CA pourrait presque faire un refrain de chanson populaire: "quand l’baril monte, j’ai honte, j’ai honte..." Toutes les semaines, en effet, le baril connaît un nouveau record. 117 dollars, le week end dernier. Mais le prix du baril a aussi une dimension cour de récré: si ça monte, c’est la faute des autres.
Côté Opep, le ministre du Qatar, estime que la hausse est essentiellement due à la spéculation. Même son de cloche chez Pierre Terzian, directeur de Petrostratégies, pour qui il n’y a aucun problème d’approvisionnement. Donc, du côté des producteurs, pas question d’augmenter la production. L’Opep l’a clairement fait savoir ce week-end.
Chez les compagnies pétrolières internationales, le discours est autre: si ça monte, c’est parce que l’Opep ne veut pas ouvrir davantage les robinets. Christophe de Margerie, patron de Total, affirme par exemple que "le prix monte parce que la demande augmente". Inutile de chercher bien loin: ce sont essentiellement la Chine et l’Inde qui connaissent une envolée de leur consommation pétrolière. Bref, ça monte à cause de la croissance asiatique.
Troisième responsable pointé du doigt: la Russie. Premier producteur mondial avec 491 millions de barils en 2007 (424 en Arabie Saoudite) la Russie voit sa production baisser depuis le début de l’année. Motif ? Officiellement, à cause d’un manque d’investissements pour trouver de nouveaux gisements. En réalité, selon un fin connaisseur du dossier, la production russe baisse parce que les gisements ont été exploités n’importe comment. "Quand on perce beaucoup de puits sur un seul gisement, la production de pétrole augmente dans un premier temps. Mais ensuite, elle dégringole très vite: il n’y a plus assez de pression. On ne peut extraire que 15 à 20% du gisement contre 30 à 40% quand le gisement est correctement exploité."
Dernier coupable: les Etats occidentaux. L’Opep s’est amusée à calculer le montant des taxes pétrolières touchées par les pays du G7 pour la période 2002-2006: 2. 130 milliards de dollars, davantage que le montant des exportations de l’Opep (2 .045 milliards de dollars)!
Dans ce remake éternel du "c’est pas moi, c’est l’autre", qui faut-il croire? D’abord, l’affaire des taxes. Oui, les pays occidentaux touchent des revenus sur la consommation de pétrole. Mais, hormis la TVA, les taxes ne sont pas indexées sur le prix du baril. Donc, non, ce n’est pas la faute du fisc si le brut augmente! L’affaire des gisements russes est indéniable. Mais, si la Russie a voulu augmenter sa production, c’est bien parce qu’il y avait une augmentation de la demande.
Reste donc deux réalités: la demande augmente et la spéculation aussi. Ce n’est pas la spéculation, à elle seule, qui alimente l’augmentation des prix. Elle ne fait que surfer sur une tendance. Mais elle existe bel et bien. Il est difficile de la chiffrer. Les plus optimistes la limitent à 5% du prix. D’autres vont jusqu’à 35%. A en croire les producteurs de pétrole, le juste prix, pour tenir compte des investissements à faire pour mettre en exploitation les nouveaux gisements découverts ces dernières années, se situe autour de 70-80 dollars. La différence avec le prix actuel donne une idée du montant de la spéculation.
par Paul Loubière, grand reporter à Challenges, lundi 21 avril.
Côté Opep, le ministre du Qatar, estime que la hausse est essentiellement due à la spéculation. Même son de cloche chez Pierre Terzian, directeur de Petrostratégies, pour qui il n’y a aucun problème d’approvisionnement. Donc, du côté des producteurs, pas question d’augmenter la production. L’Opep l’a clairement fait savoir ce week-end.
Chez les compagnies pétrolières internationales, le discours est autre: si ça monte, c’est parce que l’Opep ne veut pas ouvrir davantage les robinets. Christophe de Margerie, patron de Total, affirme par exemple que "le prix monte parce que la demande augmente". Inutile de chercher bien loin: ce sont essentiellement la Chine et l’Inde qui connaissent une envolée de leur consommation pétrolière. Bref, ça monte à cause de la croissance asiatique.
Troisième responsable pointé du doigt: la Russie. Premier producteur mondial avec 491 millions de barils en 2007 (424 en Arabie Saoudite) la Russie voit sa production baisser depuis le début de l’année. Motif ? Officiellement, à cause d’un manque d’investissements pour trouver de nouveaux gisements. En réalité, selon un fin connaisseur du dossier, la production russe baisse parce que les gisements ont été exploités n’importe comment. "Quand on perce beaucoup de puits sur un seul gisement, la production de pétrole augmente dans un premier temps. Mais ensuite, elle dégringole très vite: il n’y a plus assez de pression. On ne peut extraire que 15 à 20% du gisement contre 30 à 40% quand le gisement est correctement exploité."
Dernier coupable: les Etats occidentaux. L’Opep s’est amusée à calculer le montant des taxes pétrolières touchées par les pays du G7 pour la période 2002-2006: 2. 130 milliards de dollars, davantage que le montant des exportations de l’Opep (2 .045 milliards de dollars)!
Dans ce remake éternel du "c’est pas moi, c’est l’autre", qui faut-il croire? D’abord, l’affaire des taxes. Oui, les pays occidentaux touchent des revenus sur la consommation de pétrole. Mais, hormis la TVA, les taxes ne sont pas indexées sur le prix du baril. Donc, non, ce n’est pas la faute du fisc si le brut augmente! L’affaire des gisements russes est indéniable. Mais, si la Russie a voulu augmenter sa production, c’est bien parce qu’il y avait une augmentation de la demande.
Reste donc deux réalités: la demande augmente et la spéculation aussi. Ce n’est pas la spéculation, à elle seule, qui alimente l’augmentation des prix. Elle ne fait que surfer sur une tendance. Mais elle existe bel et bien. Il est difficile de la chiffrer. Les plus optimistes la limitent à 5% du prix. D’autres vont jusqu’à 35%. A en croire les producteurs de pétrole, le juste prix, pour tenir compte des investissements à faire pour mettre en exploitation les nouveaux gisements découverts ces dernières années, se situe autour de 70-80 dollars. La différence avec le prix actuel donne une idée du montant de la spéculation.
par Paul Loubière, grand reporter à Challenges, lundi 21 avril.
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