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Le village où les enfants meurent de froid.

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  • Le village où les enfants meurent de froid.

    mercredi 13 février 2008

    A Angfou, village du Moyen-Atlas marocain, on meurt encore de froid et de malnutrition : vingt-sept décès lors de l’hiver 2006, trois en 2007. Dont une majorité d’enfants. Reportage.
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    Angfou est un petit village marocain du Moyen-Atlas de 4 500 âmes qui vivent chichement de l’élevage de brebis. Pour s’y rendre, c’est le parcours du combattant : il faut rallier le bourg de Khenifra, traverser la petite commune rurale d’Anmezi Tounfit et enfin trouver un 4x4 pour parcourir les 70 kilomètres de piste restants. Et encore faut-il croiser les doigts pour que la neige ne bloque pas la route. En hiver, les températures flirtent avec les -10°C et il peut tomber jusqu’à 1,50 mètre de neige.

    Lorsque c’est le cas, Angfou se retrouve coupé du reste du monde. Les villageois n’ont d’autre choix que d’attendre la fonte des neiges. Dès qu’un camion ou une Jeep pointe son nez, toute la population, vêtue de djellabas, accourt, espérant une quelconque aide. Couvertures, vivres, médicaments, produits de première nécessité… L’hiver, on manque de tout à Angfou et la malnutrition fait des ravages. Pour ne rien arranger, dès que la route est coupée, la spéculation bat son plein, faisant tripler le prix des petites bonbonnes de gaz.
    A l’hiver 2006, Angfou a défrayé la chronique au Maroc. Vingt-sept de ses habitants, dont une majorité de femmes et d’enfants, sont morts. Officiellement de froid et de malnutrition. Des militants associatifs locaux évoquent une épidémie et parlent d’un mystérieux rhume s’accompagnant d’une toux aigüe et de diarrhée dont souffraient les enfants lors de leur décès. Mais aucune confirmation médicale n’est venue étayer cette thèse. « Ils nous ont promis monts et merveilles »

    Par contre, l’énorme scandale médiatique qui a suivi a poussé les autorités à sortir de leur torpeur. La conseillère du Roi Zoulikha Nasri, le général Hosni Benslimane, patron de la Gendarmerie royale, les ministres de la Santé et de l’Intérieur ont été dépêchés sur place en hélicoptère. Tous ont promis de désenclaver le village et, tant qu’on y est, la région. On est loin du compte. « Il n’y a aucune différence entre l’année dernière et cette année. La route n’a pas été construite. Début janvier, la neige est tombée abondamment, isolant des centaines de familles » s’indigne Aziz Akkaoui, secrétaire de la section de l’Association marocaine des droits humains (AMDH) dans la province de Khenifra. « En 2006, nous avons vu défiler un cortège de ministres. Ils nous ont promis monts et merveilles. Les projets restent couchés sur le papier alors que la réalité des habitants est catastrophique » renchérit M. Attaoui, un autre militant associatif. Les habitants d’Angfou, eux, ne se font plus d’illusions : « nous n’avons ni routes, ni réseau téléphonique. On vit au jour le jour » lance en langue berbère un quadragénaire. Comme pour confirmer ces dires, trois enfants sont encore morts en janvier dernier.
    Les enfants au rapport

    Les enfants marocains, principales victimes du coup de froid d’Angfou l’hiver dernier, sont de loin les plus mal lotis du Maghreb et même du monde arabe. Et ce ne sont pas des ennemis du royaume enchanté qui l’affirment mais la Banque Mondiale et l’Unicef, dans deux rapports publiés en février 2008.

    Ainsi, l’étude de la Banque Mondiale consacrée aux systèmes éducatifs au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, classe le Maroc à la 126è place. Au même niveau que Djibouti, le Yémen et que l’Irak. Rien que cela ! L’Unicef, elle, dans un rapport sur la situation des enfants au royaume enchanté, manie la carotte et le bâton. Si des progrès ont bien été accomplis au niveau de la loi (réformes du Code de la famille, du Code du travail…), la mortalité infantile a augmenté en cinq ans. Ainsi, 5 enfants sur 100 meurent encore avant l’âge de 5 ans.

    Adil Bouhouche.
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