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Les retards de l'entreprise en Algérie

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  • Les retards de l'entreprise en Algérie

    Dans le domaine économique, les gouvernements qui se sont succédé en Algérie ont toujours privilégié l’approche macro-économique et les politiques sectorielles au détriment des réflexions et des actions d’accompagnement de l’entreprise. Tout se passe comme si, dans le domaine de l’entreprise, «les Algériens ne savent pas y faire». A l’ère de l’ouverture et de la compétitivité, nos entreprises, aussi bien publiques que privées, souffrent et, comme on le sait, ne sont ni présentes sur les marchés extérieurs ni stabilisées sur leur propre marché intérieur. Et au plan mondial «les choses évoluent vite, très vite».

    Il faut savoir, par exemple, que les outils de la compétition ne sont plus uniquement ceux des années 1960, 1970 et même 1980, c’est-à-dire le progrès technique et technologique et la qualification des ressources humaines. Etre à jour technologiquement et disposer d’une main-d’œuvre qualifiée n’assurent plus à eux seuls la compétitivité.

    Deux instruments nouveaux constituent aujourd’hui des outils stratégiques indispensables pour aider l’entreprise à livrer «la bataille de la concurrence» : la gestion des connaissances ou knowledge management (KM) et l’intelligence économique.

    Et dans ces deux domaines, l’entreprise algérienne accuse malheureusement de grands retards.
    1) La gestion des connaissances ou KM (knowledge management). L’entreprise se compose de trois constituants :
    a) des équipements (de la technologie)
    b) des collectifs de travailleurs (cadres, maîtrise, ouvriers)
    c) une organisation. Pour produire, les acteurs et l’organisation mobilisent et exploitent des connaissances. Mais ils en produisent aussi. Qu’est-ce que la connaissance en entreprise ?

    Dans son fonctionnement quotidien, l’entreprise produit des rapports de chantiers et de missions, des mémoires de projets, des codifications d’expériences. Cette «connaissance» produite et mobilisée doit être codifiée de manière vivante et impliquée. Elle doit aussi refléter une expérience qui devient elle-même une mémoire vivante et impliquée. La connaissance dans l’entreprise c’est donc la mémoire. Il s’agit de transcrire et de valoriser cette mémoire, d’aider au développement de comportements et de procédures qui facilitent cette valorisation de la mémoire.

    Pour cela, il faut savoir manager les hommes, les méthodes et les outils informatiques et d’intelligence artificielle dans le but de codifier, diffuser et intégrer dans le processus de production la connaissance

    . C’est cela la gestion des connaissances, le knowledge management. Le KM est aujourd’hui un vecteur principal de création de valeurs. C’est par le KM qu’on intègre le travail de l’intelligence dans l’entreprise. Les flux quotidiens d’informations sont de plus en plus denses : comment les adapter continuellement aux contextes internes et externes de l’entreprise. Le but du KM est de recentrer constamment les individus et les équipes sur l’apport de valeur.

    Comment intégrer au bénéfice de tous ces acteurs, des savoir-faire et des connaissances disséminés dans les différentes unités et cellules de l’entreprise mais aussi disponibles à l’extérieur de celle-ci ? Identifier ces connaissances et ces savoir-faire, les mobiliser, les optimiser dans un processus de création de valeurs, c’est cela la mission du KM. La gestion des connaissances est aujourd’hui un facteur-clé de compétitivité. Elle est aussi une source essentielle de l’innovation. Ainsi, à titre d’exemple, l’équipementier automobile Valéo vient de développer une application intranet pour capter le savoir collectif de l’entreprise.

    L’entreprise doit capter aussi la connaissance et le savoir-faire externes. Ainsi le Franco-italien Micro Electronics s’est imposé parmi les leaders des circuits intégrés en exploitant les connaissance disponibles à San José, Singapour ou Grenoble. Nokia, pour citer un autre exemple, a su intégrer des technologies nées hors de Finlande et comprendre le comportement des consommateurs du monde entier pour devenir le numéro 1 mondial de la téléphonie mobile. Le KM exige bien évidemment de l’entreprise qu’elle dégage des moyens financiers et humains et qu’elle mette en place une organisation pour gérer les connaissances.

    Dans nos entreprises, y compris dans celles qui sont le mieux dotées en cadres et les mieux organisées, chaque individu détient une parcelle de connaissance, d’expérience et de savoir-faire qu’il garde jalousement par devers lui. Cette connaissance ne circule pas, n’est pas diffusée, n’est même pas codifiée, ce qui occasionne des pertes de valeur énormes. Le problème de nos entreprises est bien celui de savoir gérer cette connaissance «éclatée» ; comment la mobiliser, la diffuser dans l’entreprise pour en faire une ressource, un facteur-clé de création de valeurs. L’entreprise algérienne doit aller au knowledge management. Voilà le premier défi. Mais nos entreprises ont aussi un second défi à relever : celui de l’intelligence économique. Ce concept, inspiré des pratiques militaires anciennes désigne «la capacité d’une organisation à collecter, interpréter et exploiter les informations décisives pour l’issue du combat». Cette «science» a bien évidemment connu une grande évolution et continue encore aujourd’hui de se perfectionner.

    A ses débuts, l’intelligence économique visait modestement à rationnaliser la collecte et le stockage de l’information pertinente. C’est d’abord au Japon, puis aux Etats-Unis que l’intelligence économique se développe comme science de l’anticipation. L’objet de cette science est la collecte de l’information publique, gratuite ou payante, en provenance du monde entier. Cette information est ensuite analysée et permet aux entreprises de définir leur stratégie en tenant compte bien sûr des contraintes mais aussi des impératifs qu’impose la mondialisation de l’économie.

    En d’autres termes, la démarche de l’intelligence économique consiste à collecter et maîtriser le flux d’informations qui circulent tant à l’extérieur qu’au cœur de l’entreprise.

    Cette démarche peut être définie en quatre temps :
    1) Dans un premier temps, il s’agit de cibler les informations pertinentes pour l’activité de l’entreprise ;
    2) une fois ciblées, les informations doivent être recherchées. Le travail consiste ici à sélectionner la bonne information de manière à la transformer en connaissance ;
    3) dans un troisième temps, le travail consiste à exploiter les informations conformément aux objectifs stratégiques ou opérationnels de l’entreprise. La collecte de l’information, son bon traitement et son analyse pertinente vont permettre à l’entreprise d’agir au mieux de ses intérêts. Cette utilisation offensive de l’information va permettre à l’entreprise d’identifier des partenaires potentiels, de construire des synergies à l’international et de créer de nouvelles alliances. Tout cela dans la perspective de conquérir de nouvelles parts de marché ou plus simplement de conserver les siennes. Cela ne requiert pas seulement une excellente connaissance de l’environnement économique mais également politique (au niveau local, régional ou international) ainsi que l’environnement fiscal ou juridique ;
    4) le quatrième temps de la démarche d’intelligence économique est celui qui consiste à protéger et sécuriser les données stratégiques de l’entreprise. Il convient à cette étape de sélectionner les informations diffusables de celles qui ne le sont pas.

    A côté des obligations légales, il s’agit de savoir ce qui peut filtrer de la vie quotidienne d’une entreprise, de ses recherches en matière de développement technologique ou géographique par exemple. L’entreprise doit être capable de mesurer le «risque résiduel», c’est-à-dire ce qu’elle peut dévoiler à ses partenaires.

    Tout comme dans le domaine de la gestion des connaissances (KM), l’entreprise algérienne accuse un grand retard dans celui de l’intelligence économique. Et il faut souligner encore une fois qu’il s’agit là de deux facteurs primordiaux de compétitivité. Et dans ces domaines, il ne peut être question de «laisser le temps au temps», chaque instant perdu étant de plus en plus difficile à rattraper.

    Par Abdelmadjid Bouzidi , le Soir
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