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Mutinerie de Serkadji: Perpétuité pour Hamid Mebarki

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  • Mutinerie de Serkadji: Perpétuité pour Hamid Mebarki

    Le procès de Mebarki Hamid, le principal accusé dans la mutinerie à la prison Serkadji, du 21 et 22 février 1995, et qui s’est terminée dans un bain de sang avec la mort de 96 détenus et de 4 gardiens, s’est rouvert hier pour la troisième fois en treize ans après son report en novembre dernier à cause du retrait de la défense. Hier, et malgré un nouveau retrait des robes noires ainsi que le refus de l’accusé d’être auditionné à la barre sans ses avocats, le juge Boubetra a décidé de poursuivre le jugement de Hamid Mebarki en se basant sur la lecture des procès-verbaux liés à cette affaire. Ainsi, le procès d’une des plus grandes affaires qui a marqué les années de sang en Algérie n’aura pas permis de lever le voile sur beaucoup de zones d’ombre soulevées lors des précédents procès de l’affaire «Serkadji», et Hamid Mebarki a été condamné à la perpétuité par le tribunal après avoir bénéficié des circonstances atténuantes, le procureur général, dans son réquisitoire, ayant demandé la condamnation à mort.

    A l’ouverture du procès et pendant plus d’une heure, une guéguerre procédurale s’est déclarée entre le tribunal, le ministère public et les avocats.
    Dès l’ouverture de la séance, Me Mechri avait fait état de l’absence des témoins dont la demande de convocation a été formulée à maintes reprises par la défense. L’absence de témoins a d’ailleurs été l’unique cause du report de ce procès lors de la dernière session criminelle. Le procureur général rappelle alors le code de procédure pénale en déclarant qu’aucune demande n’a été formulée pour la convocation des témoins.

    Après débat et en se référant à l’article 273 du code de procédure pénale, le juge déclare que «le tribunal considère que les témoignages demandés ne sont pas primordiaux du moment que les procès-verbaux sont accessibles». Les avocats avaient demandé le témoignage de Laskri Djameleddine (condamné à perpétuité dans l’affaire de l’explosion de l’aéroport) et de Abdelhak Layada (présent dans la salle). Ces deux hommes faisaient partie du groupe de détenus qui ont négocié avec les autorités durant la mutinerie. Ils ont également demandé la convocation de l’ancien directeur de la prison Serkadji et de son adjoint. Après ce refus, le juge annonce la constitution du tribunal criminel et la lecture de l’arrêt de renvoi est lancée.

    Coup de théâtre. A la fin de la lecture de l’arrêt de renvoi et au moment où le président de séance appelle Mebarki à la barre pour son audition, les avocats demandent au juge le droit de formuler des requêtes. Commence alors la «bataille» des procédures. Le juge refuse d’accepter que les avocats fassent des requêtes orales et ces derniers insistent en affirmant qu’il ne s’agit en fait que de «remarques procédurales après la lecture de l’arrêt de renvoi».

    Me Amar explique alors au juge que la décision de la Cour suprême de renvoyer l’affaire de nouveau vers un tribunal criminel s’est basée sur le témoignage de l’ancien directeur de la prison qui avait déclaré que les quatre gardiens tués lors de la mutinerie avaient été «égorgés» alors que son client Mebarki, accusé de tentative d’homicide avec préméditation, n’est reconnu d’avoir fait introduire à la prison que des armes à feu. L’enjeu est important pour les avocats, il faut le souligner, puisque cela signifierait la suppression de ce chef d’accusation de tentative d’assassinat. Le juge insiste sur la procédure : «Vous voulez présenter votre requête dans la forme ou dans le fond ?» Le ton monte entre le président de la séance et certains défenseurs. Affronts et vexations. C’est l’intervention de Me Bouchachi qui réussira à calmer un peu les esprits. Ce dernier tentera également d’expliquer au juge que le code de procédure pénale permet à la défende de présenter des requêtes après la lecture de l’arrêt de renvoi sur le contenu de ce document.

    La parole est donnée au procureur général qui ne parlera que droit. «C’est un tribunal criminel et toutes les requêtes doivent être formulées par écrit. Nous ne sommes contre la convocation d’aucun témoin, il aurait fallu respecter la procédure. De plus, Mebarki n’est pas jugé pour un seul chef d’accusation, il doit répondre à d’autres charges retenues contre lui. Dans cette affaire, il n’y a pas que les quatre gardiens qui sont morts mais une centaine de détenus. C’est en l’auditionnant que l’on peut savoir s’il a fait introduire des armes à feu ou des armes blanches.» L’affrontement verbal ne se terminera qu’avec la décision des robes noires de se retirer, affirmant que leur client ne peut bénéficier d’un procès équitable sans la présence dans la salle d’audience des pièces à conviction ni des témoins. «Nous ne pouvons juger Mebarki en nous référant juste à des procès-verbaux», dira Me Tahri.

    Le juge prend acte de ce retrait et appelle Mebarki de nouveau à la barre. Ce dernier refuse d’être jugé sans sa défense. Le tribunal se retire pour délibérer. Deux heures après, il est décidé de poursuivre le procès de Mebarki Hamid. L’accusé demande de se retirer après l’insistance du juge à l’auditionner. «Prenez acte qu’il refuse de répondre aux questions du tribunal», lance M. Boubetra avant de commencer à lire les procès-verbaux de l’accusé et de ceux liés à ce procès. Dans le premier procès-verbal, Mebarki reconnaissait avoir remis les clés des cellules aux détenus mais avait nié avoir un quelconque rapport avec les assassinats des gardiens. Dans un second, les aveux semblent plus complets. Mebarki a raconté au juge d’instruction sa participation à faire introduire quatre armes à feu et deux armes blanches à l’intérieur de la prison ainsi que d’avoir donné les clés aux détenus. Il est à rappeler enfin que Mebarki Hamid est accusé de participation à homicide volontaire avec préméditation, de séquestration, de destruction de biens d’autrui et d’aide à l’évasion des prisonniers.

    L’ex-gardien des cellules des condamnés à mort est le seul prévenu à avoir été condamné à la réclusion à perpétuité dans cette affaire. Le premier procès, qui a eu lieu début janvier 1998 et qui a duré treize longues journées, s’était clos sur seize acquittements et neuf peines capitales, dont huit par contumace, ainsi que par des peines allant de deux à huit années de réclusion criminelle.
    Les prisonniers qui ont été condamnés, avant la mutinerie, dans des affaires de terrorisme, à de très lourdes peines, ont constitué la majorité des seize prévenus qui ont assisté au deuxième procès en appel de 2001 où seul Mebarki est condamné à perpétuité.

    Acquittement pour les quinze autres. Lors du premier procès, la défense s’est vu refuser l’audition de témoins qui ont assisté de près aux événements de la nuit du 21 au 22 février 1995 : Lembarek Boumaarafi, reconnu coupable de l’assassinat du président Boudiaf, Abdelhak Layada, ex-chef du GIA (Groupe islamique armé) et Abdelkader Hachani, leader du FIS (dissous) en détention provisoire à Serkadji au moment de la mutinerie. Lors du deuxième procès, des zones d’ombre n’ont pas été levées. Mebarki avait soutenu que «les services de sécurité étaient avisés des détails du plan d’évasion deux mois avant qu’elle ait eu lieu». Il avait reconnu, en 2001, avoir fait une copie, à partir d’un moule sur de la pâte à modeler, de la clé qui ouvre l’une des serrures de la cellule, située dans l’aile des condamnés à mort, des quatre prisonniers qui ont échafaudé le plan d’évasion sous «la menace».

    Mais Mebarki reconnaît avoir fait la copie d’une clé, et les cellules des condamnés à mort, ouvertes et non cassées, en nécessitent chacune deux. Aux trousseaux des «deuxièmes clés», Mebarki ne peut pas accéder, selon les témoignages du directeur de la prison et son adjoint. L’inculpé avait également déclaré que les armes, quatre Beretta et deux grenades, lui ont été remises par le frère de Bouakaz «dans une boîte de kalbellouz», que l’évasion ne devait pas avoir lieu le jour de sa permanence et qu’il en a été le premier surpris.

    Il avait nié toutes les autres accusations. Treize ans après, l’affaire Serkadji refait surface mais sans donner plus d’explications.

    Par La Tribune
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