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Des réserves de change de 120 milliards de dollars pour l'Algérie, et après?

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  • Des réserves de change de 120 milliards de dollars pour l'Algérie, et après?

    120 milliards de dollars, et après?


    Se moque-t-on des Algériens? On n’a pas fini de tirer des plans sur la comète. Nos meilleurs experts et analystes ont beau plancher sur l’Algérie de 2025, il y a loin de la coupe aux lèvres. A la vitesse où progresse, chaque année, la courbe démographique, nous friserons certainement la cinquantaine de millions, d’ici cette échéance. L’espérance de vie va aussi augmenter. La mortalité infantile baissera. La bonne nouvelle, c’est que les Algériens, qui seront plus nombreux, se porteront mieux. Et inévitablement, les deux courbes vont finir par se croiser. Et c’est là qu’il y a danger, parce que le malthusianisme nous guette. Les économistes du monde entier connaissent bien cette théorie. Ils la redoutent. Pour les hommes politiques, ceux qui sont aux manettes, qui nous dirigent, cette option malthusienne, quand elle s’impose, ne vous inflige pas seulement de passer sous les fourches caudines du FMI, elle vous terrasse. C’est la peste noire des gouvernants. Elle fait chanceler les trônes des dirigeants les mieux assis de la planète. Question lancinante: comment nourrir des millions de bouches dans un pays en pleine expansion démographique, pendant que la croissance économique stagne ou régresse? Que faisons-nous pour parer à cette catastrophe annoncée avec tout ce qu’elle peut induire de graves conséquences sur notre mode de vie, mais aussi sur la «santé politique» de l’Algérie? Eh bien! rien.
    Pendant que nos coffres-forts sont bourrés de milliards de dollars grâce à un baril de pétrole qui frôle les 110 dollars, l’économie nationale est paraplégique. Nous n’exportons pratiquement pas grand-chose en dehors des hydrocarbures. Mais, en revanche, sur le plan alimentaire, nous dépendons gaillardement de l’étranger. Ce n’est pas un scoop. Nous le savons. Mais pendant ce temps, que faisons-nous? Nos gouvernants, ceux qui nous dirigent, eux, ne voient rien venir. Ces apôtres de la politique de l’autruche ne continuent-ils pas de mentir avec effronterie aux Algériens lorsqu’ils leur annoncent, pleins d’assurance, que l’Algérie sera, par exemple en 2015, l’une des destinations touristiques favorites dans le monde. On ne nous dit pas comment allons-nous atteindre ce cap qui relève du mirage dans le pays où le désert est roi. Le tourisme, tous les tours opérators vous le diront, est l’option de l’avenir. Soit. Mais combien d’hôtels, de motels, allons-nous construire dans les cinq prochaines années à Ghardaïa, à Timimoun, à Djanet et à Tamanrasset, et avec quelles capacités en lits pour accueillir ces premiers contingents d’étrangers, férus de l’aventure du désert sur les terres de Tin Hinan? A eux seuls, les «hommes bleus», ces Touareg qui ne doivent pas être réduits à vivre parqués dans des «réserves indiennes», sont un produit de marketing exceptionnel. Quelle image! Elle ne demande qu’à être vendue.
    C’est un vrai purgatoire qui nous attend pour les quinze prochaines années. Ceux qui nous promettent monts et merveilles savent qu’ils ne seront plus au pouvoir d’ici là, même de ce monde. Les promesses n’ont jamais la vie longue. Et l’amnésie a toujours été le lexomyl de la mémoire collective des peuples. Faut-il le rappeler, le désert représente 80% de la superficie du territoire algérien. En termes clairs, il y aura donc près de 50 millions d’Algériens qui cohabiteront, au Nord, dans une bande n’excédant pas 460.000km². Cette population va rogner sur des terres agricoles qui, lorsqu’elles ne sont pas improductives, ne satisferont guère les besoins alimentaires du pays. Si nous n’avons pas de plan de développement réel déjà pour cette partie viable de l’Algérie, quel esprit de conquête nous inciterait, dès lors, à imaginer, à bâtir des villes nouvelles dans le Sud, à cultiver des céréales sur ces immensités désertiques, comme l’a fait l’Arabie Saoudite sur la bande de la mer Rouge, à faire pousser sur des arpents de sable des jardins d’Eden. Sous Boumediène, on avait tenté une expérience de ce genre à Ouargla, dans une localité qui s’appelle les Trois Pythons. L’eau forée à plus de 1500 mètres circulait sur des séguias artisanales pour assurer son refroidissement avant son utilisation pour les jardins potagers dans lesquels poussaient des tomates, des oignons et des piments. Son sous-sol est gorgé d’eau. Pour preuve, Bouteflika a bien inauguré, lors de sa récente visite dans cette région, une importante station de pompage.
    Les déserts recèlent des richesses inouïes. Combien de grandes villes américaines ont surgi des sables aux Etats-Unis? Dans les pays du Golfe, l’existence de capitales comme Riyadh, Abou Dhabi ou Koweït, ne relève point du miracle divin. Mais de la volonté de l’Homme.
    Au moins, une dizaine de villes du Sud algérien, si le pouvoir pensait à les développer, se transformeraient en formidables pôles économiques capables de créer la vraie synergie dont l’Algérie a besoin pour les générations futures. Jusqu’à quand allons-nous accepter qu’il y ait dans ce pays 2.000.000km² de désert inexploité? Imaginons que la wilaya de Tamanrasset a la même superficie -500.000km² - que la France, mais qui reste inexploitée et les richesses inexportées. Jusqu’à quand détournerons-nous les yeux de ce plus beau désert du monde, dont nous pompons sans arrêt, avec ingratitude, le pétrole et le gaz qui nous font vivre en gigolos ou super rentiers, sans que l’on soit persuadé que tout a une fin?
    Les hydrocarbures comprises. Le Sud peut créer une vraie attraction pour les Nordistes que nous sommes. C’est maintenant qu’il faut songer à son décollage économique. Pas avec des mots. Ni avec un plan qui pèche par un manque d’envergure flagrant, comme celui adopté par le gouvernement depuis quatre ans. C’est en se rendant sur nos champs pétroliers que les étrangers de nombreuses nationalités découvrent ce Sud mirifique et sont interloqués que nous n’ayons encore rien fait pour le rendre plus attrayant à tous ces jeunes Algériens, candidats harragas à la recherche d’un nouveau paradis qui est pourtant là, à portée de main.
    L’aspiration à la justice sociale et à l’innovation, si le gouvernement s’en prévaut à longueur de journée dans ses médias publics, ne saurait occulter le Sud. Il faudra désormais bouger, créer et en finir avec cette vision misérabiliste que nous en avons. Le temps nous est compté. Et si nous ne savons pas comment faire pousser du blé dans ces contrées, n’ayons pas honte de demander aux Américains et aux Saoudiens quels sont les procédés et les techniques en agronomie qui permettent au désert, comme toute terre aride, de donner à manger aux hommes quand ils ont faim et à boire quand ils ont soif. La tomate d’Adrar, qu’on transforme en concentré, n’a jamais été une lubie. Elle a bien existé. Et à elle seule, son histoire prouve que le défi est à la mesure de l’Homme. Et puis notre désert est tellement immense et riche qu’il peut «accueillir» toute la misère du monde. Et à quoi pourraient bien nous servir ces 120 milliards de dollars quand des Algériens en sont injustement privés pour les investir dans des PMI-PME au Nord, quand des jeunes se jettent par désespoir dans les vagues houleuses de la Méditerranée, si ce n’est pour rêver de voir un nouveau monde surgir sous nos pieds. Celui du Sud. Précisément, celui d’où nous proviennent ces 120 milliards de dollars. C’est peut-être ça qu’on appelle communément, chez nous, de la fiction.

    Ahmed FATTANI

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