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Carlos Ghosn veut rester compétitif aux Etats-Unis

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  • Carlos Ghosn veut rester compétitif aux Etats-Unis

    Le 29 avril, Carlos Ghosn, le PDG de de Renault-Nissan a dû faire face à des manifestations de mécontentement lors de la réunion annuelle des ses actionnaires à Paris. L'un d'entre eux s'est plaint du fait que le cours de l'action avait baissé de plus 30 % cette année. Il voulait savoir ce qu'il était advenu de "l'effet Ghosn".

    Bonne question.


    L'effet Ghosn faisait autrefois référence à l'impact galvanisant que le pdg avait eu sur Nissan il y a plus de dix ans, quand Renault, principal actionnaire de l'entreprise, l'y avait dépêché pour remettre sur pied le constructeur japonais bien mal en point.

    Aujourd'hui, cette expression sert davantage à critiquer un patron dont le génie des affaires pourrait s'être émoussé sous le poids de la double casquette de pdg de Nissan et Renault. Il est certainement dans une mauvaise passe. Les ventes de Renault ne progressent plus. L'année dernière, les bénéfices ont baissé de 7,6 % et ne feront pas mieux en 2008. Quant à Nissan, le cours de ses actions a dégringolé de 32 % par rapport à son niveau le plus haut, atteint il y a un an. Ses ventes sont au point mort et ne devraient pas reprendre cette année.

    Pourtant Carlos Ghosn, qu'on appelle le Cost Killer, Super Carlos ou le Brise-glace, entre autres surnoms, ne paraît nullement préoccupé par les critiques. Il semble s'épanouir en gérant un emploi du temps qui aurait raison du commun des mortels. Jugez plutôt : le samedi 26 avril, il se trouvait à Tokyo, où il se préparait pour la réunion annuelle de Nissan et l'annonce d'un nouveau plan quinquennal. Le lundi soir, on lui décernait une récompense à New York (après un déjeuner avec BusinessWeek ) et mardi après-midi, à Paris, il recevait ses actionnaires mécontents.

    Pour l'homme d'affaires, le jeu en vaut la chandelle. Lorsque l'on évoque les rapprochements entre les différents constructeurs automobiles, le rachat de Chrysler par Daimler-Benz ou celui de Jaguar et Land Rover par Ford, par exemple, il estime "qu'il n'y a qu'une alliance au monde qui a présenté de la valeur ajoutée et c'est celle de Nissan et Renault". Il explique que, même en cette année de récession et de ralentissement, les deux constructeurs rapportent malgré tout des milliards. En 2007, le bénéfice d'exploitation du constructeur français a atteint 1,8 milliard de dollars (1,16 milliard d'euros) et Nissan a annoncé un bénéfice d'exploitation de 3,1 milliards de dollars (2 milliards d'euros) pour le premier semestre de son année fiscale actuelle.

    Le pdg, lui, considère que sa double casquette est bien dans l'air du temps. Aujourd'hui, les constructeurs automobiles doivent réagir vite pour s'adapter aux changements de goûts et à des réglementations toujours plus exigeantes. En 2007, il a lancé quatre joint ventures importantes pour Nissan et Renault : deux projets de voitures électriques au Danemark et en Israël, une usine commune au Maroc, et un projet destiné à construire une automobile coûtant moins de 3 000 dollars (2 000 euros) en Inde. Tout cela vient s'ajouter à une autre joint venture , avec AvtoVAZ en Russie, un accord pour fournir des voitures de petite taille à Chrysler, l'externalisation de la fabrication de pick-ups Nissan aux États-Unis et un projet de construction de petits véhicules du même type pour Suzuki. Le pdg déclare : "Pour ce genre de projets, il faut un seul décisionnaire, ça évite les conflits [qui se produiraient s'il y avait deux pdg]."

    Mais la situation est plus compliquée pour Carlos Ghosn que lorsqu'il a sauvé Nissan de la faillite. Il considère que le constructeur japonais doit maintenir une forte présence aux États-Unis, même si, selon lui, "le marché américain ne sera plus jamais un grand marché". Ce pays a en effet atteint un niveau de saturation, avec 800 véhicules pour 1 000 habitants, contre moins de 30 en Chine et en Inde. D'où le dilemme : il faut rester compétitif sur l'énorme marché américain tout en se dépêchant de séduire les consommateurs chinois, brésiliens, russes et autres, sur le point de casser leur tirelire pour acheter leur première voiture.

    Marcher à l'instinct

    C'est exactement le genre de défi que Carlos Ghosn, l'ingénieur, adore. Ses collègues présents et passés racontent qu'il tolère mal trop de dissensions et a plus tendance à suivre son instinct qu'à rechercher le consensus. De ce fait, il obtient des résultats plus rapides, mais aussi plus mitigés. En 2003, il est passé outre l'avis de ses cadres américains qui s'opposaient à la commercialisation de la petite Nissan Versa en Amérique du Nord, où ils estimaient que les conducteurs ne s'intéresseraient pas à ce petit modèle économe conçu à la base pour les marchés chinois et sud-américains. Un bon point pour Ghosn : en 2008, Nissan vendra plus de 120.000 Versa aux États-Unis.

    D'un autre côté, quatre ans seulement après avoir introduit le pick-up full size Titan de Nissan aux États-Unis et après avoir bâti une usine spécifique dans le Mississippi pour l'y construire, il jette l'éponge. Cette année, selon les projections, Nissan devrait vendre seulement 60.000 Titan alors que Toyota vendrait 165.000 Tundra. Pour George Magliano, analyste en chef de l'industrie automobile en Amérique du Nord pour Global Insight, au moins, il a rapidement admis son erreur : "Arrêter maintenant est la meilleure chose à faire." Le pdg veut rentabiliser l'usine en y fabriquant de petits utilitaires.

    Carlos Ghosn veut étendre ces prises de décisions rapides aux marchés émergents. Plutôt que de mettre au point des produits destinés au marché mondial, que les deux marques pourraient se partager, il estime que Renault et Nissan devraient concevoir des modèles conformes aux goûts locaux et être suffisamment souples pour exporter rapidement ceux qui correspondent aux désirs des conducteurs d'autres pays. C'est le cas de la très basique Logan. Conçue par Renault pour l'Europe de l'Est et l'Amérique latine, elle est aussi devenue populaire en France et dans d'autres pays développés.

    Ce que Carlos Ghosn veut plus que tout, ce n'est pas tenter de prédire l'avenir, mais être prêt à l'affronter. "Nous ne savons pas ce que les consommateurs voudront dans 10 ans." En général, il croit à des moteurs plus petits, à des véhicules aux dimensions plus modestes, et à des moteurs moins gourmands en essence. En ce qui concerne les technologies vertes, il est plus partisan des véhicules entièrement électriques que des hybrides électricité/essence. "Les gens pensaient que les voitures électriques étaient laides, peu maniables, et n'offraient pas une grande sécurité. Tout cela a changé." Son but est de mettre en place une gamme de véhicules électriques à partir de 2012.

    Mais pour rendre les deux constructeurs automobiles plus rentables, il faut diminuer le coût de la technologie et de la production/fabrication. C'est là qu'une implantation mondiale porte ses fruits : quand Renault a construit la Logan, l'entreprise s'est tournée vers Mahindra & Mahindra, en Inde, pour trouver des idées qui permettraient de fabriquer à peu de frais. Aujourd'hui, Nissan et Renault ont joint leurs forces à celles de Baja Auto pour produire une voiture à moins de 3 000 dollars (2 000 euros) pour le marché indien. Ghosn veut que ses entreprises s'inspirent du design à petit prix tel qu'il est pratiqué dans le sous-continent. "Ils maîtrisent l'ingénierie à bas coût. C'est un domaine dans lequel ils sont meilleurs que les Européens ou les Japonais", explique-t-il. Ajouter l'Inde à son tableau de chasse : voilà une nouvelle raison de se dépasser pour l'infatigable M. Ghosn.

    Par BusinessWeek
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