D’aucuns peuvent soutenir, à bon droit d’ailleurs, qu’Iggout est indiscutablement un phénomène des plus uniques de notre scène artistique. C’est même une rareté on ne peut mieux précieuse, une valeur plus que sûre. Il va sans dire qu’il a la bosse de la musique, la sienne propre : le « tazenzart ». En témoigne son très long parcours et son immense production. En effet, Iggout – dont le nom, par un heureux hasard, signifie beaucoup en tamazight- a beaucoup apporté au reverdissement de la culture amazighe. Pour le plus grand bonheur de tous ceux qui ont une haute idée de l’art et qui savent, somme toute, apprécier les belles choses bien faites.
Si vous êtes suffisamment au fait de la chose amazighe, vous n’aurez guère besoin de creuser longtemps les méninges pour savoir de quoi le mot « tazenzart » tourne. Il s’agit, en effet, de ce style musical bien connu, crée, développé et quintessencié même par les non moins mythiques Izenzaren. Ces authentiques guérilleros du Souss, armés seulement et uniquement de leurs instruments de musique, qui, nonobstant les nombreuses décennies au compteur et l’exclusion savamment organisée par les teigneux médiatiques makhzeniens, continuent d’émouvoir des générations entières de mélomanes. Ceux-là même qui n’ont de cesse d’apprécier non seulement leur poésie, mais aussi leurs inimitables mélodies, lumineusement exubérantes, sorties des tréfonds de ce vieux peuple on ne peut plus désabusé, indistinctement méprisé, constamment « noyé » - pas seulement traîné hélas !- dans la fange pestilentielle de l’opprobre, les Amazighs. Espérons de tout cœur que cette situation, plus qu’indigne d’un peuple qui se dit libre, ne durera pas ad vitam aeternam.
Génération ignée
Ayant grandi à une époque où la faune arabiste pouvait se permettre, comme bon lui semble, de couver et même mettre à exécution toutes sortes de conspirations anti-amazighes, le jeune Iggout -avec d’autres compagnons de route-, a protesté, regimbé et même rué dans les brancards. À sa manière. L’on conviendra que ce n’est pas vraiment étonnant. C’est tellement humain de dénoncer l’injustice, dirions-nous. Encore plus, si les siens en sont les premières victimes. D’où sa révolte aux accents éminemment musicaux. Celle qu’il a parfaitement personnifiée et magnifiquement exprimée au travers de sa seule et unique art. Sans jamais compter que sur lui-même. Il est bien connu qu’il a tout appris tout seul ou presque, en véritable autodidacte qui en voulait. Beaucoup. Énormément. Si bien qu’il est devenu l’un des enfants du Souss les plus doués. Que dire, l’un des plus emblématiques de cette exceptionnelle et terrible génération des années soixante et soixante-dix du siècle écoulé. Celle-là même qui a accouché de Khaïr-Eddine, Ali Azaykou, M’barek Ammouri, etc. pour ne citer que les plus célèbres et les plus appréciés.
En digne fils de Dcheira (mais originaire d’Achtouken, connus pour avoir déjà donné les défunts mousquetaires de tarrayst : Anchad, Janti et Said Achtouk), Iggout a commencé très tôt à gratter tout ce qui lui tombait sous la main. Au fond, il n’a pas vraiment dérogé à la règle. Dans la mesure où il a suivi le même cheminement que celui de tous ses prédécesseurs. Enfant, c’étaient des instruments rudimentaires, fabriqués à base des matériaux de récupération ; adolescent, des instruments traditionnels dont l’indétrônable « lotar »- probablement l’ancêtre lointain du banjo. Mais ses liens avec Tabghaynuzt, l’un des premiers groupes modernes dans tout le Maroc, fort connu dans tout le Souss pendant les années cinquante et soixante, allaient lui être plus que fructueux. D’un point de vue professionnel s’entend. Car, c’est en son sein qu’il a été initié au violon par exemple. La suite, on la connaît. Il l’a maîtrisé. Excellemment. À la perfection même. Sceptique peut-être ? C’est votre droit, mais si vous voulez en avoir le cœur net, écoutez sans trop tarder les albums où il l’a judicieusement utilisé.
Banjo, au pinacle
Quant aux instrument à cordes, ils n’avaient, depuis belle lurette déjà, plus aucun secret pour lui : le « lotar » que nous avons déjà évoqué, la guitare bien sûr et surtout le banjo. Cet instrument qui ne rappelle que de bons souvenirs. Et pour cause. Ce sont les esclaves africains qui l’ont trimbalé avec eux dans le Nouveau Monde. Avant que les doigts de fée de la technologie ne l’effleurent et lui donnent, incidemment, sa forme actuelle. Pour plus ou moins participer, des décennies après, par le biais du chant engagé, à la « libération » des ces mêmes Africains. Est-ce qu’il en sera autant de nos pauvres amazighs qui souffrent, eux aussi, de toutes les avanies possibles et imaginables ? Il ne coûte jamais rien d’espérer. Surtout que nos artistes se le sont appropriés ou réappropriés. Définitivement me semble-t-il. Parce qu’originellement de chez nous, de notre continent. Toujours aussi noir, mais de misères, d’injustices et de dictatures.
Reste qu’Iggout en est, sans trop se perdre dans trop digressions pas forcément utiles, un indiscutable virtuose, pour ne pas employer un qualificatif propre aux universitaires, une véritable sommité, spirituellement respectée, musicalement adulée. Ce n’est pas pour rien que l’on appelle le roi du banjo. En fait, il suffit de lui prêter l’oreille un laps de temps pour s’apercevoir que ses compositions sont bien élaborées, très rechechrées. Je dirais même diablement sophistiquées. À tel point que peu de gens peuvent les rejouer. Sauf quelques très rares initiés. Et encore ! D’ailleurs, l’on ne compte même plus ceux qui ont mordu la poussière, lamentablement, dans leurs tentatives de l’égaler. Le surpasser, disons ce qu’il y a, c’est tout bonnement de l’ordre de l’impossible. En fait, sans vouloir jouer les flagorneurs niais, il ne sert strictement à rien d’essayer.
Si vous êtes suffisamment au fait de la chose amazighe, vous n’aurez guère besoin de creuser longtemps les méninges pour savoir de quoi le mot « tazenzart » tourne. Il s’agit, en effet, de ce style musical bien connu, crée, développé et quintessencié même par les non moins mythiques Izenzaren. Ces authentiques guérilleros du Souss, armés seulement et uniquement de leurs instruments de musique, qui, nonobstant les nombreuses décennies au compteur et l’exclusion savamment organisée par les teigneux médiatiques makhzeniens, continuent d’émouvoir des générations entières de mélomanes. Ceux-là même qui n’ont de cesse d’apprécier non seulement leur poésie, mais aussi leurs inimitables mélodies, lumineusement exubérantes, sorties des tréfonds de ce vieux peuple on ne peut plus désabusé, indistinctement méprisé, constamment « noyé » - pas seulement traîné hélas !- dans la fange pestilentielle de l’opprobre, les Amazighs. Espérons de tout cœur que cette situation, plus qu’indigne d’un peuple qui se dit libre, ne durera pas ad vitam aeternam.
Génération ignée
Ayant grandi à une époque où la faune arabiste pouvait se permettre, comme bon lui semble, de couver et même mettre à exécution toutes sortes de conspirations anti-amazighes, le jeune Iggout -avec d’autres compagnons de route-, a protesté, regimbé et même rué dans les brancards. À sa manière. L’on conviendra que ce n’est pas vraiment étonnant. C’est tellement humain de dénoncer l’injustice, dirions-nous. Encore plus, si les siens en sont les premières victimes. D’où sa révolte aux accents éminemment musicaux. Celle qu’il a parfaitement personnifiée et magnifiquement exprimée au travers de sa seule et unique art. Sans jamais compter que sur lui-même. Il est bien connu qu’il a tout appris tout seul ou presque, en véritable autodidacte qui en voulait. Beaucoup. Énormément. Si bien qu’il est devenu l’un des enfants du Souss les plus doués. Que dire, l’un des plus emblématiques de cette exceptionnelle et terrible génération des années soixante et soixante-dix du siècle écoulé. Celle-là même qui a accouché de Khaïr-Eddine, Ali Azaykou, M’barek Ammouri, etc. pour ne citer que les plus célèbres et les plus appréciés.
En digne fils de Dcheira (mais originaire d’Achtouken, connus pour avoir déjà donné les défunts mousquetaires de tarrayst : Anchad, Janti et Said Achtouk), Iggout a commencé très tôt à gratter tout ce qui lui tombait sous la main. Au fond, il n’a pas vraiment dérogé à la règle. Dans la mesure où il a suivi le même cheminement que celui de tous ses prédécesseurs. Enfant, c’étaient des instruments rudimentaires, fabriqués à base des matériaux de récupération ; adolescent, des instruments traditionnels dont l’indétrônable « lotar »- probablement l’ancêtre lointain du banjo. Mais ses liens avec Tabghaynuzt, l’un des premiers groupes modernes dans tout le Maroc, fort connu dans tout le Souss pendant les années cinquante et soixante, allaient lui être plus que fructueux. D’un point de vue professionnel s’entend. Car, c’est en son sein qu’il a été initié au violon par exemple. La suite, on la connaît. Il l’a maîtrisé. Excellemment. À la perfection même. Sceptique peut-être ? C’est votre droit, mais si vous voulez en avoir le cœur net, écoutez sans trop tarder les albums où il l’a judicieusement utilisé.
Banjo, au pinacle
Quant aux instrument à cordes, ils n’avaient, depuis belle lurette déjà, plus aucun secret pour lui : le « lotar » que nous avons déjà évoqué, la guitare bien sûr et surtout le banjo. Cet instrument qui ne rappelle que de bons souvenirs. Et pour cause. Ce sont les esclaves africains qui l’ont trimbalé avec eux dans le Nouveau Monde. Avant que les doigts de fée de la technologie ne l’effleurent et lui donnent, incidemment, sa forme actuelle. Pour plus ou moins participer, des décennies après, par le biais du chant engagé, à la « libération » des ces mêmes Africains. Est-ce qu’il en sera autant de nos pauvres amazighs qui souffrent, eux aussi, de toutes les avanies possibles et imaginables ? Il ne coûte jamais rien d’espérer. Surtout que nos artistes se le sont appropriés ou réappropriés. Définitivement me semble-t-il. Parce qu’originellement de chez nous, de notre continent. Toujours aussi noir, mais de misères, d’injustices et de dictatures.
Reste qu’Iggout en est, sans trop se perdre dans trop digressions pas forcément utiles, un indiscutable virtuose, pour ne pas employer un qualificatif propre aux universitaires, une véritable sommité, spirituellement respectée, musicalement adulée. Ce n’est pas pour rien que l’on appelle le roi du banjo. En fait, il suffit de lui prêter l’oreille un laps de temps pour s’apercevoir que ses compositions sont bien élaborées, très rechechrées. Je dirais même diablement sophistiquées. À tel point que peu de gens peuvent les rejouer. Sauf quelques très rares initiés. Et encore ! D’ailleurs, l’on ne compte même plus ceux qui ont mordu la poussière, lamentablement, dans leurs tentatives de l’égaler. Le surpasser, disons ce qu’il y a, c’est tout bonnement de l’ordre de l’impossible. En fait, sans vouloir jouer les flagorneurs niais, il ne sert strictement à rien d’essayer.
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