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Concurrence feutrée entre Maghrébins au sud du Sahara

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  • Concurrence feutrée entre Maghrébins au sud du Sahara

    A défaut d'avoir réalisé le Maghreb uni, chacun des pays maghrébins, parfois dans un esprit de concurrence politique, tente de développer sa propre stratégie africaine. La politique était déterminante, l'économie prend le relais.

    Par Sana Harb, Alger

    Un fonds d'investissements pour la Libye, les entreprises de services pour le Maroc et des projets d'infrastructures pour l'Algérie : l'action économique des pays maghrébins, parfois sur fond de rivalité politique, en direction des pays africains, épouse globalement les caractéristiques de leurs propres économies. Les opérateurs algériens le concèdent, le capital politique dont jouit l'Algérie n'est pas suivi par une présence des entrepreneurs publics ou privés en Afrique. En annonçant, la semaine dernière, qu'il envisageait d'entrer dans le capital de certaines compagnies aériennes africaines, le nouveau PDG d'Air Algérie, Abdelwahid Bouabdallah, innove tout en révélant le retard pris par les entreprises algériennes en Afrique. La question tend d'ailleurs à devenir politique. Le journal El Watan, dans son édition du 25 mars 2008, s'inquiétait de la « perte d'influence » d'une Algérie qui vit sur son capital politique alors qu'elle possède avec le « pétrole, le gaz et les milliards de dollars » des instruments « plus efficaces que des kilomètres de discours, fussent-ils du président de la République ». Le journal constatait avec sévérité et non sans raison que « quand un Gabonais, un Ivoirien ou un Capverdien doit transiter par Casablanca pour venir en Algérie, il réfléchira sans doute deux fois avant de se décider. L'Algérie a-t-elle donc une politique africaine ? (…) Pour s'être résolue à regarder vers le Nord, la diplomatie algérienne a tourné le dos à l'Afrique… ».

    Le tournant des années 90

    Dans les faits, l'Algérie n'a pas tout à fait tourné le dos à sa profondeur subsaharienne, elle est engagée dans d'importants projets comme la route transsaharienne (Alger-Lagos), le gazoduc (Algérie-Nigeria), ou l'interconnexion de la fibre optique (Algérie-Nigeria). Ces dernières années, Sonatrach a acquis des blocs d'exploration au Mali et en Mauritanie. Mais en comparaison avec la Libye et le Maroc, ce pays a raté le tournant des années 90, bien mieux mis à profit par ses deux voisins. Alors que l'Algérie s'enfonçait dans la crise, la Libye, par nécessité politique, a développé une politique africaine offensive, tandis que les entreprises marocaines, essentiellement de services, ont accentué leur présence, en Afrique de l'Ouest notamment. L'embargo imposé à la Libye, combiné à ce que Tripoli considère comme une faiblesse de la solidarité arabe, a entraîné cette réorientation africaine. Une activité intense qui a abouti, en février 1998, à la création de la Communauté des Etats Sahélo-Sahariens. Cette nouvelle organisation qui regroupe 25 pays, dont tous les pays d'Afrique du Nord à l'exception de l'Algérie, a été largement impulsée par la Libye. Cette politique africaine est désormais basée sur la Libya Africa Portfolio, un fonds de 8 milliards de dollars destinés à financer des grands projets dans l'énergie, les mines et les infrastructures. En marge de la récente visite de Poutine à Tripoli, la compagnie pétrolière libyenne a convenu avec Gazprom de coopérer dans le secteur gazier et pétrolier, en Libye et dans d'autres pays africains. Entre 1998 et 2001, alors que les cours pétroliers restaient modestes, les investissements libyens en Afrique sub-saharienne étaient estimés à plus de 4 milliards de dollars

    Diplomatie économique

    La présence économique marocaine en Afrique déjà visible dans les années 90 a tendance à se confirmer avec une prédilection pour l'Afrique de l'Ouest. Pionner de cette orientation africaine, Royal Air Maroc (RAM) suivie par les télécoms, le secteur minier… La dynamique est portée par une expertise marocaine dans des secteurs de plus en plus diversifiés, ingénierie, BTP, sous la forme de partenariats, d'offres de formations. Les Marocains sont concurrentiels en termes de savoir-faire mais aussi compétitifs en matière de prix. Cette diversification atteint également le secteur bancaire. Le premier groupe bancaire du Maghreb, Attijariwafa Bank est très présent dans la région. Ces activités économiques ont permis parfois des gains politiques. La « diplomatie économique », comme l'appelle certains journaux marocains, a permis d'obtenir de certains Etats africains l'abandon de la reconnaissance de la RASD (Sahara Occidental). Le conflit récurrent des touaregs au nord du Mali et du Niger donne lieu à une compétition feutrée entre Alger et Tripoli. Ces compétions politiques sont de plus en plus adossés à des actions économiques. Des investissements libyens importants au Mali octroient à Tripoli un rôle politique plus important, notamment dans la gestion de la rébellion touareg. Comme c'est un domaine où Alger a beaucoup investi et où Bamako se retrouve à mener une gestion délicate entre Tripoli et Alger. Pour un économiste algérien, le « tropisme africain des pays Maghreb reste en deçà de ce qu'il devrait être ». Il estime que « la compétition inter-maghrébine pour ces marchés est salutaire et son approfondissement souhaitable. Au-delà des arrière-pensées des objectifs de puissance, il est clair que la diplomatie va de plus en plus dépendre de l'économie ».
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