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Aïn Témouchent a-t-elle trouvé la formule anti-harragas ?

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  • Aïn Témouchent a-t-elle trouvé la formule anti-harragas ?

    Depuis janvier, aucun cas de harga n’a été enregistré à Aïn Témouchent qui fut un temps, avec ses 80 km de côte, l’un des principaux points d’embarquement des clandestins à destination de l’Espagne.

    Bilan zéro donc. Un bilan qui est d’ailleurs le motif d’une certaine fierté du commandant du groupement de gendarmerie de cette wilaya. Mais il y a encore des clandestins, des étrangers, en majorité de nationalité marocaine, qui y transitent pour aller, par le biais de réseaux aux ramifications identifiées notamment à Alger, chercher du travail dans les chantiers de la capitale ou à l’est du pays. Une quarantaine a été arrêtée depuis le début de l’année.

    L'année 2008 commence à redonner à cette petite ville son air paisible et reposant, sa tranquillité que perturbent à peine quelques trafiquants de drogue et passeurs d’effets vestimentaires de contrebande en provenance du Maroc. La côte, aux flancs escarpés entrecoupés de superbes plages en forme de clairières est, sous contrôle. Les plages Bouzedjar, Oued El-Halouf, Sassel… s’apprêtent à accueillir les estivants, alors que les zones accessibles uniquement à pied sont désormais sillonnées de pistes.

    Postes fixes de surveillance, garde communale et rondes des gardes-côtes ont fini par dissuader les téméraires et potentiels harragas de s’aventurer dans la région. Un poste de la marine surplombant ces plages a été installé. Équipé de moyens modernes et planté sur un pic dominant, ce poste militaire rend quasiment impossible el harga. Ce qui n’a pas empêché les réseaux de passeurs et les candidats à l’aventure de prospecter d’autres côtes à l’ouest ou à l’est du pays. Le choix de l’ouest est surtout motivé par sa proximité avec l’Espagne.

    En plus de l’intensification de la lutte contre ce phénomène, la création massive d’emplois à Aïn Témouchent, à la faveur des projets lancés avec une priorité d’embauche accordée aux jeunes de la wilaya, a favorisé la stabilité et le retour au calme. Entre 2007 et 2008, 14 239 emplois ont été créés dans les différentes formules. Le gazoduc Medgaz et la station de dessalement d’eau de mer ont absorbé une partie du chômage.

    On attend également la cimenterie d’Orascom, l’usine d’aluminium, la centrale électrique, dont les travaux de terrassement ont commencé, mais surtout les trois projets de la Sonatrach. Les gros engins ont déjà “mis à terre” les multiples collines alignées avant sur plusieurs kilomètres.

    C’est à la place des ces tonnes de sable que “poussera” peut-être la plus grande centrale électrique du pays. Un espace de 10 km de long, entre Oued El-Halouf et Terga, a été dégagé pour ces projets, l’usine d’aluminium émiratie ainsi qu’un port. Les prévisions sont de l’ordre de 5 000 emplois directs chez Orascom et de 2 500 pour l’usine d’aluminium. De quoi couvrir les besoins des jeunes locaux ainsi que ceux des wilayas limitrophes. Cette zone sera parmi les pôles économiques les plus importants du pays.Ce qui n’a pas découragé les dealers et les contrebandiers à continuer pour autant dans leurs activités délictueuses. Des saisies, bien que peu importantes par rapport à celles opérées récemment à Béchar ou à Tlemcen, sont régulières. Gendarmerie nationale, Sûreté nationale et Douanes nationales ont opté pour des opérations mixtes et arrêté un programme d’actions commun sur le terrain.

    La contrebande ne connaît pas de répit :à peine débarqués à Aïn Témouchent qu’un premier bilan tombe comme un trophée. D’autres suivront. Un barrage des douanes a intercepté un jeune originaire de Maghnia à bord d’une Audi nouvelle caisse. Les douaniers découvrent 3,68 kg de kif dissimulés entre le radiateur et le pare-chocs de la voiture. Il s’avéra que l’individu fait l’objet de deux mandats d’arrêt, l’un délivré à Maghnia pour vente de stupéfiants, le second à Béjaïa pour trafic de stupéfiants. Un palmarès éloquent pour ce trafiquant qui n’a pas peur de se montrer. Jeudi dernier, lors d’une opération mixte, gendarmerie-police, deux individus ont été arrêtés en leur possession 6,5 kg de kif. Ils étaient à bord d’un taxi.

    Remontant la filière, le commanditaire s’avéra être un garde communal exerçant à Aïn Defla. Sous ses faux airs d’incrédule, le chef de Sûreté de wilaya cache une féroce détermination et une volonté de rendre à cette ville sa quiétude dans une parfaite entente avec le commandant du groupement de la GN.On a constaté par ailleurs l’apparition d’un phénomène nouveau. La contrebande de cigarettes vers le Maroc.

    Depuis l’introduction des marques étrangères en Algérie à des prix relativement abordables, les contrebandiers s’y sont mis. Ainsi 804 cartouches de Marlboro et de Gauloises ont été saisies sur l’axe Oran- Maghnia. Une autre surprise à la brigade Émir-Abdelkader : les gendarmes ont saisi des effets vestimentaires et arrêté trois personnes. Dans le premier bureau, assises sur un banc, trois femmes scrutent de leur regard profond le va-et-vient dans le couloir, alors que dans un coin, un gendarme est occupé à taper sur un clavier. Ce sont elles, les personnes arrêtées. 130 paires de chaussures, 71 pantalons jeans et 42 tee-shirts, tel est le lot saisi. Curieusement, les rivets des extrémités des pantalons sont en cuivre et les boutons des fermetures en aluminium. U

    ne partie du cuivre volé et revendu en contrebande au Maroc n’a-t-elle pas servi à fabriquer ces boutons et rivets ? Le chef du commandement aura la même réflexion. Plausible. Quant aux tissus, pantalons et tee-shirts, il sont de médiocre qualité et d’une lamentable imitation. Les trois femmes sont des passeuses interceptées dans un taxi. Elles avouent ne pas gagner plus de 600 DA par voyage. On entendra le même refrain un peu plus loin que cette localité. Plus de 600 paires de chaussures ont été récemment saisies dans un véhicule particulier.

    La spéculation, un réflexe difficile à supprimer

    Quelques kilomètres plus loin, plusieurs véhiculent se mettent sur le bas-côté de la route. Un barrage de gendarmerie se signale. C’est un barrage mixte, GN-DCP. Contrôle de véhicules, de papiers, de la marchandise et de factures. Les contrevenants sont convoqués au siège de la direction du commerce. Les deux agents de cette direction sont plutôt didactiques, expliquent bien, avec un sourire ou l’air impassible. Sans nervosité aucune. “Les gens doivent apprendre à respecter la loi”, dit le premier. “Autrement, n’importe qui peut vendre n’importe quoi, selon la demande du moment”, enchaîna son collègue. Il résuma la situation avec l’exemple du ciment.

    Des gens achètent des bons, les revendent à d’autres qui se chargent à leur tour de transporter le ciment et de le revendre. Ce qui engendre des intermédiaires, la spéculation… Avec ces contrôles, on peut retracer le cheminement de la marchandise de la sortie d’usine jusqu’à sa destination, explique-t-on. À côté, six passagers d’un taxi sont invités à descendre. Chacun a un gros sachet noir compact. Des chaussures.

    Un barbu en qamis sourit à tout vent en récitant ayet El Koursi, du moins c’est ce qu’il dit, alors qu’une femme déclare ne pas gagner grand-chose en faisant cela. Vérification d’identité. Un gars d’un certain âge, légèrement boiteux, exhibe des documents, une photo de sa voiture accidentée qui l’a ruiné. “À 51 ans et six enfants sur les bras, qui va me donner un travail ? Je dois nourrir mes enfants”, dit-il suppliant l’agent. L’agent a découvert même le rouleau d’adhésif qui sert à bien entasser les chaussures pour donner la forme d’un paquet-bagage à main. Deux pas en avant, deux vieilles attendent stressées la décision des gendarmes. Elles ont un paquet chacune.

    Elles ont comme l’air d’attendre un verdict de justice. Même litanie chez l’une qui avoue ne gagner que de quoi faire vivre sa famille, entre deux larmes. L’autre a un argument de plus. Elle fait ce boulot pour vivre et surtout pour payer “un procès” (P-V). Elle veut montrer un document attestant qu’elle a une amende à payer. Pour quel délit ? “La même chose”, dit-elle. C'est-à-dire, contrebande de chaussures. Ce sont des centaines de paires qu’on essaie de faire passer tous les jours. L’été approche et la chaussure légère est demandée. D’ailleurs celles saisies se ressemblent toutes.

  • #2
    Suite

    Un repenti pas comme les autres

    Un gros à l’air renfrogné s’extirpe d’un taxi. Barbe non entretenue, tête légèrement baissée, la bedaine bien visible, déclare être un repenti. Originaire de Tiaret, il s’est installé, locataire dans une petite commune d’Aïn Témouchent. Il a passé un peu plus de quatre ans dans les maquis de Médéa contrôlés alors par la LID de Benaïcha. Il a bénéficié des dispositions de la concorde civile, mais n’accepte pas d’indemnité. Il dit avoir agi par conviction et refuse que l’on soit payé alors que du sang a été versé.

    Il vit de petits boulots et de bricoles pour ramasser de quoi partir en Arabie Saoudite, a-t-il expliqué. Il ne veut pas travailler ni rester en Algérie. Pas même faire imam. Sa seule fierté est d’avoir abattu six éléments du GIA qui ont porté atteinte à la femme d’un autre. On n’a pas le droit d’approcher la femme d’un autre au nom de l’islam et du djihad, a-t-il martelé. Il regagne sa place avec un léger sourire, plaisir d’avoir parlé, d’être écouté par quelqu’un. La RN 35 reliant Aïn Témouchent à Tlemcen deviendra ce jour-là le cauchemar des contrebandiers et des trafiquants. À El-Amria, on découvre une nouvelle marchandise à ajouter à la nomenclature des trafics : le sel.

    Un camion de Biskra transportant 26 quintaux de sel intercepté. Fausse facture et faux emballage. Des sachets imités, une marque d’une usine sise El-Oued mais fermée depuis au moins deux ans et un sel de couleur ocre dans un autre modèle d’emballage. Des échantillons ont été envoyés pour analyse. Ce verrouillage des axes et accès routiers a concerné en tout quatre wilayas, les points chauds ou noirs de l’Ouest : Oran, Sidi Bel-Abbès, Tlemcen et Aïn Témouchent. En plus de 11 clandestins africains, ont été arrêtés deux individus recherchés par la justice à Tlemcen qui est la dernière étape avant l’espoir d’atteindre l’Espagne via le Maroc.

    De notre envoyé spécial :
    Djilali Benyoub (Liberté)

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