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Boussaâda : La ville de Samson et Dalila.

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  • Boussaâda : La ville de Samson et Dalila.

    Boussaâda est une cité en quête de bonheur. Comme les autres villes du pays, elle est frappée de plein fouet par les crises du logement et de l’emploi.

    Nous quittons Alger en direction de Boussaâda à partir de la zone industrielle de Oued Smar où foisonnent les concessionnaires. Au carrefour menant vers l’aéroport international Houari-Boumediene, des gendarmes nous arrêtent un moment pour un contrôle d’usage. Un agent en uniforme nous demande: «Allez-vous à l’aéroport?» Nous répondons par la négative. La question du gendarme nous rappelle, en fait, l’annonce en «Une», par la presse nationale, de la découverte récente à l’aéroport d’un lot d’armes par la police des frontières.

    A la sortie de Dar El Beïda, nous apercevons la future surface de Volvo, le numéro 3 des engins des travaux publics après Caterpillar et Comatsu. La future affaire du Suédois couvre quelque 12.800m², et sera opérationnelle au mois de mai prochain. Cette dernière abritera uniquement la gamme d’engins de travaux publics, dont les chargeurs, gros dumpers et autres compacteurs, apparemment appelés à servir dans le grand projet de l’autoroute Est-Ouest ou encore celui de la construction du fameux million de logements. La journée s’annonce ensoleillée, alors que nous roulons à bord d’un bus privé vers le Sud. Dans ce bus, tout le confort souhaité est offert aux quelques journalistes conviés à l’expédition. Eau minérale, encas et café sont servis tandis qu’une vidéo passe un film d’action.

    Sur la route, un confrère évoque avec force détails son récent voyage à Lyon où le constructeur français Peugeot présentait à la presse spécialisée son nouvel utilitaire, le Bipper. Alors que nous brûlons les kilomètres, la circulation, en ce mardi matin, est fluide et aucun bouchon n’est perceptible à l’horizon. Quatre heures de route nous séparent encore de la ville du Sud, capitale du Hammel. A bâtons rompus, les journalistes discutent. Du débat jaillit une constatation évidente: la concurrence entre concessionnaires sera âpre cette année, d’autant que les différentes marques rivaliseront par le lancement de nombreux projets. D’ores et déjà, nombre de concessionnaires veulent jouer sur la garantie offerte aux clients. Certains évoquent déjà une garantie de deux ans, kilométrage illimité, alors que d’autres ont déjà offert les 3 ans de garantie pour 60.000km.

    De vastes plaines s’offrent au regard


    Dans cette émulation, les Asiatiques jurent d’arracher des parts de marché aux groupes automobiles français, essentiellement Renault, qui a détenu le leadership en 2007. Néanmoins, une constatation s’impose: le prix des véhicules en Algérie est surenchéri par les taxes douanières qui atteignent les 30% pour les motorisations 2.0 et près de 15% pour les 1.6, alors que le «problème du carburant pénalise de plus en plus les motorisations diesel», relève-t-on. A la sortie de Boudouaou, notre progression est quelque peu ralentie par des poids lourds qui occupent ostensiblement le couloir de gauche. Alors qu’en sens inverse, un important flux de véhicules se déverse sur la capitale.

    Dans le sillage de leur conversation, les journalistes évoquent le dernier Salon automobile de Détroit qui a eu lieu entre le 14 et le 21 janvier. L’événement en est à sa 100e édition depuis son lancement, en 1907, au Michigan. Un Salon où des modèles asiatiques sont désormais présentés. Nous franchissons enfin l’embouchure de l’axe menant à Bouira.

    A Beni Amrane, un barrage fixe de gendarmerie ralentit la circulation, il est mitoyen au centre de contrôle technique automobile qui semble respirer après le dernier rush observé à l’échelle nationale sur l’expertise technique des véhicules. Au bas de la chaussée, une infrastructure hydraulique est généreusement emplie d’eau. A telle enseigne que les arbres sont presque engloutis. Nous ne tardons pas à gagner les gorges de Lakhdaria. Un mirador jouxte la route, immédiatement avant le tunnel qui fend la majestueuse montagne.

    A cet endroit, un commerce lucratif de cailles semble faire le bonheur des voyageurs et des jeunes gens qui s’y adonnent. Plus loin, à Aïn Turc, nous apercevons le majestueux viaduc, oeuvrage pharaonique en Afrique et minutieusement suivi par le ministre des Travaux publics, Amar Ghoul. A certains endroits du nouvel axe autoroutier sont exposées des figues sèches et de l’huile d’olive artisanalement conditionnée dans des bouteilles en plastique, à longueur de journée au soleil. Après avoir parcouru une vingtaine de kilomètres, nous bifurquons à droite, vers Aïn Bessem et donnons dos au majestueux Tikjda.

    De vastes plaines s’étendent devant nous et donnent l’impression de couver jalousement la belle et paisible cité qu’est la ville natale de Lakhdar Brahimi, Aïn Bessem, qui garde encore intact son cachet colonial. Mais nous devons d’abord passer par Aïn Lahdjar et Saïd Abid, des localités jadis affectées par la tourmente des années difficiles. Dans ces zones quasi rurales, le cachet agricole prime et des vétérinaires ont pignon sur rue, ce qui dénote l’importance de l’activité de l’élevage. Sur d’anciens mâts coloniaux et autres poteaux électriques, des cigognes ont déjà élu domicile et annoncent l’arrivée de la belle saison. Parmi les autres signes avant-coureurs du printemps, des amandiers déjà en fleurs...en janvier.

    Dans certains champs, des tracteurs labourent la terre fraîche. Nous n’avons pas le privilège de nous attarder dans Aïn Bessem et prenons la tangente dans le sens de Boussaâda. L’axe El Hachimia-Oued Lakhal est couronné par un barrage rempli d’eau, signe d’une bonne irrigation des terres. El Hachimia, village agropastoral à l’origine, donne néanmoins l’impression de vouloir s’arrimer à la modernité avec ses quelques boutiques de téléphones portables et quelques rares cybercafés. Vu de l’extérieur, le centre culturel semble désert. A l’entrée de Sour El Ghozlane, l’usine de détergents est en activité et fait face à l’unité de production de ciment. Ces deux entités industrielles contrastent avec le paysage verdoyant ambiant. 114 kilomètres nous séparent de Boussaâda. Nous songeons à effectuer une escale au prochain relais routier. Nous ne tardons pas à gagner Sidi Aïssa et l’opulence de ses commerces. Enfin, apparaît au loin, la reine de l’Atlas, Boussaâda.


    à suivre ......
    “La vérité est rarement enterrée, elle est juste embusquée derrière des voiles de pudeur, de douleur, ou d’indifférence; encore faut-il que l’on désire passionnément écarter ces voiles” Amin Maalouf

  • #2
    Suite et fin.


    La Peugeot 203 circule toujours


    A l’entrée de cette dernière, de vieilles Peugeot 404 et autres 203 circulent encore. Elles semblent être préservées comme un précieux legs. Ici, l’automobile côtoie le cheptel ovin qui est à la recherche de l’herbe rare. Le modernisme pointe du nez aux portes de la cité défigurée par une architecture malencontreusement calquée sur les constructions froides du Nord.

    Dans la ville d’Etienne Dinet, notre première escale est l’hôtel Kardada (anciennement Transat), un établissement hôtelier réalisé au début du XXe siècle. Le 25 décembre 1913, il fut inauguré sous l’appellation «Le Petit Sahara» par Billy Victor probablement descendant de la famille de Jean Sylvain Bailly (1736-1793), un des plus grands astronomes du XVIIe siècle et aussi un grand homme politique français, président de l’Assemblée constituante en 1789, et ensuite maire de Paris.

    En 1925, cet hôtel fut vendu à la compagnie générale «Transatlantique», puis acquis en 1995 par El Djazaïr anciennement «Saint Georges» sous l’appellation de Transat. Et depuis juin 2005, il fut inauguré et rebaptisé Hôtel Kardada, la première unité affiliée à l’EGH El Djazaïr. L’hôtel s’avère être un havre de paix, baigné d’une lumière naturelle. Il offre, en outre, une agréable atmosphère de détente. En dépit de la beauté du site où il est implanté et de la qualité de ses prestations, l’affluence touristique y demeure encore dérisoire, comme tient à le préciser son directeur.

    Les chambres de l’aile sud de cet hôtel donnent sur le «Moulin Ferrero», un lieu pittoresque, à quelque 2km de Boussaâda. Ce moulin qui n’est plus qu’un vestige, a été construit sur un cours d’eau escarpé du plus heureux effet; une eau fraîche y coule hiver comme été. L’oued est entouré de jardins dont beaucoup servent à l’exploitation de cultures maraîchères. Jadis, ces jardins faisaient office de lieu idéal de repos, emplis qu’ils étaient de violettes et d’ arbres de toute essence. C’est dans ce lieu paradisiaque que les cinéastes américains et français vinrent tourner des scènes de Samson et Dalila, un film géant de Cécile B. de Mille, avec les célèbres acteurs Hedy Lamar et Angela Lansbury.

    Après un repas reconstituant, nous gagnons Djebel Messaâd, un massif rocailleux entrecoupé de profondes vallées. Nous y parvenons après une ascension qui aura duré près d’une vingtaine de minutes; nous y sommes accueillis par la troupe folklorique Essaâda, déléguée par l’Office culturel de la région. Elle nous gratifie d’une danse naïlie. De jeunes femmes parées de rose et de blanc entament une danse ancestrale accompagnée de la zorna.

    Les bijoux rehaussent leur charme naturel

    Leurs bijoux d’argent et les colliers d’ambre qu’elles portent rehaussent leur charme naturel. Ces filles, au visage discrètement maquillé de khol et les lèvres colorées d’écorce de noix, sont encadrées par des cavaliers, à l’allure virile, sabre à la main. Après un court intermède fuse un chant mélodieux, qu’accompagnent les sons d’une flûte bédouine. Notre devoir de reporters inquisiteurs nous dicte néanmoins de nous mêler à la foule environnante. Nous apprenons alors que cette localité, à l’instar de la commune de Aïn Gh’rab, Aïn El Melh et celle d’El Hammel, connaissent de réels problèmes: le chômage et la crise du logement.

    Ici, et selon les jeunes hommes que nous avons pu approcher, le vide culturel et le manque de loisirs sont patents. Nos interlocuteurs n’hésitent pas alors à pointer du doigt le manque de soutien des autorités à l’artisanat et à l’agriculture. Ils invoquent l’absence de forages, parfois de l’électricité. Ces personnes avancent que le sud de M’Sila est livré à son sort. Et de poursuivre: «Nous sommes victimes du régionalisme» tout en signalant certains «facteurs tribaux et régionaux qui déterminent la destination de toute manne financière.»

    Remarquant nos préparatifs du départ, nos hôtes nous convient à un rituel obligé: la cérémonie du thé. Ce dernier a lieu à l’abri d’une tente soutenue par des piquets, et dressée suffisamment haut pour que les personnes se tiennent debout et à l’aise. En l’honneur des convives, des macroutes au miel sont servis et le thé est consommé en présence des autorités locales qui sont là comme pour rassurer les présents que le spectre du terrorisme est évacué de longue date.

    Le crépuscule drape déjà les lieux et nous songeons à regagner l’hôtel. Plus qu’une nuit et nous rentrerons sur Alger. Nous quitterons alors cette porte du Sud qu’est Boussaâda, cette ville qui tente, tant bien que mal, de préserver ses valeurs traditionnelles. Loin du vacarme des villes et de leurs servitudes, nous avons découvert une population qui aspire au bonheur. L’exemple en est donné par cet investisseur local que nous avons côtoyé durant notre court séjour et qui a choisi d’embrasser le créneau du commerce automobile, au demeurant en plein boom dans notre pays. Les véhicules sont importés de chez un constructeur du pays du Matin calme.

    De notre envoyé spécial Salim BENALIA
    L'Expression du 25 Fév 2008.
    “La vérité est rarement enterrée, elle est juste embusquée derrière des voiles de pudeur, de douleur, ou d’indifférence; encore faut-il que l’on désire passionnément écarter ces voiles” Amin Maalouf

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