Une nouvelle ligne de front s'ouvre-t-elle, en Algérie, entre islam et christianisme ? Il serait excessif de l'affirmer, tant les forces en présence sont disproportionnées. Les chrétiens ne sont plus que quelques milliers depuis l'indépendance. En outre, les Eglises historiques - catholique et protestante - ont noué avec les musulmans locaux des relations amicales qui ont survécu à la tourmente des années 1990. Si la population musulmane avait payé le plus lourd tribut au terrorisme, 19 prêtres, religieux et religieuses, dont les moines de Tibéhirine et Mgr Pierre Claverie, évêque d'Oran, y avaient trouvé la mort]On aurait pourtant tort de sous-estimer l'épreuve de force qui vient de commencer sur le sol algérien et pourrait s'étendre à d'autres pays d'Afrique et du Proche-Orient, où se produisent les mêmes phénomènes. Elle oppose un pouvoir politique sur la défensive, relayé par la presse et la justice, et des groupes de chrétiens évangéliques de fraîche implantation, au prosélytisme actif, parfois anti-islamique, inspiré par la droite religieuse américaine, n'ayant qu'un lointain rapport avec des confessions chrétiennes implantées de longue date, victimes, par ricochet, du dispositif répressif de l'Etat.
]Ayant souffert d'une terrible tragédie liée à l'instrumentalisation politique de la religion, l'Algérie estime qu'il est aujourd'hui de son droit de réglementer l'exercice des cultes, tant musulman que non musulmans. Mais la riposte qu'elle oppose au "business évangélique" dans le pays, notamment sa partie la plus fragile - la Kabylie -, peut sembler aveugle et disproportionnée. Elle est attentatoire aux droits élémentaires de la liberté de religion : des lieux de culte chrétiens sont fermés ; des visas refusés à des prêtres, des congrégations religieuses, des pasteurs protestants ; des "volontaires" catholiques brésiliens sont en voie d'expulsion. Une peine de prison avec sursis a été prononcée contre un prêtre français du diocèse d'Oran, Pierre Wallez, dont le seul tort avait été de prier avec des immigrés camerounais en dehors d'un lieu catholique autorisé.Les Eglises de France et d'Algérie, les associations de défense des droits de l'homme, des deux côtés de la Méditerranée, ne cachent plus leurs inquiétudes. "Le prosélytisme en Algérie est surtout islamiste, réplique le pasteur Mustapha Krim, président de l'Eglise protestante. Je ne comprends pas comment 32 communautés protestantes peuvent faire trembler 32 000 mosquées." La réaction brutale du pouvoir algérien est attribuée à la pression des mouvements islamistes, à celle des investisseurs étrangers en provenance d'Arabie saoudite ou des Emirats arabes unis, enfin aux menaces d'Al-Qaida au MaghrebMais cette situation révèle une autre fracture au sein même du monde chrétien, qui déborde singulièrement le cas de l'Algérie. "Les chrétiens évangéliques sont nos frères comme disciples de Jésus-Christ, mais nous comprenons autrement qu'eux le témoignage à rendre à l'Evangile", dit Mgr Teissier, ex-archevêque d'Alger. Dans beaucoup de pays pauvres, musulmans ou non, ces groupes, parfois sectaires, dirigés par des pasteurs autoproclamés, guidés par des discours peu élaborés - la fast religion -, achètent les conversions par des promesses de visas, d'enrichissement et de guérison. Cette expansion déstabilise les Eglises historiques ouvertes au dialogue et à l'action sociale avec tous les acteurs locaux. Le gouvernement algérien aurait donc tort de persister dans cet amalgame.Source : Le monde
]Ayant souffert d'une terrible tragédie liée à l'instrumentalisation politique de la religion, l'Algérie estime qu'il est aujourd'hui de son droit de réglementer l'exercice des cultes, tant musulman que non musulmans. Mais la riposte qu'elle oppose au "business évangélique" dans le pays, notamment sa partie la plus fragile - la Kabylie -, peut sembler aveugle et disproportionnée. Elle est attentatoire aux droits élémentaires de la liberté de religion : des lieux de culte chrétiens sont fermés ; des visas refusés à des prêtres, des congrégations religieuses, des pasteurs protestants ; des "volontaires" catholiques brésiliens sont en voie d'expulsion. Une peine de prison avec sursis a été prononcée contre un prêtre français du diocèse d'Oran, Pierre Wallez, dont le seul tort avait été de prier avec des immigrés camerounais en dehors d'un lieu catholique autorisé.Les Eglises de France et d'Algérie, les associations de défense des droits de l'homme, des deux côtés de la Méditerranée, ne cachent plus leurs inquiétudes. "Le prosélytisme en Algérie est surtout islamiste, réplique le pasteur Mustapha Krim, président de l'Eglise protestante. Je ne comprends pas comment 32 communautés protestantes peuvent faire trembler 32 000 mosquées." La réaction brutale du pouvoir algérien est attribuée à la pression des mouvements islamistes, à celle des investisseurs étrangers en provenance d'Arabie saoudite ou des Emirats arabes unis, enfin aux menaces d'Al-Qaida au MaghrebMais cette situation révèle une autre fracture au sein même du monde chrétien, qui déborde singulièrement le cas de l'Algérie. "Les chrétiens évangéliques sont nos frères comme disciples de Jésus-Christ, mais nous comprenons autrement qu'eux le témoignage à rendre à l'Evangile", dit Mgr Teissier, ex-archevêque d'Alger. Dans beaucoup de pays pauvres, musulmans ou non, ces groupes, parfois sectaires, dirigés par des pasteurs autoproclamés, guidés par des discours peu élaborés - la fast religion -, achètent les conversions par des promesses de visas, d'enrichissement et de guérison. Cette expansion déstabilise les Eglises historiques ouvertes au dialogue et à l'action sociale avec tous les acteurs locaux. Le gouvernement algérien aurait donc tort de persister dans cet amalgame.Source : Le monde
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