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Le patrimoine entre exigence de préservation et nécessité de protection

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  • Le patrimoine entre exigence de préservation et nécessité de protection

    L’incivilité a des effets plus dévastateurs que tous les éléments de la nature


    Le concept de patrimoine reste encore flou ...

    Qui est responsable de cette ignorance et de ce désintérêt notament des jeunes ? Est-ce la nonchalance des pouvoirs publics ou le manque de vulgarisation de la culture et de sensibilisation quant à son importance ? C’est certainement les deux à la fois.
    Et c’est là qu’il faut intervenir, sur les deux fronts, si on entend sauver notre patrimoine.


    Définition du patrimoine

    Le patrimoine est étymologiquement défini comme l’ensemble des biens hérités du père (de la famille, par extension). En effet, patrimonium signifie héritage du père en latin ; la notion est apparue au XIIe siècle.
    En droit civil, le législateur l’entend comme l’ensemble des biens et des obligations d’une personne, envisagé comme une universalité de droit, c’est-à-dire comme une masse mouvante dont l’actif et le passif ne peuvent être dissociés.
    Le patrimoine fait appel à l’idée d’un héritage légué par les générations qui nous ont précédés, et que nous devons transmettre intact aux générations futures. On dépasse donc la simple propriété personnelle. «L’héritage ne se transmet pas, il se conquiert», disait André Malraux.
    Par Hassan Gherab

  • #2
    «Le patrimoine?! C’est ce qu’on a hérité de tous ceux qui sont passés dans le pays […] Ça intéresse les historiens. Il est vrai que, quand on regarde des ruines, on ne peut qu’admirer les gens qui ont construit des villes entières à une époque où il n’y avait ni ciment ni grue. On peut y faire un tour, à l’occasion. Mais ça s’arrête là […] Je n’irai pas jusqu’à programmer une visite dans des ruines, encore moins dans un musée.» C’est là la vision d’un jeune. A quelques nuances près, c’est aussi celle de nombreux citoyens. Certains n’ont aucune idée de ce qu’est le patrimoine, sa valeur, et n’ont donc pas conscience de la nécessité de le préserver.

    Ce désintérêt du patrimoine et cette méconnaissance de sa valeur culturelle et économique sont une réalité qui peut se vérifier avec un petit tour dans les musées, sur des sites archéologiques ou dans des monuments historiques. Dans le meilleur des cas, ils sont vides de visiteurs, ou presque. Quelques couples déambulant à travers les vestiges millénaires plus intéressés par la quiétude des lieux que par leur charge historique et peut-être deux ou trois familles en quête d’un coin tranquille pour pique-niquer et respirer un bol d’air frais constituent généralement le lot de «visiteurs» qu’on rencontre sur les sites. Les musées sont, eux, boudés.

    Quant au pire, on le verra après le départ des pique-niqueurs et de ces visiteurs d’un autre genre, dont le site se serait bien passé, il s’en porterait mieux. Ils laissent les traces de leurs passages : des mégots, des ordures et des restes, avec lesquels on pourrait reconstituer le menu du pique-nique. Des bouteilles en plastique, des emballages huileux, des gobelets et des cannettes jonchent les ruines. Certains grossiers personnages indélicats et incivils n’hésiteront pas à se soulager à même le site. D’autres utiliseront les ruines comme un support pour de stupides massages. Sur des moellons et des colonnes qui ont vu passer des civilisations entières, des mains ont gravé ou peint sur la pierre des déclarations d’amour pour une fille ou un club de foot.

    Le drame est de voir que cette situation est généralisée. Aucun site, aucun monument n’a échappé aux effets dévastateurs de l’ignorance, qui est la mère de tous les maux sociaux. Dès lors, une question s’impose : faut-il continuer de débourser des sommes faramineuses pour restaurer et réhabiliter des richesses patrimoniales et les voir ensuite livrées à la dévastation ? Evidemment, la réponse ne peut qu’être positive, car on ne peut laisser ces richesses dépérir. Mais alors que faire ? Le gardiennage n’est pas une solution. La vigilance d’un gardien est faite pour être trompée. La seule solution est donc la sensibilisation et l’éducation. Et qui dit éducation évoque forcément le secteur qui en a la charge. L’école a un rôle de premier ordre à jouer, mais pas seulement elle. D’autres secteurs doivent s’impliquer. Le ministère de la Culture ne peut et ne doit assumer à lui seul une telle charge qui nécessite des moyens matériels, humains et financiers qu’il n’a pas. L’intersectorialité est la solution si on veut que l’Algérie ait un patrimoine dont elle pourrait être fière et qu’elle pourrait rentabiliser.

    Le patrimoine, cet inconnu

    Le concept de patrimoine reste encore flou en Algérie. Lors d’une sortie, nous avons constaté que la plupart des citoyens que nous avons rencontrés, dont la plupart étaient des étudiants, restaient sans réponse à notre question sur ce qu’est le patrimoine.

    Notre première destination est l’université de droit de Ben Aknoun, où nous rencontrerons Dalila, étudiante en 2ème année qui, dès l’abord, ne paraît pas très intéressée par la culture. Le mot patrimoine ne lui dit rien. Il aura fallu expliquer en arabe pour qu’elle nous lance : «Je suis prise par mes cours qui durent généralement jusqu’à la fin de la journée et je ne peux pas me permettre de rentrer tard chez moi.» Quant à Souad, étudiante à l’Institut des sciences de l’information et de la communication de Ben Aknoun, elle nous a surpris par sa réponse : «Je ne suis pas intéressée par ce domaine, à vrai dire je ne l’aime pas !!» Les autres jeunes que nous rencontrerons tiendront, à peu de chose près, les mêmes propos.
    Paradoxalement, c’est monsieur Tout-le-monde qui semble plus intéressé que les universitaires. Jallel, habitant Staoueli, dira : «Oui, le patrimoine est très important pour moi et il faut savoir le préserver.»

    Ce jeune citoyen a expliqué que, lors de ses visites dans certains musées, il a été déçu par le manque de visiteurs et aussi par la mise en valeur du patrimoine qui, d’après lui, laisse à désirer. D’autres personnes se montreront tout aussi intéressées par les vestiges et leur préservation.

    Direction l’est du pays, au nord de Constantine, où nous avons constaté de visu une scène de dénigrement du patrimoine très choquante. A Hammam El Maskhoutin (le bain des damnés) du nom d’Aquae Thiblitanae dans l’Antiquité, des gens lavaient leur linge, aveugles à la beauté de ses cascades pétrifiées de 500 mètres de large et huit mètres de haut. Pis, des jeunes sont même allés jusqu’à y faire rentrer leurs motos pour les laver avec cette eau thermale indiquée pour le traitement de la goutte, des rhumatismes, du paludisme, des varices et des affections gynécologiques. Cette dernière scène illustre bien quelle est l’idée du patrimoine dans l’esprit des Algériens.

    - La Tribune

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