Maghreb: Concurrents ou complémentaires?
Entretien avec Abdelatif Maâzouz, ministre du Commerce extérieur
· Une banque maghrébine est prête
· Les exportations vers le Maghreb doivent croître dans les mois à venir
· Désarmer les obstacles un par un
En marge de la tenue de la deuxième édition du forumMaghreb Développement de l’investissement et des rencontres d’affaires des entreprises maghrébines (qui se tient aujourd’hui au Royal Mansour), Abdelatif Maâzouz, ministre du Commerce extérieur, dévoile les pistes sur lesquelles le gouvernement travaille pour accélérer les échanges entre les pays du Maghreb.
- L’Economiste: Que représente pour vous le forum Maghreb Développement?
- Abdelatif Maâzouz, ministre du Commerce extérieur: D’abord c’est une initiative. Une initiative qui provient des principaux concernés, soit les opérateurs économiques. Ils vont la défendre corps et âme car ils sont les mieux placés pour en ressentir le besoin.
Une opportunité de rencontre entre les hommes d’affaires. Au début entre la Tunisie et le Maroc lors du 1er forum, et maintenant entre les cinq pays du Maghreb. Cette opportunité se traduit aujourd’hui par des discussions entre clients et fournisseurs, mais aussi entre partenaires en matière d’investissement. La rencontre de Tunis a déjà connu des concrétisations de projets communs, notamment dans le secteur du textile habillement. Mais d’autres projets ont été également abordés, les contacts ont été cernés. Cette initiative a également la chance d’être appuyée par un groupe bancaire et financier (ndlr: Attijariwafa bank) qui a une présence dans les pays et qui a des ambitions de développement sur le Maghreb et sur l’Afrique. Cela veut dire qu’il y a un accompagnement financier qui, souvent, a été posé comme frein au développement des échanges et des investissements. En tout cas, pour cette fois-ci, on peut dire que ce frein a été levé d’avance.
- Quel est concrètement le plan d’action du gouvernement?
- Sur le plan juridique, le Maroc a été très actif, pour ne pas dire l’un des principaux initiateurs de l’accord de libre-échange entre les pays du Maghreb. Cet accord prévoit la libéralisation de tous les produits agricoles, agro-industriels et industriels entre les cinq pays. Il y a également entre le Maroc et chacun des pays des accords bilatéraux, qui permettent justement le libre-échange. Il y a eu la création du conseil d’hommes d’affaires maghrébins dont l’assemblée constitutive a eu lieu en 2007 à Marrakech et dont le siège se trouve actuellement à Tunis . Parallèlement, et pour être encore plus concret, il y a un travail qui se fait entre les différents pays pour l’harmonisation des politiques commerciales, en matière de normes, de procédures, de conditions tarifaires et non-tarifaires…
Également, il y a un travail en matière d’échange d’informations, de connaissances réciproques des marchés et de connaissance des législations et réglementations respectives.
De la coordination, aussi, dans le sens où les pays se mettent d’accord sur une base commune de négociation avec les partenaires, notamment européens. Et le premier maillon, c’est l’accord d’Agadir. Il y a eu la création d’une banque maghrébine pour le commerce et l’investissement. Le projet est ficelé. Cette banque doit voir le jour incessamment puisque tous les éléments sont réunis pour le démarrage de cette institution. Dernier point, encore plus concret par rapport à tout cela. Au Maroc, nous avons initié un travail, comme l’appelle les anglais de «fine twining». Il s’agit d’affinement des relations dans le sens où nous avons recensé l’ensemble des obstacles qui s’opposent au développement de nos échanges. Et nous avons commencé à résoudre ces dysfonctionnements un par un d’une manière très pragmatique en partant de ce qui a été vécu par les opérateurs.
Nous avons fait un saut de géant avec nos amis tunisiens en termes de démantèlement des obstacles procéduraux et d’incompréhension de part et d’autre. Les choses sont devenues plus fluides.
- Les opérateurs maghrébins sont-ils concurrents ou complémentaires?
- Nous sommes en train de montrer d’une manière pédagogique et avec des études approfondies qu’ils peuvent être concurrents, mais, dans leur concurrence, ils peuvent être complémentaires. Un produit peut être confectionné dans chacun des pays et avoir les mêmes conditions vis-à-vis du marché européen que s’il était fabriqué dans l’un de ces pays.
La complémentarité ressort également dans l’effet de masse. Le travail en commun permettra aux entreprises maghrébines de faire face aux grandes commandes des donneurs d’ordre européens.
Nous réfléchissons également à l’organisation de salons communs pour donner une dimension importante à ce type d’événement.
Voilà un peu les pistes sur lesquelles nous sommes en train de travailler d’une manière plus pragmatique en dehors des grands principes. Nous travaillons sur des choses très terre à terre de manière à donner aux relations commerciales maghrébines un souffle nouveau.
Accord d’Agadir: «Un labo»
«L’avantage principal de l’accord d’Agadir est d’être une sorte de laboratoire grandeur nature des échanges, non seulement maghrébins mais arabes», dit Maâzouz. L’accord a l’avantage de constituer un bloc de négociation avec les grands blocs économiques. «C’est un cadre de négociation avec l’UE qui d’ailleurs l’encourage dans ce sens», ajoute le ministre. Les Européens préfèrent traiter avec un groupe qu’avec avec des pays individuellement. La relation entre le Maroc et la Tunisie, par exemple, est régie par 3 accords différents: l’accord bilatéral, l’accord d’Agadir, et celui dans le cadre de la Ligue arabe, en plus du projet Maghreb qui n’est pas encore bouclé. «Les entreprises exportatrices se trouvent perdues devant cette panoplie de conventions», reconnaît Maâzouz. «Il faut unifier ces différents accords pour simplifier. Il faut avoir un socle commun qui sera élargi à des espaces.»
Propos recueillis par Saïd MABROUK
Entretien avec Abdelatif Maâzouz, ministre du Commerce extérieur
· Une banque maghrébine est prête
· Les exportations vers le Maghreb doivent croître dans les mois à venir
· Désarmer les obstacles un par un
En marge de la tenue de la deuxième édition du forumMaghreb Développement de l’investissement et des rencontres d’affaires des entreprises maghrébines (qui se tient aujourd’hui au Royal Mansour), Abdelatif Maâzouz, ministre du Commerce extérieur, dévoile les pistes sur lesquelles le gouvernement travaille pour accélérer les échanges entre les pays du Maghreb.
- L’Economiste: Que représente pour vous le forum Maghreb Développement?
- Abdelatif Maâzouz, ministre du Commerce extérieur: D’abord c’est une initiative. Une initiative qui provient des principaux concernés, soit les opérateurs économiques. Ils vont la défendre corps et âme car ils sont les mieux placés pour en ressentir le besoin.
Une opportunité de rencontre entre les hommes d’affaires. Au début entre la Tunisie et le Maroc lors du 1er forum, et maintenant entre les cinq pays du Maghreb. Cette opportunité se traduit aujourd’hui par des discussions entre clients et fournisseurs, mais aussi entre partenaires en matière d’investissement. La rencontre de Tunis a déjà connu des concrétisations de projets communs, notamment dans le secteur du textile habillement. Mais d’autres projets ont été également abordés, les contacts ont été cernés. Cette initiative a également la chance d’être appuyée par un groupe bancaire et financier (ndlr: Attijariwafa bank) qui a une présence dans les pays et qui a des ambitions de développement sur le Maghreb et sur l’Afrique. Cela veut dire qu’il y a un accompagnement financier qui, souvent, a été posé comme frein au développement des échanges et des investissements. En tout cas, pour cette fois-ci, on peut dire que ce frein a été levé d’avance.
- Quel est concrètement le plan d’action du gouvernement?
- Sur le plan juridique, le Maroc a été très actif, pour ne pas dire l’un des principaux initiateurs de l’accord de libre-échange entre les pays du Maghreb. Cet accord prévoit la libéralisation de tous les produits agricoles, agro-industriels et industriels entre les cinq pays. Il y a également entre le Maroc et chacun des pays des accords bilatéraux, qui permettent justement le libre-échange. Il y a eu la création du conseil d’hommes d’affaires maghrébins dont l’assemblée constitutive a eu lieu en 2007 à Marrakech et dont le siège se trouve actuellement à Tunis . Parallèlement, et pour être encore plus concret, il y a un travail qui se fait entre les différents pays pour l’harmonisation des politiques commerciales, en matière de normes, de procédures, de conditions tarifaires et non-tarifaires…
Également, il y a un travail en matière d’échange d’informations, de connaissances réciproques des marchés et de connaissance des législations et réglementations respectives.
De la coordination, aussi, dans le sens où les pays se mettent d’accord sur une base commune de négociation avec les partenaires, notamment européens. Et le premier maillon, c’est l’accord d’Agadir. Il y a eu la création d’une banque maghrébine pour le commerce et l’investissement. Le projet est ficelé. Cette banque doit voir le jour incessamment puisque tous les éléments sont réunis pour le démarrage de cette institution. Dernier point, encore plus concret par rapport à tout cela. Au Maroc, nous avons initié un travail, comme l’appelle les anglais de «fine twining». Il s’agit d’affinement des relations dans le sens où nous avons recensé l’ensemble des obstacles qui s’opposent au développement de nos échanges. Et nous avons commencé à résoudre ces dysfonctionnements un par un d’une manière très pragmatique en partant de ce qui a été vécu par les opérateurs.
Nous avons fait un saut de géant avec nos amis tunisiens en termes de démantèlement des obstacles procéduraux et d’incompréhension de part et d’autre. Les choses sont devenues plus fluides.
- Les opérateurs maghrébins sont-ils concurrents ou complémentaires?
- Nous sommes en train de montrer d’une manière pédagogique et avec des études approfondies qu’ils peuvent être concurrents, mais, dans leur concurrence, ils peuvent être complémentaires. Un produit peut être confectionné dans chacun des pays et avoir les mêmes conditions vis-à-vis du marché européen que s’il était fabriqué dans l’un de ces pays.
La complémentarité ressort également dans l’effet de masse. Le travail en commun permettra aux entreprises maghrébines de faire face aux grandes commandes des donneurs d’ordre européens.
Nous réfléchissons également à l’organisation de salons communs pour donner une dimension importante à ce type d’événement.
Voilà un peu les pistes sur lesquelles nous sommes en train de travailler d’une manière plus pragmatique en dehors des grands principes. Nous travaillons sur des choses très terre à terre de manière à donner aux relations commerciales maghrébines un souffle nouveau.
Accord d’Agadir: «Un labo»
«L’avantage principal de l’accord d’Agadir est d’être une sorte de laboratoire grandeur nature des échanges, non seulement maghrébins mais arabes», dit Maâzouz. L’accord a l’avantage de constituer un bloc de négociation avec les grands blocs économiques. «C’est un cadre de négociation avec l’UE qui d’ailleurs l’encourage dans ce sens», ajoute le ministre. Les Européens préfèrent traiter avec un groupe qu’avec avec des pays individuellement. La relation entre le Maroc et la Tunisie, par exemple, est régie par 3 accords différents: l’accord bilatéral, l’accord d’Agadir, et celui dans le cadre de la Ligue arabe, en plus du projet Maghreb qui n’est pas encore bouclé. «Les entreprises exportatrices se trouvent perdues devant cette panoplie de conventions», reconnaît Maâzouz. «Il faut unifier ces différents accords pour simplifier. Il faut avoir un socle commun qui sera élargi à des espaces.»
Propos recueillis par Saïd MABROUK
Commentaire