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Sculpture berbère sur bois : un art oublié

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  • Sculpture berbère sur bois : un art oublié

    Ils sont deux ou trois jeunes gens à vouloir reprendre le flambeau pour faire revivre un art ancestral.
    Cet art que nous ont légué nos ancêtres, c’est la sculpture sur bois. Il nous a donné ces magnifiques coffres berbères que l’on ne voit plus que dans les musées d’Alger ou de Paris ou chez des collectionneurs passionnés ou fortunés. Il a donné ces magnifiques portes sculptées, ouvrages d’art qui portent mieux qu’un vieux parchemin l’identité millénaire d’un peuple amazigh né aux premiers balbutiements de l’histoire. Depuis que les kabyles se sont avisés de remplacer leurs portes antiques par de vulgaires portes métalliques et leurs coffres par des commodes et des buffets bon marché, la sculpture en tombée dans la désuétude et l’oubli.

    A 32 ans, Rachid Bentranti qui habite le village d’Ighil Ali est de ceux qui s’attellent à faire revivre cette pratique artisanale qu’aucun centre de formation étatique n’a inscrite sur ses tablettes. Avant de se mettre à la menuiserie sur machine et à l’ébénisterie, Rachid a, d’abord, appris à dessiner. Il s’est ensuite mis à la sculpture décorative en réalisant des fleurs et des motifs décoratifs sur des armoires de chambres à coucher. « Je sais que la sculpture berbère existe depuis longtemps alors je me suis intéressé à ce qui est à nous », dit-il. C’est ainsi qu’il est passé du style Louis XIV au style berbère en réalisant des portes, des coffres ainsi que des objets traditionnels. C’est le bois rouge qui est le plus disponible mais notre artiste sculpte aussi bien sur du chêne, du hêtre, du noyer ou de l’acajou. Il lui arrive souvent d’aller dans la forêt chercher lui-même la pièce de bois dans laquelle il sculptera l’objet qu’il a dans la tête. Il réalise même des sculptures sur de l’os pour vous dire qu’il ne recule pas devant la difficulté. L’os est extrêmement difficile à sculpter et il demande des ciseaux en acier qui ne sont pas toujours disponibles. Son idéal est d’ouvrir un jour un atelier de sculpture berbère et de prendre des apprentis pour pouvoir faire vivre le métier et pouvoir en vivre car les gens lui commandent de plus en plus des portes et des coffres sculptés. Il faut compter deux à trois mois de travail pour une porte sculptée, selon la richesse et la complexité de sa décoration. Autre sculpteur originaire d’Ighil Ali, Hillal Belkacem, 27 ans, est également un passionné de la sculpture berbère sur bois. Il a hérité cet art de son père et son grand frère. Son grand père est un fameux armurier qui s’était reconverti à la sculpture dans les années 50, lorsque la guerre a mis fin au travail des armuriers en l’interdisant. Hillal a commencé à copier ces mystérieux motifs qu’il voyait sur les portes et les coffres avant de pouvoir les reproduire. Aujourd’hui, dans son atelier, il fait de la restauration de vieux meubles sur commandes de certains antiquaires tout en honorant les commandes pour des meubles neufs qu’il reçoit quelques fois des particuliers. L’une de ses portes massives et sculptées qu’il a restaurées a fini comme porte d’entrée d’un restaurant de grand standing algérois.

    Sur place, dans les villages kabyles, les témoignages de cet art ancien se font de plus en plus rares. On ne trouve plus que quelques portes sculptées encore debout. Les coffres berbères sont encore plus rares. Il faut dire qu’après l’indépendance un véritable pillage culturel a été opéré dans la région. Mus par l’appât du gain, des petits malins passaient dans les villages racheter ces meubles sculptés pour une bouchée de pain chez des habitants qui n’étaient pas conscients de leur valeur et trop contents de pouvoir s’en débarrasser pour les remplacer par quelque chose de neuf ou de plus « moderne ». Chargés sur des camions, les portes et les coffres ont pris le chemin des antiquaires d’Alger puis de Paris.

    La sculpture berbère est art ancien, aussi ancien que la poterie, la céramique ou la peinture murale. Beaucoup de chercheurs et d’historiens comme Gabriel Camps ont souligné la permanence et la continuité du décor berbère et l’ensemble de ses motifs décoratifs comme la ligne brisée, la ligne ondulée, la croix bouletée, le losange, le damier, le chevron et la frise florale. Cependant, la sculpture sur bois sur les portes et les coffres semble une spécialité de la Kabylie orientale. C’est dans les tribus des Ath Abbes et des Ath Yala et un degré moindre, des Ath Aidhel que cet art semble le plus présent tant en quantité qu’en qualité. Hélas, très peu d’études universitaires ou académiques ont été produites sur le sujet. Pour ceux que le sujet intéresse, on ne peut signaler que le magnifique livre de Marcel Gast et Yvette Assié : « Des Coffres Puniques Aux Coffres Berbères », paru aux éditions Bouchene en 1993.

    Il reste à souhaiter que la flamme ne s’éteigne pas. Pour cela il faudrait que ces jeunes qui ont entrepris de réhabiliter un part de notre patrimoine culturel ne baissent pas les bras et que d’autres leur emboitent le pas. Pour que la culture amazighe ne vive pas que les galeries que l’Etat algérien a bien voulu lui désigner dans les musées.

  • #2

    Porte sculptée


    Objet en bois et en os sculptés



    Façade d'un coffre berbère sculpté




    Porte sculptée originaire des Ath Avla (Ighil Ali) photographiée chez un antiquaire.


    Partie supérieure de la porte sculptée et teinte


    Autre porte sculptée ayant gardée sa teinte d'origine.


    - Par KabylepCom

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