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Comment a-t-on pu en arriver là ?

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  • Comment a-t-on pu en arriver là ?

    Comment a-t-on pu accorder une confiance aussi aveugle dans des acteurs financiers qui ont manifestement pillé outrageusement le système économique auquel nous appartenons tous ? Comment a-t-on pu aller aussi loin dans l’incongruité sans qu’aucune autorité écoutée et respectée ne siffle la fin de la récréation ? Surmenage ? Défaut d’analyse ? Défaut de formation ? Aveuglement ? Irresponsabilité ? Incompétence ?

    Il était une fois le moins pire des systèmes économiques qui était censé apporter « aux moins bien lotis d’une société (capitaliste) une situation meilleure que si elle n’avait pas existé », dixit le père fondateur du libéralisme, à savoir John Locke au XVIIe siècle.
    Le constat aujourd’hui est amer car il semblerait que « les moins bien lotis » le soient à terme « encore bien moins ». Je parle dans un avenir immédiat de ces Américains classés « subprimes » et dans un avenir proche à nous-mêmes. Car, ne nous faisons aucune illusion, le nuage de la crise de défiance économique, financière et bancaire américaine ne s’arrêtera pas à nos jolies petites frontières françaises.

    Deux faits ce week-end sont édifiants pour ceux qui veulent bien se donner la peine...

    Un fait : « A court de liquidités et proche de la banqueroute, la banque d’affaires Bear Stearns, cinquième banque d’investissement des Etats-Unis, a été rachetée, dimanche 16 mars 2008, par sa concurrente JP Morgan Chase pour un montant de 236 millions de dollars, une somme jugée dérisoire et en dessous du prix du marché par les analystes. En effet, selon les conditions de l’offre, JP Morgan échangera 0,005473 action contre une action Bear Stearns, ce qui évalue cette dernière à 2 dollars seulement, contre un cours de clôture, vendredi soir à Wall Street, de 30,85 dollars. »

    Un autre fait : « Le 17 mars 2008, après un conseil d’administration fleuve de quinze heures achevé dans la nuit de samedi à dimanche, Alitalia, détenue à 49,9 % par l’Etat italien, a accepté à l’unanimité l’offre d’Air France-KLM. Menacée de faillite dès la mi-2008, la compagnie n’avait pas d’alternative. Elle a dû approuver une offre financière plus basse que prévu, de moins de 10 centimes d’euros par action, contre un dernier cours de 0,53 euro vendredi. Air France-KLM propose une de ses actions en échange de 160 actions Alitalia, ce qui valorise la compagnie italienne à moins de 140 millions d’euros. »

    Et personne n’élève la voix en dénonçant le rôle dévolu à un marché financier dans la valorisation d’un actif par la confrontation de l’offre et de la demande (du moins, le concept nous avait été vendu comme tel.) Car voyez-vous, alors que les informations négatives concernant les sociétés citées étaient connues de tous le vendredi, la valorisation de ces entreprises s’est écroulée de 93,5 % pour la première et de 81,1 % pour la seconde comme par enchantement au cours du week-end.

    Il n’est pas question de critiquer ces offres car un actif ne vaut que par ce que l’on veut bien le payer. Qu’il y ait une prime de « grossiste de 15 à 20 % » pour quelqu’un qui achète l’ensemble, pourquoi pas ? Mais que cette prime soit aussi importante signe l’inefficacité de notre système financier et boursier pour évaluer « en toute transparence » ce que vaut vraiment un actif ! Et je n’évoque pas les spoliations que de telles offres feront subir aux actionnaires directs et indirects (possesseurs d’OPCVM investis dans ces titres) ! Car même dans un climat de défiance totale, les autorités de tutelles ne peuvent prôner l’instauration de la confiance et se défendre de toute action.

    Comment est-ce possible qu’aucun journaliste spécialisé ou économiste ou financier ou banquier ou expert de renom qui possède un peu de jugeote ne s’en soit pas offusqué haut et fort ? Parce que voyez-vous si JP Morgan pense que Bear Stearns vaut 2 dollars par bout et si Air France pense qu’Alitalia vaut 10 cents d’euro par bout, alors c’en est fini de notre système capitaliste et du rôle de la bourse dans la juste évaluation de nos actifs financiers. Et l’on peut raisonnablement se demander si l’ensemble de la cote mondiale ne serait pas soumis à la même enseigne. Et cela est très grave pour tout le monde ! Pour les joueurs de Monopoly comme pour la fourmi que je suis ! Car il n’y a plus de repères, donc plus de confiance, donc... plus rien ne vaut ce que l’on veut bien en dire. Et il ne s’agit pas là de simple déflation : il s’agit purement et simplement de l’écroulement de nos outils d’évaluation et de contrôle ; que ce soit au travers de la bourse, des modèles de gestion du risque, des agences de notations ou du rôle de nos autorités de tutelle et de régulation.

    Et là, me reviennent les lignes suivantes rédigées au début du XIXe siècle par cet étonnant économiste nommé Thorstein Veblen : « Les financiers en trafiquant des titres de propriété, par le recours au crédit et par l’émission de valeurs mobilières, échafaudent des édifices de papier, voués quelque jour à l’écroulement puisqu’ils reposent sur des fictions. »

    N’aurait-il pas raison ? L’humaniste-libéral, que je suis, n’aurait-il pas fait un peu trop confiance à des acteurs qui manifestement se sont servis à outrance d’un système et qui sont aujourd’hui totalement dans le potage. N’ai-je pas un peu trop « accordé crédit » à un système qui sur le papier et en théorie était séduisant à bien des égards, mais qui en pratique a été dévoyé par des décideurs sans éthique ni scrupule. A ce propos, Martin Wolf, éditorialiste au Financial Times, donne une excellente définition de notre système financier : « La finance moderne se résume à ôter les risques des épaules de ceux qui sont capables de les porter (les banques), pour les mettre sur les épaules de ceux qui sont incapables de les comprendre. »

    Comment est-ce possible que les autorités de tutelles aient accepté que Carlyle Capital Corp ait investi 670 millions de dollars dans 21,7 milliards de dollars de créances hypothécaires primes émises par Freddie Mac et Fannie Mae avec un effet de levier de 32x (je rappelle ici que si vous investissez avec un effet de levier de 32, pour chaque dollar mis sur la table, si le marché ne va pas dans le sens voulu, vous perdez 32 dollars. Faites l’affolant calcul si vous en pariez 200 millions).

    Ne s’agit-il pas purement et simplement de dévoiement ? Comment a-t-on pu accepter cet état de fait ? Comment peut-on accepter une réalité qui n’aurait jamais dû être ? Mais qu’a fait la police ? Bâle II n’a de sens que si les mesures sont appliquées à la planète finance car la situation actuelle signe son inefficacité. Attention aux doctrines à venir qui voudront réformer la situation actuelle. Pour ce faire, rappelons-nous des dires de Ludwig Von Mises : « Les masses, ces millions de votants qui sont souverains dans une démocratie, doivent apprendre qu’ils sont manipulés par de fausses doctrines et que seule une société fondée sur le marché et la libre-entreprise peut leur apporter ce qu’ils désirent : la prospérité. Mais pour convaincre la foule, il faut d’abord convaincre les élites, les intellectuels et les hommes d’affaires eux-mêmes. » N’oublions jamais que le cœur de notre système financier est composé d’hommes et de femmes dotés de comportements tantôt rationnels, tantôt irrationnels.

    A risque de contrepartie, je réponds par auto-responsabilisation des opérateurs et interdiction d’engager des investissements dépassant l’encours géré. L’effet de levier est purement et simplement banni.

    Aux exigences de fonds propres comme au risque de crédit, je réponds que toute cession de dérivés de crédit ne dédouane aucunement son vendeur de ses obligations finales. Autrement dit, cela ne change rien pour son bilan et il a l’obligation d’en tenir compte.

    A toute OPA avec prime négative, les autorités de tutelles doivent exercer leur mission principale, à savoir protéger l’épargnant-actionnaire de toute spoliation.

    Car il faut aller vers plus de responsabilité, plus d’attention, plus de cohérence avec soi-même et les autres, plus de respect dans l’essence et de la lettre du système auquel nous appartenons.

    Au-delà, aussi difficile que cela soit à admettre, seule la flexibilité des marchés et la libre-concurrence seront les seuls garde-fous et les plus fiables que nous ne pourrons jamais inventer.

    Nous avons pris conscience du devenir de notre planète, de l’importance du développement durable, de notre responsabilité écologique et environnementale. Faisons le même chemin pour développer la finance respectueuse de son lendemain.


    AGORAVOX
    The truth is incontrovertible, malice may attack it, ignorance may deride it, but in the end; there it is.” Winston Churchill
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