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L'extraordinaire saga du rouge par Amy Buttler Greenfiels

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  • L'extraordinaire saga du rouge par Amy Buttler Greenfiels

    La couleur rouge ne laisse pas indifférente. Elle symbolise le pouvoir des rois, des cardinaux, de la révolution, du sang qui donne la vie, du désir... Grâce à la remarquable enquête historique d'Amy Buttler Greenfield, on sait désormais que ce pigment a fait l'objet de batailles économiques épiques pendant plusieurs siècles.

    Dans l'Europe du Moyen-Age, les puissants s'habillent en rouge et les teinturiers capables de fournir une couleur écarlate et durable font fortune. Seule une poignée de colorants naturels fournissent la couleur adéquate, et il faut toute l'ingéniosité de quelques artisans pour arriver à les faire tenir sur les étoffes. Ils ne savent pas encore que, depuis des millénaires, des paysans situés dans l'actuel Mexique entretiennent sur des cactus l'élevage d'un insecte, la cochenille, dont les femelles, une fois écrasées, libèrent un rouge éclatant. Il faudra attendre les velléités impériales de Charles Quint pour que les hommes de Cortès le découvrent en 1519.

    Du rouge mexicain au rouge de synthèse. Charles Quint comprend vite que le rouge mexicain, exporté en Europe, pourrait contribuer à financer son coûteux empire. Dès 1523, le premier chargement de cochenilles arrive en Espagne. Mais il faudra attendre l'arrivée des marchands espagnols dans les colonies pour qu'un commerce se mette en place à partir des années 1540. Le port de Séville en devient la plaque tournante. Philippe II, fils de Charles Quint, n'arrivera jamais à imposer un monopole public à ses marchands, mais il consolidera le secret industriel en interdisant la vente de cochenille aux étrangers. Qu'à cela ne tienne: Anglais et Français organisent des actes de pirateries pour voler le précieux pigment aux Espagnols, avec un succès certain au XVIe siècle. Les deux pays tentent ensuite de voler des cochenilles pour les élever dans leurs propres colonies (les chapitres se lisent comme un roman), mais il faudra attendre le XIXe siècle pour que la culture se répande. L'offre explose, alors même qu'un jeune savant anglais est en train d'inventer les colorants synthétiques qui vont tuer le commerce du colorant naturel.

    Les chimistes allemands s'emparent du marché de la teinture synthétique qu'ils dominent à la veille de la Première Guerre mondiale. Le traité de Versailles donnera la moitié des stocks de teinture allemande aux alliés. Ensuite, Français et Allemands se partageront le marché mondial qu'ils inondent de rouges de synthèse.

    Mais la cochenille n'est pas morte. Les teintures industrielles se révèlent en partie cancérigènes et, dans les années 70, elles sont interdites dans l'alimentaire, la pharmacie et les cosmétiques. A cela s'ajoute la demande croissante de produits bio. Résultat: la production repart dans les années 90, au grand profit du Pérou, qui assure environ 80 % de la production mondiale. Vérifiez vos bonbons, sucettes, yaourts, jus de fruits, glaces, sirop contre la toux, rouges à lèvres. S'ils comportent du E120 ou de l'acide carminique, vous avez près de cinq cents ans d'histoire entre les mains...

    Par Christian Chavagneux

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