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Les trésors cachés du vieux Mila

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  • Les trésors cachés du vieux Mila

    Souvent qualifiée par les érudits de musée à ciel ouvert, la vieille ville de Mila enferme dans son sous-sol bien plus de vestiges archéologiques que tout ce qui est aujourd’hui visible et connu sur sa surface. Il suffit en effet de scruter la multitude de vestiges encore visibles pour se rendre compte qu’ils ne sont que des pans de quelque chose de bien plus important et qui a été englouti sous les sédiments du temps et de l’oubli. Implacable, le constat fait inexorablement diriger les pensées vers "Le laboureur et ses enfants" chuchotant à qui veut bien l’entendre qu’"un trésor est caché dedans" et qu’"un peu de courage (vous) le fera trouver".

    Mais contrairement à la célèbre fable de Jean de la Fontaine, le courage et la volonté ne sont pas ce "qui manque le moins" dans cette grosse bourgade qu’est devenue l’antique Milev et où l’Histoire, ici comme ailleurs dans le pays, n’est pas encore considérée à sa juste valeur.

    Tout laisse pourtant penser, ici, qu’il suffirait de prendre la peine de creuser un peu, aux sens propre et figuré, pour aller à la découverte des pièces manquantes à ce puzzle que constituent les vestiges archéologiques qui ont bravé les crépines impitoyables des siècles pour parvenir jusqu’à nous.

    Ces traces visibles, dont certaines ont été découvertes au hasard de fouilles et d’excavations n’ayant rien d’archéologique, incitent en effet à sonder un peu plus en profondeur les entrailles de cette ville dont le nom n’a que deux syllabes mais qui n’en pèse pas moins lourd dans la balance de l’Histoire, qui n’a cessé de la "labourer" depuis de lointaines époques.

    La fondation de la ville remonte à l'antéchrist

    Même si l'âge de la cité n’a pas pu être daté avec précision, les plus anciennes inscriptions disponibles indiquent que Mila remonte à l’antéchrist et qu’elle a pris, à chaque époque, des noms différents comme Milev, Milium, Midius ou encore Milo.

    Ce dernier nom est celui que portait la ville à l’époque numide, à en croire des historiens qui ont étudié des inscriptions portées sur une statue découverte en 1880 par un officier français et qui serait la plus ancienne pièce archéologique de la ville encore disponible.

    Considérée comme l’une des pièces les plus précieuses de l’époque numide eu égard à sa dimension et à la noblesse de son matériau, cette statue de marbre blanc, actuellement exposée dans la cour de l’ancienne caserne et représentant une femme assise sur un trône, serait dédiée au dieu romain Saturne, selon certaines interprétations, et à la déesse Mitra, la sainte patronne de la ville avant l’époque romaine, selon d’autres.

    A l’époque romaine, Mila qui portait le nom de Milev, figurait parmi les 4 villes de la confédération Cirtéenne (en référence à Cirta), en plus de Chullu (Collo), de Rusicade (Skikda) et de Cirta (Constantine).

    La fontaine romaine située en plein centre de la vieille ville et connue aujourd’hui sous le nom de Ain El Bled, représente parfaitement cette époque.

    Les mêmes canalisations en pierres posées là par les artisans romains continuent d’acheminer une eau limpide et légère à partir d’une source montagneuse du djebel Marcho surplombant la ville, vers cette antique fontaine située en plein centre de la médina.

    Saint-Augustin et Abou Mouhadjer Dinar sont passés par là


    Mila, qui avait joué un rôle de premier plan dans la religion chrétienne à l’époque romaine, où son nom était lié à celui de l’archevêque Opta qui fut enterré dans son église, eut même et pour quelque deux ans comme chef religieux Saint-Augustin en personne. La statue de l’enfant enlaçant un veau qui se trouve actuellement dans le jardin public du centre ville, remonterait, pour sa part, à l’époque Vandale qui a duré près d’un siècle (450-539), certains historiens estimant que les pierres taillées, abondamment répandues dans cette région, représentent mieux le passage des Vandales dans cette ville.

    De l’époque byzantine, Mila conserve surtout des pans du mur d’enceinte qui la ceinturait sur une longueur de 1.200 mètres. Piqué d’une multitude d’étranges fenêtres larges à l’extérieur et étroites de l’intérieur, visibles à ce jour, et doté de 14 tours de surveillance pouvant atteindre 12 mètres de hauteur, ce mur reflète on ne peut mieux le statut de citadelle religieuse de Mila à cette époque.

    Ce ne sera donc pas par hasard que la conquête musulmane du Maghreb eut à coeur de cibler cette citadelle de la chrétienté et que le chef musulman et compagnon du prophète, Abou Mouhadjer Dinar, qui l’avait conquise en l’an 55 de l’hégire (674 de l’ère chrétienne), s’y établit pendant 2 ans.

    L'homme en a fait, en outre, un centre politique et militaire d’où partaient les conquêtes de la région, et où fut implantée la première maison du Maghreb central du Khalifat.

    La mosquée de Sidi Ghanem est le vestige qui illustre le mieux cette période où les nouveaux conquérants firent de Mila un grand centre de rayonnement de l’Islam, ce qui provoqua l'adhésion massive des tribus numides à la nouvelle religion.

    Deuxième à être construite au Maghreb, après celle de Kairouan (Tunisie), la mosquée de Sidi Ghanem, qui a été découverte en 1929 par un officier français, a connu de multiples modifications et péripéties, surtout du temps de l’administration coloniale française qui l’a transformée en hôpital et converti la maison de l’Emirat située dans son enceinte en cuisines pour les soldats, altérant du coup son cachet architectural originel.

    La médina de Mila qui s’étend sur une superficie de plus de 7 hectares a aussi sa Casbah, vestige de l’époque Ottomane durant laquelle la région, alors rattachée au Beylicat de l’Est, s’était illustrée par de nombreuses révoltes contre la lourdeur des impôts infligées à la population autochtone par l’Etat des janissaires.

    Future plaque tournante du tourisme culturel ?

    D’une richesse admirable qui pourrait faire d’elle une plaque tournante du tourisme culturel, la vieille ville de Mila a longtemps souffert de l’inconscience et de son corollaire, la négligence, d’où l’abandon de ses repères historiques. Le récent classement du vieux Mila comme patrimoine national protégé, après deux années entières de démarches de la part de l’élite de la ville, fait naître des espoirs quant à une véritable prise de conscience.

    Cette distinction bienvenue laisse aussi à penser que ce précieux patrimoine pourra encore témoigner û et pendant longtemps û du passé exceptionnellement dense et riche de cette belle cité, gardienne de la mémoire collective.

    L’installation à Mila, depuis octobre 2006, d’une antenne de l’Office national de gestion et de préservation des biens culturels, qui commence à organiser des visites guidées dans la vieille ville et à inventorier les sites et les objets à valeur patrimoniale, laisse en tout cas présager des jours bien meilleurs.

    Par APS
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