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Trois religions, cinq rites et une douce cohabitation des morts !

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  • Trois religions, cinq rites et une douce cohabitation des morts !


    De notre bureau, Samir B.
    Dans la nuit du 5 au 6 avril derniers, 148 tombes musulmanes ont été profanées dans un cimetière militaire français, situé près d’Arras. Des messages racistes et xénophobes ont été laissés sur les sépultures de ces musulmans qui ont combattu pour la France. Cet acte abject n’est, hélas, pas un cas isolé puisque des cimetières musulmans avaient déjà fait l’objet de profanations en France. Des actes révoltants d’une inhumanité inouïe que l’on ne rencontre pas dans un pays comme l’Algérie qui, même au paroxysme de la violence terroriste, n’a pas connu de tels actes, qui insultent la mémoire des morts. Le voyage que vous propose le Jeune Indépendant à travers les cimetières de Constantine est un témoignage sur cette douce cohabitation entre les morts des trois religions monothéistes. Excepté quelques cas de vandalisme, au demeurant condamnables, qui ont d’ailleurs touché même les cimetières musulmans, les sépultures des ossuaires israélite et chrétien n’ont jamais été taguées, ou salies de messages antisémites. Mieux, ce sont de modestes algériens qui veillent sur ces lieux, lesquels, malgré le poids des années, restent quand même bien conservés. Bref, celle qui jadis était appelée la Jérusalem du Maghreb, du fait de la paisible cohabitation entre les religions, préserve jalousement cette partie de son histoire. Une cohabitation que l’on retrouve au sein même de la confession musulmane où les cimetières des Malékites, des Ibadites et même des membres des zaouias se côtoient sans aucune anicroche. Toutefois, comme les effets du temps et de la nature laissent indéniablement des traces, les cimetières et, partant, les sépultures nécessitent un entretien continu. Mais, force est de constater que certains cimetières sont dans un état tel qu’ils nécessitent un programme d’urgence. C’est le cas du cimetière israélite qui, bien que relativement bien entretenu, subit une forte pression du sol, ce qui risque d’entraîner de sérieuses lésions au niveau des murs de soutènement érigés pour contenir les sépultures. De nombreuses tombes sont ainsi menacées d’être projetées dans le vide. Que fait l’Association des juifs originaires de Constantine (AJOC) qui, normalement, œuvre à la préservation de ce patrimoine ? La gardienne des lieux, une femme d’un certain âge, confie qu’un certain David Halimi s’intéresse à ce site. Il s’agit, en fait, du trésorier de la synagogue des Tournelles en France, et membre dirigeant de l’AJOC. David Halimi et Marc Zerbib ont des parents enterrés dans le cimetière juif de Constantine ; c’est donc à eux que revient le soin de participer au confortement des murs de soutènement.
    Aucune velléité anticonfessionnelle
    Nous pouvons en dire autant du cimetière chrétien où des dizaines de caveaux sont détériorés du fait du temps et de l’humidité. Le gardien de cet ossuaire, qui a le mérite de bien entretenir ce lieu, avait proposé au consul de France à Annaba de lui remettre une liste exhaustive des sépultures à restaurer, mais ce responsable a refusé de s’engager au nom des familles qui ont des parents dans ce Öcimetière car c’est à eux qu’incombe la responsabilité de veiller sur ces sépultures. Du côté du cimetière musulman situé en plein centre- ville, la situation n’est guère reluisante non plus. En ce lieu, on ne trouve ni électricité ni eau encore moins des bacs à ordures, mais on peut, en revanche, y croiser des enfants et même des couples. De même que des traces d’actes de vandalisme sont visibles. Par ailleurs, il faut signaler qu’il existe une anarchie pour les enterrements. Le cimetière central est en effeft convoité par toutes les familles constantinoises, d’où une saturation. Dès lors, il a été retenu le principe de recourir désormais aux carrés d’inhumation au niveau des autres cimetières. Au cimetière mozabite, il n’y a guère de trace de sépultures. L’enterrement se fait selon le rite ibadite et dans la lignée du sunnisme, nous dit-on. Du coup, le cimetière mozabite ne dispose d’aucune pierre tombale, qualifiée, d’ailleurs chez les Ibadites de «bidâa». Les Ibadites se servent également de leurs habitations pour enterrer des membres de leurs familles. Une pratique que l’on retrouve également dans les milieux des zaouïas où des hommes vénérés ou saints sont enterrés. Un domaine passionnant que le Jeune Indépendant a tenté d’explorer. Remerciements, walima, sacrifice… sont autant de pratiques qui ont résisté au temps et continuent d’être pratiqués par certaines familles constantinoises. Et c’est incontestablement la zaouïa de Sidi Abderrahmane, construite sur la tombe du saint Benabderrahmane, descendant de la puissante confrérie Rahmania, qui est la plus ancienne mais aussi la plus visitée et la plus vénérée. Même si leur existence n’a toujours pas été admise par les tenants d’un islam rigoriste, à l’instar du cheikh Ibn Badis, les zaouïas gardent encore leurs adeptes.
    Bref, ce voyage à travers les cimetières et zaouïas de Constantine permet de mettre en relief cet esprit de tolérance vis-à-vis- des morts, indépendamment de leurs confessions et de leurs rites religieux.
    Cinq rites religieux, dont trois chez les musulmans (malékite, ibadite et zaouïa), chrétien et juif. Et malgré certains actes de vandalisme, qui n’ont d’ailleurs épargné aucun cimetière, il est essentiel de souligner l’absence de toute velléité anticonfessionnelle. Ce qui n’est pas le cas à Arras ! S. B.
    ... « La douleur m’a brisée, la fraternité m’a relevée, de ma blessure a jailli un fleuve de liberté » Mémorial de Caen .
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