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L’Occident payera-t-il le prix de «sa» mondialisation imposée ?

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  • L’Occident payera-t-il le prix de «sa» mondialisation imposée ?

    Il a fallu des morts en Egypte, des blessés au Sénégal, la destitution du Premier ministre haïtien… pour que le cri d’alarme du directeur général de la FAO résonne dans les hautes sphères de la finance internationale. Il n’est jamais trop tard pour se réveiller et apporter une aide urgente à tous ceux qui crèvent de faim. Car établir des constats, approfondir les causes d’une famine annoncée et énumérer les conséquences d’une telle situation dramatique (en l’occurrence, l’éclatement de conflits) n’est qu’une histoire à se raconter entre experts. Tout ce qui rentre ne fait pas ventre. En Afrique comme en Asie, l’heure est à la catastrophe humanitaire et il faut y remédier au plus vite. Sommes-nous devant la première crise financière de l’ère de la mondialisation ? Le locataire du 10, Downing Street, Gordon Brown, est certain que c’est le cas. Malgré la «légère récession» annoncée aux Etats-Unis, le Premier Ministre britannique dénonce les pressions inflationnistes des cours mondiaux des matières premières.
    Cela va du prix du baril de pétrole qui vient de battre un nouveau record aux prix du blé et du riz qui ont doublé en moins d’une année. La forte consommation dans les pays émergents serait-elle seule responsable de ces pics ?

    Certainement pas. Une polémique vient d’éclater au grand jour suite aux mises en garde de l’Organisation des Nations unies pour l’agriculture et l’alimentation à propos des graves dangers que représenterait l’augmentation mondiale de la production des biocarburants. A en croire les services de la FAO, à court terme, il est très probable que la rapide expansion des carburants verts priverait les populations pauvres d’Amérique latine d’accès aux denrées alimentaires. Il ne manquait plus que ça pour que les graines de la colère germent sur un autre continent.

    Le troisième ! Peut-on réfléchir à une véritable sécurité alimentaire et continuer de produire davantage de biocarburants ? Présenté à Brasilia, le rapport de la FAO a été soutenu par la «main moins verte» des représentants du Venezuela et de leurs alliés régionaux que sont la Bolivie, le Nicaragua et Cuba.

    En pleine polémique, la facture des pots cassés, ce sont les Brésiliens qui la payeront du fait qu’ils mènent le forcing pour propager la production de biocarburants en Amérique latine et en Afrique. Lundi dernier, en visite aux States, le ministre brésilien des Finances a rejeté l’idée que la hausse des prix des céréales est liée à la production de ce carburant alternatif. Cela pourrait être le cas aux Etats-Unis mais pas dans le monde entier. Les Latinos et les Africains auraient assez de terres pour produire les deux.


    Ainsi, les propos de Jean Ziegler, rapporteur spécial des Nations unies pour le droit à l’alimentation, ne seraient que pure fabulation ? A une radio allemande, il a qualifié la fabrication des biocarburants de «crime contre l’humanité». Et ce, avant de livrer bataille au Fonds monétaire international et à l’Union européenne. Du premier, il exige un changement de la politique des subventions agricoles. Soit la fin du strict soutien à des projets visant la réduction des dettes. Quant à la seconde, il l’a accusée ouvertement de dumping en terres africaines. Pour Jean Ziegler, le monde a besoin d’une tout autre politique énergétique. Le nucléaire civil ? S’il est doté de réels mécanismes de surveillance, la course à la périphérie du marché noir de l’atome fait toujours craindre le pire et est toujours d’actualité en Occident. Mais fortement secouées par l’actuelle crise alimentaire, ses capitales n’ont plus le choix de faire semblant de regarder ailleurs. Les implications politiques et sécuritaires que peuvent engendrer les émeutes de la faim ne sont plus d’ordre national comme au tout début des mouvements de protestation. Même si des voix vont s’élever ici et là pour condamner une mauvaise distribution des richesses au plan interne.

    Sauf, que tentaculaire, la crise en cours a eu vite fait de gagner 37 pays, d’où la réaction en chaîne parmi les membres de la société internationale. Le temps n’étant plus à la recherche des fautifs - les non-signataires du protocole de Kyoto y sont pour quelque chose-, la communauté mondiale mettra-t-elle la main à la poche pour venir au secours du «radeau des affamés» ? W. Bush a «dégainé» le premier le chéquier et a donné ordre pour que 200 millions de dollars d’aide d’urgence soient versés aux pays confrontés à des pénuries en Afrique et ailleurs. Le gouvernement haïtien en récolterait 10 millions pour pouvoir résister aux flots de la contestation.

    D’autres gouvernements du Nord industrialisé suivront-ils la «bonne conduite» des Etats-Unis qui semblent faire les frais d’une mondialisation qu’ils avaient eux-mêmes imposé à tour de bras ? A ce titre, serait-il plus rationnel que les ordres de virement soient signés en premier lieu dans les succursales des banques des pays développés ? Surtout que l’obsession sécuritaire face à la montée du radicalisme anti-occidental est à son paroxysme ? Quelle que soit leur provenance, les aides financières doivent arriver dans les plus brefs délais, le programme alimentaire mondial risque d’opérer des choix «déchirants» dans l’attribution de son aide d’urgence.

    Et pour cause, le Programme alimentaire mondial (PAM) n’a reçu que 14 millions de dollars après avoir réclamé aux gouvernements contributeurs une rallonge de 500 millions de dollars pour nourrir cette année 73 millions de personnes dans 80 pays. C’est dire que le «radeau des affamés» risque de couler plus vite qu’on ne le pense. Il faut absolument le sauver, la paix et la sécurité dans le monde le réclament avec insistance.

    - La Tribune
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