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"L'administration Bush ne pourra pas attaquer l'Iran"

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  • "L'administration Bush ne pourra pas attaquer l'Iran"

    Ancien sous-secrétaire d'Etat et architecte des accords de Dayton sur la Bosnie, Richard Holbrooke, conseiller d'Hillary Clinton, a expliqué au Monde ce que sera sa diplomatie si la candidate démocrate est élue en novembre.

    Si Mme Clinton est élue, que ferez-vous de l'héritage de l'administration Bush ?
    En huit ans d'administration Bush, la lutte contre le terrorisme a tout conditionné, emmenant résolument les Etats-Unis dans la mauvaise direction. Notre défi, c'est assurer un leadership, mais sans hégémonie. Retrouver le bon cap n'est pas facile, c'est comme manœuvrer un supertanker, on ne peut lui imposer un virage brusque. Il faudra du temps et un consensus bipartisan. En tout cas, Mme Clinton fermera la prison de Guantanamo et reviendra sur certains aspects du Patriot Act qui régit les mesures antiterroristes sur le sol américain.

    La question irakienne sera déterminante pour l'élection, que soit désigné le sénateur McCain ou un autre républicain comme candidat face à Hillary Clinton ou Barack Obama, que j'admire beaucoup. Notre présence en Irak est une erreur, qui sera longue à réparer. Mme Clinton croit fortement qu'il n'existe pas de solution militaire mais seulement politique. Si elle est élue, elle commencera à retirer nos troupes de combat dans les 60 jours, une ou deux brigades par mois. Elle croit que cela mettra plus de pression sur les Irakiens pour les obliger à s'entendre. Je suis pour ma part en faveur d'une solution fédérale. L'Irak ne peut être gouverné de Bagdad, comme la France de Paris.

    Beaucoup de sunnites sont alliés avec vous contre Al-Qaida. Et à long terme?

    La situation des Américains là-bas ne s'est améliorée que lorsque les sunnites ont changé d'alliance. Je ne crois pas pour autant qu'ils soient devenus nos amis. Ils ont gouverné le pays 400 ans mais ne sont qu'une minorité, ils ne peuvent plus aspirer à diriger. Leur soutien est utile, mais pour combien de temps?

    Quelle sera votre attitude avec l'Iran ?

    Si un démocrate est élu, la politique changera. Nous chercherons à établir des discussions directes avec Téhéran. La France peut nous y aider, elle a un dialogue direct avec eux. L'administration Bush a suivi l'idée absurde selon laquelle on peut à la fois se battre en Irak et affronter l'Iran. C'est faux et c'est un désaccord majeur entre républicains et démocrates. Avec Téhéran, il ne faut pas seulement parler du nucléaire, mais du Hamas, du Hezbollah, de l'énergie et de l'Irak.

    Vos services de renseignement ont dit que l'Iran a cessé en 2003 ses recherches nucléaires militaires. Qu'est-ce que cela a changé ?

    C'est capital. C'était une vraie mutinerie de la part des services, qui ne voulaient pas être à nouveau instrumentalisés, comme ce fut le cas avec l'Irak. Une revanche ! Ce rapport qui a surpris tout le monde, le président le premier, a aidé la cause du monde entier : l'administration Bush ne pourra pas attaquer l'Iran. Une minorité peut encore s'y essayer mais elle ne réussira pas : nos chefs d'état-major s'y opposeront. Le Congrès aussi.

    Voyez-vous un espoir de règlement du conflit israélo-palestinien ?

    Pendant des années, Bush n'a rien fait. La conférence d'Annapolis, c'est trop peu et trop tard. L'administration Bush a commis une énorme erreur il y a deux ans en insistant pour que le Hamas participe aux élections, contre l'avis de Sharon et d'Abou Mazen. Maintenant, il y a deux autorités palestiniennes ! Or, la question centrale en Palestine n'était pas la démocratie mais la paix avec Israël. Je me suis battu toute ma vie pour la démocratie. Mais je pense que la priorité était d'établir un gouvernement à Ramallah capable de faire la paix. Y laisser entrer le Hamas l'a rendue impossible. Dans la région, entre la paix et la démocratie, je choisis la paix, sans hésiter.

    Y a-t-il une alternative au soutien inconditionnel donné à Pervez Musharraf ?

    Bush a eu raison de le soutenir après le 11-Septembre. Mais le président pakistanais n'a pas tenu les promesses faites à l'époque : instaurer la démocratie ; lutter contre les talibans à la frontière afghane ; gouverner en civil; assurer la protection de Benazir Bhutto. Il est faux de dire qu'il n'existe pas d'alternative à Musharraf. Il y en a toujours une.

    Que faire face au nationalisme de la Russie ? Et ce système de défense antimissile sur le sol européen, mal perçu par Moscou, était-il nécessaire ?

    Il n'y aura pas de nouvelle guerre froide. Ensuite, la grande coopération du temps de Boris Eltsine est finie. L'aspiration de la Russie à restaurer son influence est légitime. Mais elle doit changer d'attitude sur plusieurs points. Ce que les Russes ont fait de pire, c'est d'avoir rejeté le plan de règlement Ahtisaari sur le Kosovo. Ils ont poussé les Etats-Unis et l'Union européenne à constituer un front uni pour reconnaître son indépendance. Ils ont aussi tenté de renverser Mikheïl Saakachvili en Géorgie et se sont impliqués en Ukraine.
    Quant au système antimissile, je pense qu'il est mauvais et n'a pas prouvé son efficacité. La menace pour l'Europe, c'est le terrorisme, tel qu'il a frappé à Londres et Madrid. Les Iraniens ne vont pas envoyer de missiles contre la Pologne !

    Une victoire démocrate augurerait d'autres liens avec la France ?

    Une longue période de relations tendues s'achève. L'administration républicaine s'était obstinée dans cette idée folle, qu'il ne fallait pas parler à ceux qui n'étaient pas d'accord avec nous! Mais quand les Etats-Unis et la France sont unis, comme en Bosnie ou au Kosovo, de grandes choses deviennent possibles. C'est à nouveau le cas avec le président Sarkozy et Bernard Kouchner. On pourrait en voir les effets en Iran, en Afghanistan ou sur le changement climatique.

    Par le Monde
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