La bibliothèque d'André Mandouze, grand spécialiste de saint Augustin, a traversé la Méditerranée. Le millier d'ouvrages qu'elle contient est désormais accessible aux chercheurs, au Centre d'études diocésain qui dépend de l'évêché d'Alger. André Mandouze, chrétien de gauche, ancien résistant, cofondateur de Témoignage chrétien, mort le 5 juin 2006 (Le Monde du 9 juin 2006) à presque 90 ans, souhaitait faire don aux Algériens de sa bibliothèque parisienne.
Pour ce normalien, militant de la première heure contre le fascisme et le système colonial, saint Augustin symbolisait le lien entre africanité et universalité. En 2002, le vieux professeur était revenu à Alger pour présider un colloque sur saint Augustin, avec le président Bouteflika.
Les deux filles de Mandouze, ainsi que nombre de ses amis, étaient à Alger, le 4 mai au soir, pour assister à l'inauguration de la bibliothèque du nom du "maître", comme continuent de l'appeler avec affection ses anciens élèves.
André Mandouze était arrivé en Algérie en 1946 pour préparer une thèse sur saint Augustin, puis enseigner à l'université. Il allait s'engager totalement aux côtés des indépendantistes du FLN, signer le "Manifeste des 121" sur le droit à l'insoumission (1960), être renvoyé en France, connaître la prison pour "trahison envers la patrie" et être une des bêtes noires de l'OAS.
Mais pour ce grand chrétien, l'insoumission était "un acte de foi". Aux yeux de Claudine et Pierre Chaulet, Algériens d'origine française et figures du combat indépendantiste, Mandouze incarnait "à la fois l'intellectuel engagé et un christianisme vécu sans concession ni compromission".
TENSIONS COMMUNAUTAIRES
L'inauguration de la bibliothèque André-Mandouze d'Alger intervient dans un contexte de fortes tensions entre les communautés chrétiennes d'Algérie et les autorités. Un prêtre a été condamné en avril à une peine de deux mois de prison avec sursis pour prosélytisme. Des journaux arabophones attaquent régulièrement les chrétiens d'Algérie qui, pourtant, vivent depuis des décennies en harmonie avec les musulmans.
Dans une lettre lue à l'assistance, lundi soir, l'ancien chef de gouvernement algérien et ancien ambassadeur à Paris, Sid Ahmed Ghozali, ami personnel des Mandouze, a exprimé son "indéfectible solidarité" avec ses "frères chrétiens". Les comportements "politico-bureaucratiques" dont ils sont la cible, a-t-il regretté, "blessent notre fierté d'Algériens".
Amir Akef
Article paru dans l'édition du 09.05.08 LE MONDE
AFP/PIERRE VERDY
Le philosophe André Mandouze, spécialiste de Saint-Augustin et de l'Algérie, à Paris, le 9 février 2003.
Pour ce normalien, militant de la première heure contre le fascisme et le système colonial, saint Augustin symbolisait le lien entre africanité et universalité. En 2002, le vieux professeur était revenu à Alger pour présider un colloque sur saint Augustin, avec le président Bouteflika.
Les deux filles de Mandouze, ainsi que nombre de ses amis, étaient à Alger, le 4 mai au soir, pour assister à l'inauguration de la bibliothèque du nom du "maître", comme continuent de l'appeler avec affection ses anciens élèves.
André Mandouze était arrivé en Algérie en 1946 pour préparer une thèse sur saint Augustin, puis enseigner à l'université. Il allait s'engager totalement aux côtés des indépendantistes du FLN, signer le "Manifeste des 121" sur le droit à l'insoumission (1960), être renvoyé en France, connaître la prison pour "trahison envers la patrie" et être une des bêtes noires de l'OAS.
Mais pour ce grand chrétien, l'insoumission était "un acte de foi". Aux yeux de Claudine et Pierre Chaulet, Algériens d'origine française et figures du combat indépendantiste, Mandouze incarnait "à la fois l'intellectuel engagé et un christianisme vécu sans concession ni compromission".
TENSIONS COMMUNAUTAIRES
L'inauguration de la bibliothèque André-Mandouze d'Alger intervient dans un contexte de fortes tensions entre les communautés chrétiennes d'Algérie et les autorités. Un prêtre a été condamné en avril à une peine de deux mois de prison avec sursis pour prosélytisme. Des journaux arabophones attaquent régulièrement les chrétiens d'Algérie qui, pourtant, vivent depuis des décennies en harmonie avec les musulmans.
Dans une lettre lue à l'assistance, lundi soir, l'ancien chef de gouvernement algérien et ancien ambassadeur à Paris, Sid Ahmed Ghozali, ami personnel des Mandouze, a exprimé son "indéfectible solidarité" avec ses "frères chrétiens". Les comportements "politico-bureaucratiques" dont ils sont la cible, a-t-il regretté, "blessent notre fierté d'Algériens".
Amir Akef
Article paru dans l'édition du 09.05.08 LE MONDE
AFP/PIERRE VERDY
Le philosophe André Mandouze, spécialiste de Saint-Augustin et de l'Algérie, à Paris, le 9 février 2003.
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