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Malika Doumrane : «J’ai choisi de chanter des thèmes engagés»

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  • Malika Doumrane : «J’ai choisi de chanter des thèmes engagés»

    Vous avez opté pour le style moderne au moment où c’est le folklore qui dominait la scène artistique. Quelles sont les raisons de ce choix?

    Malika Domrane: Adolescente je chantais le folklore kabyle dans la chorale. Très rapidement, en raison de ma maturité artistique, je m’étais engagée dans la voie de la chanson moderne. D’une part, je voulais trouver un style adapté à mon caractère, à ma personnalité et à mon mode de vie, d’autre part universaliser la chanson kabyle tant par la musique que par le texte.

    Certains ont estimé que votre travail harmonieux avec le regretté Mohia a été concluant.


    Justement, pour aller dans la modernité et dans l’actualité, j’ai choisi de chanter des thèmes engagés, en particulier la vie de la femme kabyle, la femme en général, et les valeurs culturelles et identitaires.
    Avec Mohia, nous partagions une grande réflexion dans une entente amicale, ce qui m’a amenée à lui demander de me composer une chanson: Adelaâ que j’ai interprétée avec plaisir.

    Peut-on savoir les raisons réelles ayant conduit Malika Domrane à choisir la chanson engagée?


    J’ai bravé les tabous pour garder ma liberté et permettre à d’autres d’avoir la leur. Je me suis engagée dans la lutte et le militantisme pour des causes justes, prenant des risques.
    Par ma voix, j’ai pu dire très haut et très fort ce que d’autres pensent bas.
    Etant une femme, ma vie doit se réaliser seulement dans le foyer, je m’y suis opposée bec et ongles dans des combats acharnés. Aujourd’hui, je ne regrette rien.

    Vous avez quitté votre pays, alors à la fleur de l’âge. Quels enseignements tirez-vous de cette période d’exil?


    La Kabylie me manque. En quittant mon pays, j’ai perdu les repères sociaux et culturels qui me permettaient une vie équilibrée. De plus, j’ai perdu mes sources d’inspiration à l’origine de mes compositions textuelles et musicales. J’en souffre.
    Paradoxalement, je peux vous affirmer qu’en vivant à Paris je parle beaucoup kabyle, voire plus que dans mes séjours en Kabylie. Ne peut-on pas dire alors que l’attachement à la langue et à la culture soit directement proportionnel à l’éloignement? Pour ma part, je le pense.

    Durant cette période, le célèbre chanteur Matoub Lounès, avec qui vous liait une grande amitié, a été enlevé. Comment avez-vous vécu ce rapt?


    Je l’ai mal vécu, car, j’ai gardé d’excellents souvenirs avec lui. Matoub était un ami d’enfance, un frère de lutte et un fer de lance. J’appréciais sa manière d’être, d’être artiste au sens noble du terme. Sa mimique, ses gestes, ses expressions, ses blagues...ses éclats de rire, sa grosse voix et sa voix douce et chaleureuse me manquent. Sa disparition m’a affectée et j’en souffre encore.

    Un projet de loi a été déposé par les députés de l’APN pour transcrire la langue berbère en caractères arabes. Quel est votre sentiment?


    Tamazight est notre langue maternelle comme d’autres langues le sont à leurs peuples. Laissez le choix aux citoyens issus de cette langue de décider de quelle manière l’écrire; pour ma part, je pense que les caractères latins sont actuellement les bienvenus en raison des travaux scientifiques effectués par nos prédécesseurs et qui ont donné satisfaction.
    La machine est lancée, pourquoi faut-il-l’arrêter pour recommencer dans d’autres caractères? Je désire voir investir dans des recherches pour développer et épanouir cette langue qui nous est si chère.
    Tamazight, langue maternelle: dans une dyade, la mère entre en relation avec son enfant dans sa langue et dans sa culture.
    Dans une triade, le père intervient et complète le système. Les trois êtres vivent et communiquent dans une harmonie. L’enfant s’épanouit et grandit.
    Il se développe et acquiert par l’apprentissage les informations, les connaissances, le savoir, nécessaires à sa maturation. Ce développement se fait par les mots, les mots de la mère à son enfant, les mots du père à son enfant, et les mots des parents entre eux.
    Le vecteur de toutes ces relations est la langue, la langue maternelle. Si un tiers intervient dans la dyade mère-enfant et trouble cette relation, l’apprentissage de l’enfant s’en ressent. Si ce tiers est le père, dans ce cas, on peut parler d’un mauvais père. Moi-même, mère, je ne voudrais pas donner à mes enfants un mauvais père ni un tiers malfaiteur ou, encore pire, un tiers pervers.

    Si je vous dis «mugregh Bubrit», quel en sera votre commentaire?


    Cette chanson m’inspire l’atavisme et me donne la volonté pour la transmission des valeurs culturelles et identitaires aux générations futures. Mon message va à tout homme sage.


    - Par l'Expression
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