Annonce

Réduire
Aucune annonce.

La marque japonaise Uniqlo veut séduire Paris

Réduire
X
 
  • Filtre
  • Heure
  • Afficher
Tout nettoyer
nouveaux messages

  • La marque japonaise Uniqlo veut séduire Paris

    Uniqlo vient d'avoir le feu vert. Après un magasin pilote de 200 mètres carrés ouvert cet hiver à la Défense, et plusieurs mois d'attente sur des charbons ardents, le roi de la fringue japonaise a reçu l'agrément de la CDEC (commission départementale de l'équipement commercial) pour le bâtiment qu'il convoitait au coeur de la capitale.

    Classé monument historique, le 15-17, rue Scribe, situé dans le 9e arrondissement de Paris, à l'angle de la rue des Mathurins, et surtout en diagonale des Galeries Lafayette, abritera à l'automne un immense « flagship » de 3.000 mètres carrés. Une adresse prestigieuse, mais pas facile à exploiter : « blind spot » (lieu aveugle) aux yeux des Parisiens, de l'aveu même de Paul Miles, son directeur marketing, qui aurait rêvé des Champs-Elysées, ce lieu constitue pour le japonais « un challenge marketing ambitieux ». A plusieurs titres.

    D'abord celui de son positionnement. Créé en 1984 au Japon par Tadashi Yanai, Uniqlo, pour « Unique Clothing », ne propose que des basiques et ne vise aucune cible en particulier. Un concept qui ne permet pas à la griffe d'être, ce que l'on appelle dans le commerce, une adresse de « destination », celle pour laquelle les consommateurs décident de se déplacer. La marque revendique l'unisexe et le transgénérationnel. Ses vêtements sont chics et classiques, sans pour autant tourner le dos à la mode, et vendus à des prix aussi attractifs que ceux du suédois H&M ou de l'espagnol Zara. Arrivée en France cet hiver, elle a vite été comparée à l'américain Gap mâtiné d'APC pour ses belles coupes épurées. Seuls ses cachemires à prix très doux (49,50 euros) lui ont permis de se créer une singularité : ils ont déclenché l'hystérie à l'ouverture de son premier petit magasin du centre commercial des Quatre Temps à la Défense.

    Afficher un nom

    Autre défi dans un commerce de l'habillement dominé par les marques, celui de ne surtout pas afficher un nom et de revendiquer un classicisme de bon aloi quand les concurrents se font fort de proposer les coupes des défilés. Alors que Zara et H&M jouent sur la mode, Uniqlo sort la carte du classique et prétend qu'il n'a rien d'ennuyeux. Le look très sage de la femme du président de la République devrait souffler dans sa direction un vent favorable, ainsi que les défilés de Milan et de Paris, qui ont salué le retour du chic et des intemporels. « Le «casual wear» peut devenir très pointu si l'on a recours à des tissus technologiquement innovants ou à des coupes aux détails travaillés. Nous défendons l'idée d'un consommateur qui, à force d'avoir le choix, décide de créer sa mode et son style. Notre logo lui est donc inutile. La marque n'a pas besoin de créer la personne », argumente Paul Miles.

    Cette posture « No logo » est cependant nuancée par ses 700 tee-shirts différents vendus en tube, et au Japon dans des distributeurs automatiques. Les « UT » (unique tee-shirt) ont leurs « creative awards » décernés par les clients sur la Toile. Ceux-ci votent pour le projet d'un styliste ou d'un artiste qui sera ensuite réalisé et vendu comme le best of de l'année. Ceux du dessinateur de mangas Osamu Tezuka, du photographe Araki ou du violoniste Gidon Kremer resteront dans les annales de la griffe. Quant aux collections, elles ont beau être classiques, elles se renouvellent tous les mois par le biais de petites lignes tendance imaginées par les bureaux de création, un premier à Tokyo, un autre à New York et le dernier à Paris. Dans la lignée des grandes enseignes de prêt-à-porter, la marque s'est dotée d'une forte puissance de réactivité, une façon de rester quand même toujours dans la course.

    Il n'empêche. A Londres, elle n'a pas fait événement. Et malgré une taille gigantesque au Japon - l'enseigne couvre aujourd'hui l'ensemble de l'Archipel avec 706 magasins - et une offre résolument familiale et domestique, elle a eu des difficultés à démarrer en Europe. Son propriétaire, Fast Retailing, avait ouvert rapidement une vingtaine de boutiques au Royaume-Uni pour en fermer plus de la moitié aussi vite, avec à la clef une perte estimée à 6 milliards de yens (environ 37 millions d'euros).

    Image attrayante

    D'où une nouvelle stratégie d'ouverture de navires amiraux avec un premier magasin en 2006 à New York, dans Soho, et à Londres, sur Oxford Street, en novembre 2007, afin de conférer à l'enseigne une image globale et attrayante. « Nous pensons que nous avons notre place partout. A condition de travailler notre notoriété avant de nous installer. Ainsi la réputation du grand magasin new-yorkais a créé un bouche-à-oreille positif à Londres et Paris. Notre «flagship» parisien sera celui de l'Europe et non pas celui de la France. Toute l'Europe continentale y viendra », parie le jeune cadre japonais. Pas étonnant que le navire amiral européen ait jeté l'ancre à Paris : avec Comptoir des Cotonniers et Princesse Tam.Tam rachetés en 2005, Fast Retailing a acquis ces dernières années une fine connaissance du consommateur français. « Le marché français est délicat car les consommateurs sont très attentifs à ce qu'ils achètent, savent souvent bien ce qu'ils veulent et n'aiment pas qu'on leur dicte leurs choix. Ils ne recherchent pas la mode à tout prix. Ce sont des «smart shoppers». Cela peut être une opportunité pour Uniqlo car nos produits sont de qualité à un prix raisonnable », estime Paul Miles.

    Verdict aux Galeries Lafayette Haussmann à partir de lundi, où Uniqlo inaugure un corner éphémère jusqu'au 17 mai au rez-de-chaussée du magasin principal. « Cette marque a besoin d'être au coeur des flux pour être visible. Mais elle a deux points forts : un «colorama» exceptionnel et une faculté hors du commun à détecter les bons basiques du moment. C'est un modèle qui interpelle : il est hors mode tout en étant très proche du consommateur. Et surtout il arrive au bon moment : la tendance est au retour du chic anglais et du classique français », estime Michel Roulleau, directeur général adjoint des Galeries Lafayette. Pas franchement inquiètes par la perspective de voir ce « Benetton des années 1980 » s'installer de l'autre côté de la rue, les Galeries Lafayette estiment que le japonais devra relever le défi de devenir une enseigne de destination, alors même qu'il aura très peu de vitrines à sa disposition dans son bâtiment classé de la rue Scribe.

    Mais avec son magasin « aveugle » de New York sur la Cinquième Avenue, l'américain Abercrombie a prouvé, avant le japonais, qu'en matière de commerce, la séduction tient parfois à bien autre chose.

    Les ambitions de Fast Retailing

    Propriétaire d'Uniqlo mais aussi de Princesse Tam.Tam et de Comptoir des Cotonniers, Fast Retailing est le numéro un japonais de la distribution d'habillement avec plus de 3 milliards d'euros de chiffre d'affaires. Son objectif : 1.000 milliards de yens (6,06 milliards d'euros) de chiffre d'affaires en 2010 avec 148 magasins à l'international.

    Par les Echos
Chargement...
X