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Comment Dassault Aviation affronte la hausse de l'euro

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  • Comment Dassault Aviation affronte la hausse de l'euro

    Dassault Aviation traverse aujourd'hui le pire moment de son histoire, mais aussi le meilleur. L'année dernière, l'entreprise a enregistré pour ses avions civils destinés aux hommes d'affaires, les Falcon, un total record de 212 commandes, dont le montant s'élève à plus de 8 milliards de dollars (6,26 milliards d'euros). Et les clients continuent d'affluer. Durant la prochaine décennie, grâce aux demandes de Russes nouvellement milliardaires, de cheiks du Moyen-Orient et autres personnages de haut vol, les ventes de jets privés devraient doubler.

    Il y a juste un petit problème. Les avions Dassault sont construits dans la zone euro, et la chute continue du dollar rend la situation de plus en plus défavorable. Pour Charles Edelstenne, pdg de Dassault Aviation et président du Gifas (fédération de l'industrie aéronautique), "afin d'assurer le fonctionnement normal de notre industrie, le taux devrait se situer à 1,10 dollar". Aujourd'hui que l'euro plane au-dessus de 1,55 dollar, pour lui, "nous avons atteint un niveau insoutenable".

    Dassault n'est pas le seul industriel européen touché par la chute de la devise américaine qui, ces cinq dernières années, a perdu plus de la moitié de sa valeur contre l'euro (BusinessWeek.com, 20/03/08). Il souffre plus que les autres parce que, traditionnellement, l'industrie aéronautique commerciale utilise comme monnaie le billet vert, et c'est dans cette devise que sont exprimés les prix de tous les avions.

    Les fournisseurs obligés de délocaliser

    Cela met Dassault en mauvaise posture par rapport à ses concurrents américains comme Gulfstream, qui fait partie de General Dynamics, et Cessna, filiale de Textron, dont les coûts de production sont en majeure partie en dollars. Un autre grand rival, le canadien Bombardier a été partiellement protégé de l'effondrement du billet vert parce que Learjet, qui lui appartient, est basé à Wichita, dans le Kansas. Dassault, par contre, fabrique tous ses avions en France, même si l'électronique aéronautique et les intérieurs customisés sont installés à l'usine Dassault de Little Rock en Arkansas.

    Pour remédier à cette situation, l'avionneur dit avoir dopé la productivité de ses usines françaises en modernisant son informatique et en adoptant les dernières nouveautés en matière de technologie de conception numérique. Même si, l'année dernière, l'entreprise a augmenté sa cadence pour pouvoir livrer 70 avions, c'est-à-dire 15 % de plus qu'en 2006, il a gardé le même nombre d'employés français, soit 8 000. Malgré tout, le pdg considère que ces progrès n'ont pas été suffisants pour compenser la chute du dollar. Pour lui, la seule solution serait de transférer le plus de dépenses possible hors de la zone euro. La façon la plus facile de procéder est de répercuter une partie de la pression qu'il subit vers ses sous-traitants.

    En effet, les centaines de petites entreprises qui travaillent pour Dassault et son homologue européen plus connu, Airbus, sont ceux qui, selon toute vraisemblance, souffriront le plus de la glissade du dollar. Toute tentative des avionneurs de délocaliser leurs usines serait un processus coûteux, long et politiquement difficile (bien qu'Airbus ait déjà l'intention de créer des chaînes de montage en Chine et aux USA). Pour obtenir des résultats plus rapides, ils demandent donc à leurs fournisseurs de composantes aéronautiques, qui vont des systèmes de climatisation aux portes de cabines, d'établir leurs opérations dans des endroits meilleur marché.

    Un peu de latitude grâce aux dérivés financiers

    Ce mois-ci, Latécoère, le groupe aéronautique français qui fabrique des sections de fuselage et autres composantes, à la fois pour Dassault et Airbus, a déclaré envisager l'implantation d'une usine employant un millier de personnes environ, soit au Maroc, soit en Tunisie. En janvier, le Britannique Rolls Royce, qui fabrique des moteurs d'avions, a annoncé qu'il investirait 100 millions de dollars dans la réalisation d'une usine en Virginie où il construira les moteurs destinés au dernier avion Dassault, le Falcon SMS, un jet civil de milieu de gamme qui devrait entrer en service en 2012.

    Ces mesures suffiront-elles à empêcher le dollar d'entraîner Dassault dans sa chute ? L'entreprise a un peu de latitude puisqu'elle a utilisé des instruments financiers dérivés pour se couvrir contre les risques des variations des taux de change. L'année dernière, les bénéfices, de plus de 381 millions d'euros, ont doublé par rapport à 2006, tandis que les revenus ont augmenté de 24 %, atteignant plus de quatre milliards d'euros. "Je n'ai pas fait de vente qui risquerait de me mettre dans le rouge", a déclaré Charles Edelstenne.

    Autre point qui plaide en faveur de l'avionneur français : selon Richard Aboufia, analyste en aéronautique en Virginie, contrairement aux compagnies d'aviation qui sont très exigeantes sur les coûts, pour les acheteurs de jets, "le prix importe peu. Les clients achètent un jet parce qu'ils sont fidèles à une marque, ou parce que l'intérieur leur plaît". Avec les compagnies aériennes commerciales, par contre, "tout repose sur la consommation de carburant et les chiffres". En effet, le nouveau bébé de Dassault, le 7X, entré en service seulement l'année dernière, se vend bien, avec un carnet de commande fort de 170 appareils.

    Mais Dassault, qui a réussi à survivre à la chute de l'industrie aéronautique d'il y a cinq ans, et vient juste d'investir pour renouveler sa gamme de produits, ne peut pas prendre de risques. À l'avenir, son Falcon portera peut-être un nom à consonance française, mais une chose est sûre : ce sera un oiseau international.

    Par BusinessWeek
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