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Le diabète est un problème de santé publique en Algérie

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  • Le diabète est un problème de santé publique en Algérie


    LA TRIBUNE : Le diabète constitue, aujourd’hui, un véritable problème de santé publique en Algérie. De plus en plus de personnes en souffrent. Comment expliquez-vous cette situation ?


    Dr Habitouche : Le diabète prend de l’ampleur, non seulement en Algérie mais dans le monde entier. Les chiffres augmentent chaque année. Chez nous, il y a environ deux millions de personnes qui en sont atteintes (types 1 et 2). C’est devenu un véritable problème de santé publique. Certains parlent même d’«épidémie».

    Le diabète touche les hommes aussi bien que les femmes. Il menace les populations des grandes villes comme celles des petites contrées et des régions enclavées. Aussi ne concerne-t-il pas seulement les personnes d’un certain âge -généralement après la quarantaine- mais aussi des sujets très jeunes. On peut même avoir le diabète à la naissance. Les facteurs de risque sont au nombre de deux : génétique et environnemental. Dans le facteur environnemental, il y a le stress et la mauvaise alimentation. Pour le stress, on parle, bien évidemment, des problèmes de la vie quotidienne, des problèmes en milieu professionnel, du surmenage, etc. A ce propos, devrions-nous rappeler que l’Algérie est passée par une période de terreur et de choc –ce que nous appelons communément «la décennie noire»- qui n’a pas laissé indifférente la population. Il y a aussi les inondations, les tremblements de terre… Beaucoup de personnes ont contracté cette maladie (le diabète) juste après le choc. D’autres ont tout refoulé pendant des années. Maintenant que la situation est devenue normale, ce qui a été enfoui dans l’inconscient ressurgit. N’importe quel événement, banal puisse-t-il paraître, pourrait déclencher le diabète chez ces personnes.

    Et pour ce qui est de l’alimentation ?

    C’est surtout le surpoids qui est mis à l’index. Pourquoi ? On parle de diabète lorsque le pancréas ne fonctionne plus, c’est-à-dire qu’il ne produit plus l’insuline qui absorbe le sucre en plus dans le corps.
    En effet, quand il y a davantage de sucre dans le corps, le pancréas travaille plus que d’habitude pour produire davantage d’insuline. Lorsqu’il travaille beaucoup, il se fatigue. A force de refaire cette opération, le pancréas finit par lâcher. Il ne fonctionnera plus.

    En plus du diabète de types 1 (traitement avec insuline) et 2 (seulement des comprimés), y a-t-il d’autres diabètes qui touchent notre population ?

    Il y a, effectivement, celui qu’on appelle «l’intolérance au glucose». Des gens qui ne sont pas diabétiques mais qui, de temps à autre, présentent une hyperglycémie. Ce n’est pas chronique mais cela pourrait se transformer en diabète si la personne atteinte ne respecte pas les règles hygiéno-diététiques et ne fait pas d’exercice physique.

    Selon vous, deux millions de personnes souffrent de diabète en Algérie. D’autres affirment qu’il y en a plus…

    C’est un chiffre qui est en deçà de la réalité, je n’en disconviens pas. Nous n’avons pas de chiffres exacts parce que le dépistage en Algérie n’est pas encore généralisé. C’est pourtant le seul moyen de connaître la réalité du terrain et de bien cerner le problème. C’est aussi le meilleur moyen de prévention. Il faut savoir que le diabète peut être silencieux pendant des années. C’est le cas du diabète de type 2 qu’on détecte généralement à la quarantaine. On le découvre fortuitement au cours d’un examen systématique. Ce diabète survient à un âge avancé, parfois à un stade de complications. C’est là l’intérêt du dépistage de faire un diagnostic précoce de la maladie et de prévenir les complications (cardiovasculaires, oculaires, rénales…). Voilà pourquoi nous conseillons à nos concitoyens –y compris les gens sains- de faire un bilan complet au moins une fois par année. Le diabète de type 1 est, en revanche, bruyant et symptomatique. Il se développe rapidement et la personne atteinte ne peut supporter son hyperglycémie. L’organisme est perturbé et demande de l’insuline.

    Le diabète est-il mortel ?

    Quand la personne diabétique prend conscience de sa maladie, prend régulièrement son traitement et suit les conseils, pourtant restrictifs du médecin traitant, concernant son alimentation, elle vit normalement. Ce qui est difficile dans le diabète, c’est l’hypoglycémie. Il faut savoir que le cerveau humain se nourrit de deux éléments : le sucre et l’oxygène. S’il y a un manque d’oxygène, au-delà de cinq minutes, l’individu risque la mort. Si le cerveau manque de sucre, il souffrira. Il faudrait donc réagir vite pour combler ce déficit en sucre. Ce problème d’hypoglycémie est un véritable problème pour l’équipe médicale. C’est un cauchemar pour nous. Nous devons toujours avoir en tête qu’un malade diabétique peut avoir une hypoglycémie. Il faut toujours prévenir ce problème. Comment ? Sensibiliser le malade sur la nécessité de prendre son traitement à des heures régulières et faire de l’autocontrôle. Il faut l’habituer à prendre quelque chose de sucré après une injection d’insuline. Par exemple, s’il fait son injection d’insuline à 8 heures, il devra prendre quelque chose de sucré –pas trop sucré, bien évidemment- à 10 heures. Nous disons aussi à nos malades de ne jamais jeûner sans être autorisés par leur médecin traitant. Précisons, à ce propos, qu’il est formellement interdit aux diabétiques sous insuline de jeûner. Pour les diabétiques de type 2, c’est selon les cas.
    Malheureusement, pour nous, les malades ne suivent pas toujours nos conseils. Dans beaucoup de cas, ils ne suivent pas le régime alimentaire… Résultat : ils nous reviennent souffrants. Ce genre de comportement ne sert ni le patient ni l’équipe médicale.

    Revenons à cette «Maison des diabétiques El Hamma, Les Anassers». Quel est exactement son rôle dans la prise en charge de la personne diabétique ?

    Nous avons toute une équipe médicale qui s’occupe de la personne malade : des médecins diabétologues pour le traitement thérapeutique du diabète, des diététiciens qui apprennent au malade à manger sain et équilibré, des éducateurs qui lui apprennent à utiliser l’insuline, le glucomètre et faire l’autocontrôle, des psychologues pour aider ce malade à accepter sa maladie –beaucoup de malades n’acceptent pas leur diabète- des cardiologues pour voir s’il n’y a pas de problèmes au niveau du cœur et des vaisseaux sanguins, des ophtalmologues pour les problèmes des yeux. Nous avons aussi une assistante sociale pour aider les malades démunis à avoir le carnet de gratuité des médicaments. Nous nous occupons également du pied diabétique, pour prévenir les risques d’amputation. Chez nous, le malade est bien accueilli, bien suivi, bien orienté…

    Justement, cette structure est réputée pour sa bonne prise en charge des diabétiques. D’aucuns reconnaissent ses mérites. La preuve en est que les malades viennent de partout, alors qu’il y en a d’autres ailleurs. Comment arrivez-vous à faire face ?


    Ce n’est pas une chose facile. Nous avons près de 27 000 dossiers de malades et une moyenne de 120 consultations par jour. C’est énorme ! Nous sommes dépassés par le nombre des malades. Et si cette situation continue, on risquera à l’avenir de jouer sur la qualité des prestations. Déjà que nous avons commencé à décaler les rendez-vous et ce n’est pas bien pour nous, encore moins pour le malade.

    C’est-à-dire ?

    Le diabétique doit être vu par son médecin une fois tous les deux mois, sinon trois mois au maximum. Chez nous, on leur donne des rendez-vous de six mois.

    Que faut-il faire alors pour remédier à ce problème ?

    Je préconise qu’on décentralise les soins pour les malades du diabète. Que chaque diabétique suive son traitement dans son secteur. Qu’il y ait, donc, des structures qui, à l’image de la nôtre, disposent de tous les moyens humains et matériels –quoique, nous aussi, nous manquions de certains moyens (ECG performant, doppler, angiographie…)- à même d’assurer une prise en charge complète et efficace du malade.

    J’aurais aimé que cette «Maison des diabétiques El Hamma-Les Anassers» serve de référence. Qu’elle soit le prototype des autres «Maisons» qui ouvriront prochainement et même de celles qui existent actuellement mais qui ne fonctionnent pas comme il se doit, peut-être faute de moyens.

    Par La Tribune
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