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Sarkozy face au message des urnes: la tentation de l'autruche

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  • Sarkozy face au message des urnes: la tentation de l'autruche

    Le genre de veste électorale que vient de prendre l'UMP se produit généralement à mi-parcours d'une législature. Le fait qu'elle se produise dix mois seulement après une élection aussi confortable constitue d'abord et avant tout un échec personnel de Nicolas Sarkozy. Sur ce point, tout le monde, même à droite, en conviendra. La seule chose qui fasse débat, c'est quelles conséquences le président devrait tirer du message des électeurs, surtout de ceux qui ont déserté aussi vite le camp de la majorité présidentielle.

    Il était assez irréel de voir dimanche soir, comme au premier tour, le premier ministre, François Fillon, intervenir de manière solennelle pour commenter le résultat du scrutin. On imagine les discussions sans fin entre communicants pour savoir qui du populaire Fillon, ou de l'impopulaire Sarkozy, devait prendre la parole. Il a dû en coûter à Nicolas Sarkozy d'être ainsi privé du pouvoir de la parole, dont il a usé et abusé pendant les dix premiers mois de son mandat présidentiel.

    Et maintenant? Techniquement, évidemment, François Fillon avait raison de souligner que les orientations de la France ont été décidées à la présidentielle et aux législatives de l'an dernier. Mais l'affaire n'est pas technique, elle est politique.

    Nicolas Sarkozy a désormais une longue période devant lui sans rendez-vous électoral. Qu'en fera-t-il?

    1/ Une présidence en mode mineur

    Les premiers ajustements sont évidemment de forme. Nicolas Sarkozy a changé! Il est devenu charmant (son sourire à l'infirmière qui refusait de lui serrer la main, huit jours après le "casse-toi pauv'con" du salon de l'agriculture...), serein (il se rend mardi sur le plateau des Glières, sa retraite de "Solutré" à la Mitterrand, disent les communicants...), presque invisible, presque "présidentiel". Certains disent même qu'il est déjà devenu "chiraquien", ce qui, à ses yeux, ne serait pas un compliment.

    Même volonté de changer la forme avec les ajustements de l'entourage présidentiel. Exit David Martinon, l'ex-futur Maire de Neuilly, qui ira se consoler comme Consul général à New York (pas la Sibérie tout de même), exit peut-être Emmanuelle Mignon ("les sectes c'est pas un problème"), et un silence imposé à Henri Guaino, affaibli par l'affaire de son plan méditerranéen et des prises de parole qui avaient irrité jusqu'à l'UMP.

    Mais l'enjeu n'est évidemment pas là, ces changements là n'auront aucun impact populaire. Nicolas Sarkozy a deux leviers sur lesquels jouer, la composition du gouvernement, et la politique suivie.

    2/ Un remaniement ambigu

    Nicolas Sarkozy a annoncé qu'il n'y aurait pas de "grand remaniement", et François Fillon a enfoncé le clou en lui signifiant un refus clair et net de modifier en profondeur son équipe. Pour autant, il y aura des changements, un "remaniement technique" selon l'expression de Claude Guéant. "technique", mais avec l'ombre de Claude Allègre qui plane depuis quelques semaines au-dessus du gouvernement.

    L'entrée au gouvernement, à un super ministère de la recherche, de l'ancien ministre de l'éducation socialiste, lancerait un signal ambigu. L'homme qui minimise les changements climatiques dans le gouvernement qui a réussi l'exercice du Grenelle de l'environnement? De quoi faire frémir ceux qui, y compris au sein de l'UMP, considèrent que le Grenelle fut l'une des rares vraies réussites de la courte ère Sarkozy. Quel bénéfice politique Nicolas Sarkozy pourra-t-il tirer d'une annonce qui brouille plus encore les pistes? Ce n'est pas la voie de la reconquête pour le président.

    3/ Quelle politique après les municipales?

    A écouter François Fillon et les ténors de la majorité sur les plateaux de télévision, il n'y aura pas de changement de cap. On s'y attendait, évidemment. Mais l'UMP peut-elle réellement croire que ce vote a simpement manifesté l'"impatience"" des électeurs face à des réformes qui tardent à porter leurs fruits? Le discours des membres du gouvernement disant que les réformes sont engagées depuis trop peu de temps pour être perceptibles ne convainc personne.

    Le mot "réforme" dans toutes les bouches, a perdu sa crédibilité en ces temps troublés. Ce qui intéresse les Français, par les temps qui courent, c'est de savoir si oui ou non un nouveau tour de vis va être pris par le gouvernement pour faire face à une croissance plus molle que prévu, si on continuera à grignoter petit à petit le modèle social français à coups de franchises médicales et de précarisation accrue, et si le gouvernement a une stratégie face à un climat international de plus en plus hostile.

    Au bout du compte, c'est de crédibilité qu'il s'agit. Nicolas Sarkozy a très vite épuisé le crédit qu'il avait gagné dans les urnes le 6 mai. Les électeurs du 16 mars le lui ont signifié sans ambiguïtés. Si le président de la République en tirait la conclusion que quelques ajustements de son style personnel suffiraient à redorer son blason sans rien changer à la politique suivie, voir au contraire adopter des mesures de rigueur qui ne diraient pas leur nom, il courrait le risque d'un échec plus grave encore. La politique de l'autruche ne peut pas être une réponse à une claque électorale.

    Pierre Haski
    The truth is incontrovertible, malice may attack it, ignorance may deride it, but in the end; there it is.” Winston Churchill
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