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Egypte : Sabotage de la misère

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    Egypte : Sabotage de la misère
    Al Ahram Hebdo 2 Avril 2008

    Chemins de Fer. Les vols de rails et de matériel de signalisation se multiplient. La hausse du prix du fer, la pauvreté et le chômage sont à l’origine de ce nouveau phénomène.


    Les chemins de fer sont en crise. La cause n’est ni une grève des conducteurs de train qui revendiquent une augmentation de salaires, ni des menaces d’un attentat terroriste adressées aux responsables de l’organisme. Mais, les faits sont bien plus graves. Actuellement, on vole les rails. L’affaire défraye la chronique depuis qu’on a découvert la disparition de rails de chemins de fer. Ceux-ci ont été arrachés et vendus dans plusieurs gouvernorats.

    Le mois dernier, en l’espace de deux semaines, quatre vols de rails et de matériel de signalisation ont eu lieu. Le 13 mars tout d’abord, trois individus, dont deux marchands de quincaillerie, ont volé 100 mètres de rails sur la ligne Ferdane-Bir Al-Abd, dans le Sinaï, sur laquelle transite le phosphate égyptien. Le même jour, la police des chemins de fer dans le gouvernorat de Damanhour reçoit une plainte signalant qu’un lot de rails a disparu alors qu’il était entreposé au bord de la route et devait servir aux travaux de réfection des chemins de fer. Il s’est avéré que les voleurs sont de jeunes chômeurs. Mais ces deux incidents ne sont pas les seuls. Quelques jours plus tard, dans le gouvernorat d’Assouan, la police a arrêté 6 personnes accusées d’avoir volé 30 tonnes de rails pour locomotives servant à transporter la houille.

    Ce genre de délits a fini par prendre de l’ampleur. Ce n’était plus les rails seulement qu’on volait, mais aussi tous les objets fabriqués en métaux ferreux et non ferreux. En effet, les wagons de 12 trains récemment rénovés le 26 février dernier ont été délestés de leurs fenêtres, portes en aluminium, et des robinetteries. Les extincteurs et les poignets des portes n’ont pas échappé à ce vol. Il a suffi de quelques heures pour que les cambrioleurs enlèvent tout. A préciser qu’un cadre de fenêtre pèse environ 2 kg, et que la tonne d’aluminium se revend à 30 000 L.E. Quant au prix de la tonne de fer, il est officiellement de 5 100 LE. Alors qu’en fait, on l’achète à 6 000 au marché noir. Les cambrioleurs vendent la tonne à 3 500 L.E.

    Suite à ces nombreux actes de vandalisme, le ministre du Transport, Mohamad Mansour, a tenu une réunion urgente avec le conseil d’administration de l’Organisme des chemins de fer pour discuter des causes et des conséquences du phénomène et envisager des solutions pour empêcher que de tels délits ne se répètent. « Nous faisons face à une vraie crise suite à une défaillance dans le système de sécurité des chemins de fer. Nous avons besoin d’un contrôle plus assidu tout le long des trajets », confie un haut responsable du ministère du Transport. A cet égard, l’Organisme des chemins de fer vient de proposer la semaine dernière un système de sécurité en coordination avec le ministère de l’Intérieur. Celui-ci vise à intensifier la surveillance policière sur l’ensemble des rails sur une distance de 9 500 km. Cela demande de la vigilance 24h sur 24 et beaucoup d’argent et de personnel.

    Pour le moment, l’organisme a décidé de suspendre tout projet de rénovation des locomotives et des rails de peur qu’ils ne soient délestés.

    De leur côté, les conducteurs se sont montrés menaçants. Ils réclament plus de sécurité et menacent de faire grève. « Si aujourd’hui, ces cambrioleurs osent voler les lots de rails de réserve, quelle serait la situation s’ils arrachaient les rails sur lesquels roulent les trains ? », s’interroge Ismaïl Mohamad, conducteur.

    Le secteur du transport maritime, lui aussi, fait face à ces actes de vandalisme. L’organisme vient de perdre 42 % de 582 nouvelles plaques de signalisation phosphoriques plantées tout au long de la route maritime d’Assouan à Alexandrie. La perte de l’organisme est estimée à 11 millions de L.E. En outre, l’Organisme des ponts et chaussées révèle qu’on vole environ 300 signaux mensuellement. Ces signaux sont fabriqués en fer et d’une matière phosphorique évaluée à 200 L.E. le mètre.

    Les couvercles des égouts, les barrages des ponts, et même les fils électriques n’ont pas été épargnés. Aboul-Ezz Al-Hariri, ancien député, membre du parti du Rassemblement et originaire du gouvernorat d’Alexandrie, affirme que 3 000 couvercles d’égouts ont disparu dans sa ville natale. « C’est l’Etat qui est à la base de ce problème. Le fait qu’un seul homme d’affaires du PND monopolise l’industrie du fer en Egypte a fait que les prix augmentent. Sans compter la hausse des prix incessants des denrées alimentaires à l’encontre de l’augmentation du taux de chômage et de pauvreté, les gens n’ont aucune autre solution que de voler les fonds publics. Et c’est l’Etat qui paiera le prix », commente Al-Hariri.

    Héba Nasreddine
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