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La filière avicole est en crise en Algérie

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  • La filière avicole est en crise en Algérie

    En Algérie, la filière avicole vit, ces derniers temps, une crise des plus aiguës.
    En témoigne le nombre sans cesse croissant de producteurs de poulet de chair qui se sont vus contraints de mettre la clé sous le paillasson. Les plus opiniâtres s’accrochent à mener leur activité par amour du métier, le dur labeur n’étant récompensé que par de très faibles bénéfices. «Tout juste de quoi subsister», avancent des aviculteurs de la région de Boudouaou, de Saoula et de Koléa que nous avons rencontrés sur les lieux. Et de nous lancer en substance qu’ils ne sont pas responsables de la cherté du poulet sur les étals des détaillants (250 DA/kg). «Nous cédons nos élevages à des revendeurs abatteurs à des prix très près proches du coût de revient à la production (après calcul détaillé, il est de 13,80 DA/kg actuellement) et parfois même en deçà.» Ce fort écart entre le prix de revient et celui à la consommation peut-il s’expliquer ?

    De prime abord, il est utile de rappeler que la filière avicole en Algérie n’en est pas à sa première crise. En effet, la maladie de la grippe aviaire apparue dans de nombreux pays du continent asiatique, à la fin de 2006 et au début de 2007, ainsi qu’en Egypte, a eu son effet sur le commerce des produits avicoles. La demande en viande blanche avait chuté considérablement à l’époque, et du coup, après les pertes subies par les aviculteurs, beaucoup ont préféré cesser toute activité. Ils le firent savoir à l’opinion publique par la voix de leur association, l’ANFA (Association nationale de la filière avicole), laquelle avait interpellé les pouvoirs publics pour tenter de trouver une solution aux problèmes des aviculteurs. «Se sentant livrés à eux-mêmes, des gens de la profession ont préféré louer leurs poulaillers plutôt que reprendre du service», ont fait savoir nos interlocuteurs. Après que le risque de la grippe a été carrément écarté grâce à la vigilance des services vétérinaires omniprésents aux quatre coins du pays, voilà qu’intervient une autre entrave à la bonne marche de l’activité avicole. Les cours mondiaux des céréales ne cessent de grimper.
    Par voie de conséquence, l’aliment nécessaire à l’élevage, composé essentiellement de maïs, de soja et de tourteau, devient de plus en plus cher.

    Plus de 70% du coût de revient à la production du poulet de chair pour l’aliment


    Dans la structure du prix de revient à la production, on s’aperçoit vite qu’aussi bien pour la production d’œufs de consommation que pour le poulet de chair, l’aliment représente une part importante dans le prix de revient à la production. En effet, pour l’heure, l’œuf revient à son producteur à 7 DA, dont 4,80 DA pour l’aliment, et pour le poulet de chair à 138,80 DA, dont 91 DA pour les charges alimentaires et 14 DA correspondant à l’achat du poussin démarré. A noter que c’est là une évaluation moyenne, d’autant plus, comme nous l’a affirmé le président de l’ANFA, M. Mezouad Mokrane, lui-même producteur de poussins qu’«il y a autant de prix de revient que d’exploitations». Pour en savoir plus sur les quantités nécessaires pour mener à bien un élevage de poulet de chair ou pour optimiser le rendement d’une batterie de poules pondeuses, cet ancien aviculteur a précisé que la consommation d’aliment, dont les composants proviennent entièrement de l’importation, représente à elle seule près de 70% du prix de revient. Aux dernières nouvelles, l’aliment de démarrage est livré à 3 500 DA le quintal. «Cette donne risque d’hypothéquer l’avenir de notre profession», a lancé Mezouad. Il nous expliquera aussi que la régularité et le strict respect des volumes de consommation par type d’élevage est de mise, «sinon, le risque de perte sèche [retard de la croissance et taux de mortalité] devient important». En clair, il n’aura pas du tout intérêt à tricher sur les doses et sur la catégorie de l’aliment. C’est pourquoi il devra disposer à portée de main du volume total de l’aliment correspondant à l’étape de l’élevage. Le type d’aliment diffère en fonction du stade d’avancement. Une alimentation spécifique au démarrage (poussin) à la croissance (poulette démarrée) et, enfin, à la finition, soit une alimentation réglementée et assidue. Ainsi, pendant les huit semaines d’élevage, l’éleveur devra s’assurer qu’il peut s’approvisionner en quantité nécessaire d’aliment. Il importe donc de disposer de l’argent nécessaire pour l’achat d’aliment, soit par exemple 1 200 000 DA pour 2 000 sujets, sans omettre les autres charges (fixes et variables).

    La dépendance en aliment vis-à-vis des importations : une source d’inquiétude
    A partir du moment où nous importons intégralement les composants de l’alimentation et que ceux-ci connaissent, depuis la fin de l’année 2007, des augmentations fulgurantes de leur prix de vente, les seuls importateurs que sont l’ONAB et quelques privés vont rencontrer des difficultés croissantes pour pouvoir s’approvisionner, car il leur faudra mobiliser des fonds de plus en plus importants exigés des fournisseurs de céréales et d’oléagineux. «C’est pourquoi l’ANFA attire l’attention des pouvoirs publics sur les conséquences induites de cette éventualité de rupture de stock qui mettrait en danger de mort les cheptels en place», a indiqué Mezoued. Pour ce dernier, les solutions existent pour se libérer de cette grande dépendance à l’importation des matières premières de base. En effet, selon le président de cette association, il suffit d’encourager l’utilisation de certains produits locaux dans l’alimentation animale. Il s’agit des grignons d’olives, du caroube, des farines de volaille et poissons. Il revient aux instituts de recherche de définir la ration introduisant ces produits. Pour Mezouad, le diagnostic de l’activité avicole en Algérie est peu reluisant et demande une meilleure prise en charge. Il dira en substance : «Si le prix de l’aliment venait encore à augmenter et si l’activité avicole continue à ne pas être redéfinie, cela menacera l’avenir de la filière.» Selon les dires des éleveurs que nous avons pu rencontrer (lire ci-dessus), «certes, nous achetons de plus en plus cher l’aliment, mais ce n’est pas seulement cette donne qui nous inquiète. C’est surtout le fait que nous nous retrouvons à négocier le produit de nos élevages avec des éleveurs qui font fi du prix de revient. En clair, ils nous imposent leurs prix qui, parfois, sont très en dessous du prix de revient. Mais que faire, sinon abdiquer sachant pertinemment que nous n’avons pas d’autre alternative dès lors que plus l’élevage séjournera dans le poulailler plus il faudra débourser de l’argent pour l’entretenir. Il est admis dans le milieu des aviculteurs que la période d’élevage ne peut aller au-delà de huit semaines, car les sujets deviennent de gros mangeurs, ce qui peut diminuer considérablement les bénéfices, une fois que le cheptel est en phase de finition». Nos interlocuteurs font savoir que des fournisseurs en aliment trichent un peu sur les doses réglementaires, histoire d’assurer des bénéfices.

    Les couacs de la filière


    On joue sur les rations. Une pratique qui se répercute sur le rythme de croissance du cheptel. Les poules n’arrivant pas à croître dans les délais exigés s’exposent aussi à des maladies. Autant de pertes sèches induites par la malhonnêteté de certains producteurs d’aliments. L’autre constat dans la filière est celui ayant trait à la production. A ce sujet, le président de l’ANFA a tenu souligner ceci : «Ce qui importe le plus, c’est d’arriver à régulariser le marché de la volaille, c’est-à-dire assurer une production à longueur d’année et non pas en dents de scie comme cela se fait actuellement. Il y a des périodes de l’année où la consommation est à son apogée et d’autres où l’offre est nettement supérieure à la demande. On relèvera aussi que les gains de productivité réalisés le long de la filière avicole ne sont que partiellement transférés vers les consommateurs, du fait de l’accaparement d’une part non négligeable de ces gains par les sphères d’aval dominées par le commercial privé. Autre constat de terrain : la prédominance de structures d’abattage informel.
    Au-delà de problèmes de santé publique notables qu’il induit, il est également à l’origine des structures de prix peu favorables aux exploitations agricoles et à la régulation des marchés de produits.

    Les conditions de relance du secteur selon l’ANAF

    Pour l’association, les carences structurelles en matière de régulation du marché sont à l’origine des fluctuations brutales et de l’instabilité des prix qui contribuent au dérèglement de l’ensemble des filières avicoles et entravent toutes les tentatives visant à assurer une planification rigoureuse des flux. Néanmoins, l’ANAF demande aux pouvoirs publics que les différents opérateurs versés dans l’activité avicole soient soumis aux mêmes règles de compétitivité et de concurrence loyale. Elle préconise, pour une relance effective et pérenne de la filière, de supprimer les impôts, les taxes et les droits de douane sur les matières premières importées (cheptel de reproduction, céréales, phosphates, produits vétérinaires et vaccins), ainsi que la TVA frappant les produits finis.

    Par La Tribune
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