail de finition appréciable avec des couleurs faux bois et des motifs sculptés, soit avec des formes géométriques (style berbère), soit avec des rosaces (style mauresque). Sur ces aspects, un vieil ébéniste, ayant abandonné la profession pour se convertir au commerce, nous expliquera que ces styles ne sont pas respectés et, parfois, on est devant un meuble où s'entremêlent plusieurs modes, donnant moins de beauté à la pièce.

    L'arrivée sur le marché national de meubles importés d'Asie, plus précisément de Malaisie et d'Indonésie, deux pays classés aujourd'hui, aux côtés de la Chine, parmi les grands producteurs mondiaux du mobilier, a complètement déséquilibré le secteur, particulièrement celui de l'ameublement domestique.

    En plus de l'affaiblissement des capacités de production nationale, ce sont des dizaines de vendeurs de meubles qui se sont rabattus sur le meuble asiatique. Dans toutes les grandes villes du pays et sur les grandes artères, de luxueux magasins exposent des meubles attrayants. Quant à la provenance de ce mobilier au nouveau design, la Malaisie est le pays qui revient le plus dans la bouche des vendeurs.

    Les prix, la finition mais...

    Quant aux prix, ils varient selon l'endroit et la différence peut atteindre les 5.000 dinars pour un même objet. C'est dire l'importance des marges bénéficiaires qui ont fait de cette activité un créneau juteux. Ceci dit, les prix initiaux sont de loin très faibles comparés aux marges engrangées par les importateurs, les grossistes et les détaillants et du premier maillon de la chaîne au consommateur. La marge, avouent certains grossistes, «atteint jusqu'à 200% du prix d'achat».

    Pour ce qui concerne le design, qui fait de ce produit la principale attraction, le mobilier de Malaisie attire une certaine clientèle, en général aisée, nullement intéressée par le rapport qualité/prix mais plutôt par son aspect extérieur. Outre la finition qui est impeccablement réussie, ces meubles importés se distinguent aussi par leur design moderne et innovant. Ces deux aspects sont les véritables atouts de ces meubles.

    Cependant, en l'espace de quelques années, le prix d'une chambre à coucher pouvant attendre jusqu'à 1 million de dinars, du fait que même le revêtement des murs est partie intégrante du lot, aujourd'hui, le même produit a connu une baisse de près de 50%. Explications: selon les connaisseurs du marché, il s'avère que « si au départ, les importateurs s'approvisionnaient à Dubaï, depuis deux années, ils se sont rapprochés directement des producteurs, d'où une chute importante du prix de vente. Les frais de transport, même s'ils sont plus importants, ne peuvent pas influer sur le prix de vente. Il est vrai que vous devez attendre plus de trois mois pour réceptionner votre marchandise; mais nous avons appris à gérer cet aléa », nous dira un marchand de meubles traitant avec un importateur basé à l'est du pays.

    Pour les ébénistes et les connaisseurs, « si la finition est bien réussie, la matière première laisse amplement à désirer. Fabriqués à base de panneaux et de MDF plaqué en PVC, les meubles dits malais sont certes très bien faits, mais ils sont classés dans la catégorie bas de gamme: ils sont loin d'égaler les meubles fabriqués à base de bois massif connu pour sa dureté et dont la durée de vie est longue », devait nous expliquer un ébéniste oranais. En revanche, poursuit-il, «les meubles en MDF ou en panneaux sont d'une vie très courte, surtout en Algérie qui est un pays chaud. Le PVC se décolle sous l'effet de l'humidité. Toutefois, si on assiste aujourd'hui à un grand engouement des consommateurs à l'égard de ce type de mobilier, leur cote va finir par baisser sensiblement dans un futur proche », devait conclure notre interlocuteur.

  • #2
    Le métier se perd

    Notre septuagénaire reviendra sur les raisons qui l'ont amené à abandonner un métier qui l'a pourtant fait bien vivre. Que faire ? Soit vous abdiquez, et vous devenez un simple revendeur, ou bien vous êtes condamné à disparaître. Avant, un vrai ébéniste est celui qui crée des modèles, c'est celui qui a le plus d'imagination et de créativité et c'est le plus reconnu parmi ses concurrents.
    Aujourd'hui, avec des moyens financiers plus importants, certains, généralement ne connaissant rien au métier, investissent dans ce créneau et font appel à une main-d'oeuvre peu qualifiée, sachant plus exécuter des modèles en vogue qu'en créer d'autres. En clair, on est passé du stade de l'artisanat au travail de série, devait-il encore préciser. Et pour conclure, notre vieil ébéniste dira avec amertume: « Je voudrais transmettre ce noble métier à mon fils, mais ce dernier a choisi de devenir fonctionnaire. Et avec du recul, je dirai qu'il avait raison, car de nos jours, et avec tous ces meubles qui nous viennent d'ailleurs, il est difficile de s'imposer ». Victimes d'une concurrence déloyale et trouvant mille et une difficultés pour écouler leurs marchandises, même à crédit, les fabricants locaux ont perdu du terrain, au même titre d'ailleurs que certains producteurs européens qui n'arrivent plus à placer leurs produits, même au sein de leurs pays. Pour ces raisons, certaines marques européennes de meubles très connues en Algérie, à l'instar de Mélodie, Olympique et autres marques italiennes, proviennent aujourd'hui de Malaisie. Les statistiques douanières confirment, en effet, la baisse des exportations européennes en mobilier vers l'Algérie. L'Italie est à ce titre l'exemple le plus édifiant avec un taux de 0% en 2005.

    D'ailleurs, pour sa survie, le producteur italien a procédé à la délocalisation de sa production vers des pays du Sud-Est asiatique, tous proches des fournisseurs de matière première et où la main-d'oeuvre est bon marché. Concernant les producteurs locaux, dont le nombre a augmenté notamment avec les différents dispositifs d'aide à l'emploi et de création de micro-entreprises, leur situation n'est plus reluisante et les quelques petites unités toujours en activité ne font que limiter les dégâts, en attendant de jours meilleurs.

    Cette reconfiguration du secteur du mobilier a eu des répercussions négatives sur le niveau de l'emploi avec la suppression de centaines de postes. C'est l'exemple d'un jeune qui a été contraint de se rabattre sur ce qui est appelé communément le meuble de bataille. « C'est un choix qui ne reflète nullement nos véritables capacités de production; mais en dehors de cette solution, nous ne pouvons que mettre la clé sous le paillasson », devait nous dire ce jeune chef d'entreprise qui a dû libérer près de 50% de son personnel. Idem pour deux entreprises publiques issues de la restructuration de l'ex-SNLB. Si celle de Boufarik, à savoir ADECOR, spécialisée dans la fabrication de meubles domestiques et bureautiques, la solution est de produire une gamme de produits aux prix ne dépassant pas les 80.000 dinars, des tarifs plus abordables pour les petites bourses, sa concurrente, NedroMeuble, de Nedroma, tente de s'adapter aux nouvelles données imposées par le géant asiatique en réorientant sa gamme de production avec l'acquisition de nouveaux équipements plus performants et une mise à niveau du personnel aux nouvelles technologies. Au regard de ses échantillons exposés notamment lors des foires de la production nationale, cette expérience s'avère concluante, pour peu que le cap soit maintenu.

    Un observateur du marché nous expliquera que le revirement qu'a connu ce segment n'a été profitable qu'aux importateurs algériens et l'envahissement que connaît notre marché par les produits asiatiques, dans différents domaines d'ailleurs, laisse perplexes les fabricants algériens de meubles. Pour eux, ce n'est pas tant l'introduction légale des marchandises sur le marché qui est décriée, mais plutôt le fait que les importateurs ne payent aucune taxe douanière sur les meubles introduits. Car si c'était le cas, les prix appliqués ne serait pas aussi inférieurs, disent-ils. Etant un produit fini, le meuble importé est en principe soumis à une taxe de 30%.

    Ce niveau élevé de la taxe, d'après certains fabricants locaux, ne permet pas de proposer des meubles à des prix semblables à ceux proposés actuellement sur le marché. Ce qui leur fait dire que le marché algérien de l'ameublement est aussi gagné par l'informel. Conscients des enjeux qu'implique l'ouverture de l'économie nationale, les fabricants algériens que nous avons rencontrés demandent seulement que l'Etat fasse en sorte d'agir pour l'émergence d'une concurrence loyale dans le secteur.

    Un souci que partagent aussi les grands fabricants de meubles du secteur public, pour qui l'importation anarchique constitue une véritable menace qui peut prendre de l'ampleur avec la prochaine entrée de l'Algérie à l'OMC.

    Par le Quotidien d'Oran

    Commentaire

    Chargement...
    X