Rachid Mekhloufi, l’ancien stratège de l’équipe nationale et maître à jouer de l’AS Saint-Etienne, revient dans cet entretien à l’APS sur la fabuleuse épopée de l’équipe de football du FLN. Et sur ses débuts de footballeur dans son quartier (El Houma), à Sétif.
La date du 12 avril 1958 est une date symbole, même si le 14 a été également avancé comme date de création de cette équipe du FLN. Celle de la naissance de la légendaire équipe de football de l’Algérie combattante. 50 ans après, que ressentez-vous, M. Mekhloufi ?
Makhloufi : D’abord, il faut faire une précision. La date du 14 avril a été donnée dans un premier temps, mais comme on fait les calculs et les évaluations concernant les premiers départs (ndlr : les joueurs qui ont quitté leurs clubs pour rejoindre Tunis en 1958), nous avons retenu la date du 12 avril, parce que les premiers sont partis le 12 puis les autres sont arrivés successivement.
Donc, il s’agit de la date du 12 avril et j'espère que celle-ci soit célébrée chaque année à travers tout le territoire national. En ce qui concerne les 50 ans de la commémoration, ce n’est pas rien. Il s’agit d’un demi-siècle.
Ce sont des souvenirs. C’est un retour en arrière, aux premiers départs. Un retour en arrière aux différentes tournées de cette équipe, aux différents matches que nous avons joués. Les hymnes nationaux que nous avons entendus, les drapeaux qui s’élevaient. Vraiment, c’était quelque chose de fabuleux.
Et pour ces 50 ans, nous avons voulu partager ça avec la population algérienne et lui expliquer le rôle de cette équipe pendant la révolution. Nos sentiments sont très profonds. Peut être que nos jeunes ne le comprennent pas maintenant, mais on ne doit pas les blâmer. Mais pour nous, c’est quelque chose de viscéral, d’autant plus que nous, nous avons ressenti ça. Parce que nous avons été traînés dans la boue par les colons. Par les insultes, par le 2e collège, par l’école indigène. Il y avait à l’époque une ségrégation terrible qui a fait que quand on a dit «il faut partir», c’était une joie, c’était comme une nouvelle naissance pour moi.
Au sein de l’équipe FLN, vous (les joueurs) étiez en même temps «footballeurs et djounouds». Qu’est-ce que cela représentait pour vous ?
D’abord, j’inverse la question. Nous étions d’abord djounouds et ensuite footballeurs. C’est important de le souligner, car notre «fuite» n’était pas pour aller jouer au football. C’était pour démontrer aux Français que tout le peuple algérien était derrière la révolution. De haut en bas. Y compris les gens qui étaient adulés, qui étaient aimés, qui gagnaient beaucoup d’argent et qui avaient une réputation incroyable. Cela a permis à beaucoup de Français de savoir qu’il y avait une guerre en Algérie. Qu’il y avait des gens qui mouraient atrocement, par la torture, la baignoire, etc. Pour arriver à cela, il a fallu un coup médiatique comme l’a fait cette équipe du FLN. Il ne faut pas oublier qu’il y avait une censure en France. Il n’était pas question de parler de guerre. Alors, ce coup médiatique a fait réveiller les consciences chez les Français. Et en plus, il a fait remonter le moral des moudjahidine dans les djebels. D’ailleurs, ils nous l’ont dit. Donc, c’est tout cela qui fait que cette équipe était appelée «l’équipe des djounouds» avant celle des footballeurs.
Vous étiez un des joueurs les plus en vue au sein de l’équipe FLN. Ressentiez-vous à l’époque que vous aviez une plus grande charge de responsabilités que les autres ?
D’abord, je ne me suis jamais senti un des meilleurs. Parce qu’il y avait un ciment entre nous. Une amitié telle qu’il n’était pas possible que les gens nous prennent pour des vedettes. Nous étions complémentaires. Certes, chacun avait ses qualités propres à lui, mais le plus important c’était ce nationalisme, cet amour du pays. Cet amour du drapeau. Cet amour de la révolution. C’est ce qui a fait que nous formions un bloc uni, et qui nous a permis de développer un football merveilleux, de défendre merveilleusement nos couleurs. Donc, la responsabilité était la même pour tous.
Le jeune public sportif en Algérie ne connaît pas beaucoup vos débuts dans le football. Pourriez-vous nous en parler ?
J’ai débuté comme tous les jeunes Algériens. Dans les quartiers… El houma à Sétif. Mais, j’ai eu la chance de jouer dans un club qui avait une politique de jeunes et qui m’avait permis de jouer en seniors, même quand j’étais cadet. C’était dans les années 1952-1953, au sein de l’USFM Sétif, l’actuel USMS. Je suis ensuite parti en France, après avoir eu la chance d’être visionné par un Sétifien qui avait un frère à Saint-Etienne. Il lui a parlé de moi. On m’a envoyé un billet et j’ai fait des essais concluants. Pour revenir à mes premiers pas en football, c’était comme tous les jeunes, au niveau des quartiers.
Ensuite, chacun progresse selon ses capacités et selon sa chance.
Par APS
La date du 12 avril 1958 est une date symbole, même si le 14 a été également avancé comme date de création de cette équipe du FLN. Celle de la naissance de la légendaire équipe de football de l’Algérie combattante. 50 ans après, que ressentez-vous, M. Mekhloufi ?
Makhloufi : D’abord, il faut faire une précision. La date du 14 avril a été donnée dans un premier temps, mais comme on fait les calculs et les évaluations concernant les premiers départs (ndlr : les joueurs qui ont quitté leurs clubs pour rejoindre Tunis en 1958), nous avons retenu la date du 12 avril, parce que les premiers sont partis le 12 puis les autres sont arrivés successivement.
Donc, il s’agit de la date du 12 avril et j'espère que celle-ci soit célébrée chaque année à travers tout le territoire national. En ce qui concerne les 50 ans de la commémoration, ce n’est pas rien. Il s’agit d’un demi-siècle.
Ce sont des souvenirs. C’est un retour en arrière, aux premiers départs. Un retour en arrière aux différentes tournées de cette équipe, aux différents matches que nous avons joués. Les hymnes nationaux que nous avons entendus, les drapeaux qui s’élevaient. Vraiment, c’était quelque chose de fabuleux.
Et pour ces 50 ans, nous avons voulu partager ça avec la population algérienne et lui expliquer le rôle de cette équipe pendant la révolution. Nos sentiments sont très profonds. Peut être que nos jeunes ne le comprennent pas maintenant, mais on ne doit pas les blâmer. Mais pour nous, c’est quelque chose de viscéral, d’autant plus que nous, nous avons ressenti ça. Parce que nous avons été traînés dans la boue par les colons. Par les insultes, par le 2e collège, par l’école indigène. Il y avait à l’époque une ségrégation terrible qui a fait que quand on a dit «il faut partir», c’était une joie, c’était comme une nouvelle naissance pour moi.
Au sein de l’équipe FLN, vous (les joueurs) étiez en même temps «footballeurs et djounouds». Qu’est-ce que cela représentait pour vous ?
D’abord, j’inverse la question. Nous étions d’abord djounouds et ensuite footballeurs. C’est important de le souligner, car notre «fuite» n’était pas pour aller jouer au football. C’était pour démontrer aux Français que tout le peuple algérien était derrière la révolution. De haut en bas. Y compris les gens qui étaient adulés, qui étaient aimés, qui gagnaient beaucoup d’argent et qui avaient une réputation incroyable. Cela a permis à beaucoup de Français de savoir qu’il y avait une guerre en Algérie. Qu’il y avait des gens qui mouraient atrocement, par la torture, la baignoire, etc. Pour arriver à cela, il a fallu un coup médiatique comme l’a fait cette équipe du FLN. Il ne faut pas oublier qu’il y avait une censure en France. Il n’était pas question de parler de guerre. Alors, ce coup médiatique a fait réveiller les consciences chez les Français. Et en plus, il a fait remonter le moral des moudjahidine dans les djebels. D’ailleurs, ils nous l’ont dit. Donc, c’est tout cela qui fait que cette équipe était appelée «l’équipe des djounouds» avant celle des footballeurs.
Vous étiez un des joueurs les plus en vue au sein de l’équipe FLN. Ressentiez-vous à l’époque que vous aviez une plus grande charge de responsabilités que les autres ?
D’abord, je ne me suis jamais senti un des meilleurs. Parce qu’il y avait un ciment entre nous. Une amitié telle qu’il n’était pas possible que les gens nous prennent pour des vedettes. Nous étions complémentaires. Certes, chacun avait ses qualités propres à lui, mais le plus important c’était ce nationalisme, cet amour du pays. Cet amour du drapeau. Cet amour de la révolution. C’est ce qui a fait que nous formions un bloc uni, et qui nous a permis de développer un football merveilleux, de défendre merveilleusement nos couleurs. Donc, la responsabilité était la même pour tous.
Le jeune public sportif en Algérie ne connaît pas beaucoup vos débuts dans le football. Pourriez-vous nous en parler ?
J’ai débuté comme tous les jeunes Algériens. Dans les quartiers… El houma à Sétif. Mais, j’ai eu la chance de jouer dans un club qui avait une politique de jeunes et qui m’avait permis de jouer en seniors, même quand j’étais cadet. C’était dans les années 1952-1953, au sein de l’USFM Sétif, l’actuel USMS. Je suis ensuite parti en France, après avoir eu la chance d’être visionné par un Sétifien qui avait un frère à Saint-Etienne. Il lui a parlé de moi. On m’a envoyé un billet et j’ai fait des essais concluants. Pour revenir à mes premiers pas en football, c’était comme tous les jeunes, au niveau des quartiers.
Ensuite, chacun progresse selon ses capacités et selon sa chance.
Par APS
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