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Le procès qui dérange le Maroc

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  • Le procès qui dérange le Maroc

    Nadia Yassine a été poursuivie pour "atteinte à la monarchie" après des déclarations qu'elle a tenues en 2005. Mais son procès est sans cesse repoussé, comme s'il s'agissait de ne pas remettre en cause la transition démocratique.

    L’affaire Nadia Yassine débute le 2 juin 2005, suite à un entretien accordé à l’hebdomadaire marocain Al-Ousbouiya al-jadida. Dans cette interview, elle exprime clairement ses positions concernant la monarchie et le système de gouvernance du Maroc.
    Elle déclare préférer "la république à la monarchie", cette dernière "ne [convenant] pas aux Marocains", avant d’ajouter que "les jours de la monarchie sont comptés".
    Poursuivie pour avoir porté "atteinte à la monarchie", son procès se tient le 28 juin 2005. A peine ouvert, il est immédiatement reporté. A son arrivée au tribunal, quelque 300 militants sont là pour manifester leur solidarité, de même que les télévisions du monde entier, présentes pour couvrir l’événement.
    Le plus embarrassant pour la monarchie marocaine n’a pas été, finalement, la surmédiatisation de ce procès, mais bien plutôt l’attitude de Nadia Yassine. Sur sa bouche, un bâillon blanc marqué d’une croix rouge. Une façon de montrer que le droit à la liberté d’expression a été bafoué.
    Une erreur colossale ?
    Le fait de poursuivre Nadia Yassine pour "atteinte à la monarchie" a été considéré par de nombreux experts comme une erreur colossale de la part des autorités marocaines. Le "makhzen" - terme populaire désignant le pouvoir royal et ses élites – aurait sous-estimé le charme contagieux de cette grand-mère de 49 ans, véritable experte dans l’art de communiquer avec les médias.
    Il faut dire que Nadia Yassine a un beau pedigree. Son père, le cheikh Abdessalam Yassine, aujourd’hui âgé de 79 ans, est le fondateur du virulent mouvement antimonarchiste Justice et Spiritualité. Grand spécialiste de l’islam, révéré bien qu’idéologiquement imprévisible, ce dernier a passé une bonne partie de sa vie en prison pour avoir critiqué la monarchie. Femme intelligente, chouchou de la presse internationale, Nadia a su tirer parti de cet héritage de manière audacieuse.

    “Ce procès est un don, un cadeau, à al-Adl al-Ihsane”, a déclaré Aboubakr Jamai, de la Fondation Nieman de journalisme à l’Université d’Harvard, en référence au nom arabe de Justice et Charité. "Nadia Yassine utilise de manière astucieuse les questions d’ouverture et de liberté d’expression, car elle met le palais royal dans une situation embêtante : réprimer dans ce cas précis irait à l’encontre des valeurs adoptées par l’Occident."

    La communauté internationale suit de près ce procès. Dans une déclaration envoyée par courriel à FRANCE 24 mercredi, un officiel du ministère américain des Affaires étrangères écrit : "Nous soutenons la liberté d’expression au Maroc, et nous considérons qu'une presse libre et un échange libre des idées sont un aspect fondamental dans une société démocratique. Nous suivons cette affaire, comme cela est le cas dans toutes les affaires ayant trait aux droits de l’homme au Maroc. Nous militons sans faille pour des procédures judiciaires justes et impartiales."

    Etant donné la nature polémique de l’affaire, la justice marocaine semble avoir fait le choix de l’inaction depuis trois ans. Depuis le première audience, le 2 juin 2005, six autres audiences ont été repoussées. "Ils n’ont pas du tout envie de la juger", estime Ali Amar, directeur du Journal hebdomadaire. "Ils préféreraient que rien ne soit jamais arrivé."
    Sortir des années de plomb

    Après deux décennies de répression politique brutale dans les années 1960 et 1970 à l’époque du roi Hassan, connues comme "les années de plomb", le Maroc a opéré une lente transition démocratique. Situé à l’extrémité occidentale du monde arabe, séparé seulement par quelques kilomètres du continent européen, le Maroc est souvent considéré comme une nation arabe modèle, entretenant des liens étroits avec les capitales nord-américaines et européennes.

    Depuis son accession au trône en 2000, le roi Mohammed VI agit de façon à tourner la page des années de plomb. De même, ses efforts pour enrayer la vague émergente de l’islamisme dans la région lui ont fait gagner de nombreux admirateurs dans les capitales occidentales.

    Cependant, à l’intérieur du royaume, l’opposition politique et la liberté d’expression est encore strictement, parfois de manière étrange, encadrée.

    Le mois dernier, un ingénieur informaticien marocain a été condamné pour avoir créé, sur le site Facebook, un profil sous le nom du Prince Moulay Rachid, jeune frère du roi. La condamnation a été prononcée malgré le plaidoyer de la défense présentant l’internaute comme un admirateur du prince dont le seul but avait été de s’amuser un peu.

    Suite au large tollé provoqué par les défenseurs des droits internationaux, le cyber-usurpateur d’identité a bénéficié d’un pardon royal mercredi pour l’anniversaire de la naissance du prophète Mahomet. Le monarque marocain est particulièrement bien placé pour offrir un tel pardon, étant considéré comme le "prince des croyants".
    En revanche, le pardon pour Nadia semble peu probable, car il faudrait d’abord qu’elle soit condamnée. Pour Jamai : "L’affaire devrait être débattue au tribunal. Or la seule déclaration de Nadia concernant la supériorité de la république sur la monarchie – une idée largement partagée dans la société actuelle, cela donnerait matière à un débat intéressant. Mais c’est la dernière chose que la monarchie veut."
    Nadia Yassine risque entre trois et cinq ans de prison et une amende de 10 000 à 100 000 dirhams.

    Par Leela Jacinto

  • #2
    ... Nadia Yassine risque entre trois et cinq ans de prison et une amende de 10 000 à 100 000 dirhams...
    Liberté d'expression, où es tu ...

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