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Après le pot de fleurs, le micro,la présentatrice, viennent les élus

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    Après le pot de fleurs, le micro,la présentatrice, viennent les élus
    par Kamel Daoud
    Retour sur une émission-phare de la communication Etat-Peuple: le Forum de l'ENTV. Mis à part ce qu'on y dit, il faut s'arrêter sur ce qu'on y voit: une répartition symbolique et très protocolaire de l'espace mental politique du pays. D'un côté le peuple: invisible, ciblé, supposé et virtuel, à convaincre et à démentir. De l'autre, des journalistes chargés de représenter des journaux, quelques idées et une opinion publique floue, encadrée et à qui on demande d'être brève, claire, concise et sans citer de noms, de lieux, de dates ou d'endroits. C'est-à-dire sans citer l'Algérie. De l'autre, le stand est occupé par le Wali qui fait partie de l'Etat, la présentatrice qui fait partie de l'ENTV qui fait partie de l'Etat et le personnel du Wali qui fait partie du wali qui fait partie de l'Etat. Entre les deux, il y a une table, des micros, des pots de fleurs, des sourires mais jamais les élus.

    Ni sénateurs, ni présidents d'APW, ni députés, ni maires, ni vice-présidents, ni élus de base. Bien sûr, tout le monde sait que ces gens-là n'existent pas ou très peu, mais on aurait pu, au moins, respecter l'illusion optique et les façades des institutions de la RADP. Selon la conception centraliste de la RADP, une wilaya étant plus représentée par ses problèmes et par les solutions de son Wali du moment, il n'y a donc pas de place pour les gens qui y sont élus par le peuple local et qui ont été, officiellement, choisis pour peser sur les décisions qui les concernent eux et leurs enfants et pas le wali et ses enfants. Elus pour rien ou pour le fun, sans poids, ni balle de novembre dans le canon, à peine représentatifs ou à peine utiles, les élus d'une ville n'ont pas, donc, à être invités par le Forum de l'ENTV qui n'invite que ceux qui décident et pas ceux qui décident à peine.

    Selon l'ordre de préséance du protocole, il y a d'abord le Wali, son exécutif, les pots de fleurs, la table, l'éclairage, le micro et enfin les élus de la place locale.

    Une terrible confession récoltée par le chroniqueur, un jour, lors d'un thé: «je n'utilise mon cachet humide que pour signer les convocations de session», expliquera avec frustration un président d'APW, souffrant du même mal que le premier président algérien du GRPA, peut-être. Selon ses aveux gênés, le bonhomme manquait de tout: d'une voiture, d'un logement mais surtout d'un sens pour sa vie politique. Lors des invitations des ministres dans sa wilaya et dans la wilaya qu'il représente, il doit batailler du coude pour se faire une place dans la rangée d'accueil et pour ne pas être refoulé dans la foule. Pour son vice-président c'est pire: «il s'est plaint, à moi, de n'avoir jamais pu utiliser son cachet humide depuis son installation». Le drame? Il est dans les faits et dans la caricature. Cette dernière étant connue par le peuple et sa collection de blagues amères sur ses élus, restent les faits: on apprend ainsi que depuis quelques mois, les élus d'une wilaya n'ont pas droit de faire partie de la commission du CALPIREF chargé d'octroyer les terrains et les assiettes dans la wilaya X. C'est-à-dire que les gens du coin n'ont pas le droit de savoir comment leur coin est morcelé et distribué par des gens désignés «d'ailleurs». Pire encore, les élus de tout bord ne font même plus partie des commissions d'arbitrage qui «montent» à Alger pour défendre des projets ou arracher des crédits et des enveloppes.

    Que font les élus? Ils s'assoient comme le peuple assis qui les a élu ou agissent selon leur force de caractère ou leur faiblesse. On comprend que: exclus par le peuple parce qu'ils sont des élus et par le Pouvoir parce qu'ils ne sont pas désignés, les élus algériens valent ce que vaut la démocratie algérienne: le prix d'un rouge à lèvres. On comprendra pourquoi ils ne sont pas visibles lors de ces émissions de propagande durant lesquelles un Wali parle de sa wilaya et pas de la wilaya qui l'accueille et pourquoi l'ENTV lui pose des questions à lui et pas aux élus, ni aux maires, à peine invités.
    @-Quotidien d'Oran
    Mieux vaut un cauchemar qui finit qu’un rêve inaccessible qui ne finit pas…
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