Enquête.
El Himma. le ONE man show et ce qu’il cache
• Ses projets
• Ses moyens
• Ses zones d’ombre
Fouad Tracteur a beaucoup de succès sur Internet. Son profil est l'un des plus visités sur Facebook, la nouvelle Mecque du Net. Il recrute des amis à une vitesse qui défie tous les Don Juan de la toile : 30 pour la seule journée du 2 juin. Femmes et hommes, les 20-40 ans se jettent littéralement sur la liste d'amis du faux Fouad. Et souscrivent, déjà, à
l'un des forums qui font fureur chez le tracteur de Skhour Rhamna : “Et si on parlait de Fouad Ali Himma”. Ben oui. “Afine a l'makhzen, ça va ?”, “Mes respects, naâmassi”, etc. Les post et les messages d'accueil sont variés, colorés, débridés. Le tracteur est traité comme n'importe quel produit de grande consommation sur le Net : avec ce mélange de candeur et d'ironie, d'excès en tous genres, qui caractérisent si bien le monde du Net.
Roule, roule, le tracteur. El Himma a rejoint en quelques semaines le cortège des célébrités marocaines sur le Web. Il récolte un succès fou. Le faux Fouad marche sur les traces du vrai, le virtuel n'est qu'un reflet de la réalité. En un mot, Si Fouad est partout. A la télévision, dans les journaux, parmi les happy few des fins de soirée mondaines, chez les politiques comme chez les VIP de la haute, un micro de tribun ou une coupe de champagne à la main, sur le terrain poussiéreux de Benguérir ou les pistes rutilantes d'une boîte chic de la nuit casablancaise.
Un phénomène. Fouad Ali El Himma a plus de visibilité que le Premier ministre, la bande-annonce du film de la semaine et la dernière campagne de communication institutionnelle réunis. Seul son ami le roi parvient à faire mieux. Evidemment. Mais comment séparer l'un de l'autre. Ils sont copains de classe, trente ans plus tard il leur arrive encore de se donner rendez-vous pour une pause-café doublé d'une séance de briefing, ou simplement pour prendre la route ensemble. Mohammed VI est roi, Fouad est son ombre. Le deuxième est une sorte de Sisyphe qui porte la parole, les soucis et les desseins du premier comme un poids sur les épaules, un devoir, une obligation. Hier encore, Fouad le faisait à partir des couloirs du ministère de l'Intérieur. Il a déplacé, aujourd'hui, son combat sur le terrain, les terrains du Maroc qu'il laboure inlassablement. Comme un tracteur !
La caravane du MTD
Fouad trône au sommet de l'association la plus courue de tout le royaume : le MTD, Mouvement pour tous les démocrates. 5 mois d'existence à peine, instantanément légalisée, bientôt reconnue d'utilité publique. Il la conduit comme un bolide à 200 km / heure, même s'il n'en est ni le président (Ahmed Akhchichine), ni même le trésorier (Khadija Rouissi). “Je suis membre du bureau (de onze personnes), je suis comme tout le monde”, répète-t-il à qui veut l'entendre. Personne ne veut le croire. A raison, bien entendu.
“Je suis simplement au service de mon pays”, répond El Himma, tout sourire dehors, à ceux qui s'étonnent de son activité tous azimuts. La star du MTD bouge comme mille. Quand il accorde un rendez-vous, il rappelle très souvent pour se décommander, repousser, changer d'adresse. Huit mois après son élection haut la main aux Rhamna, il carbure à plein régime, jonglant, volant, entre ses activités parlementaires (il conduit un groupe de 36 élus et préside la Commission des affaires étrangères et de la défense nationale au Parlement) et son travail dit de terrain, via ce qu'on peut appeler la caravane du MTD. Sans oublier les mondanités auxquelles Si Fouad ne manque pas de sacrifier, entre deux affaires à régler, deux rendez-vous à honorer.
“Il y a comme une sorte d'utilisation du pouvoir pour préparer à la création d'un parti politique”, dénonce Mohamed Boukili, un des principaux dirigeants de l'Association marocaine des droits humains (AMDH). Parti politique, l'idée est en l'air. “On a choisi de ne pas aller plus vite que la musique, alors on verra, la piste n'est pas exclue. Pour le moment, le plus important est de posséder une expression politique. Déjà. Et d'écouter”, exprime un des proches collaborateurs de l'ancien ministre délégué de l'Intérieur.
Plus qu'avec le groupe Authenticité et Modernité, pourtant bien campé au Parlement, c'est avec le MTD que l'expression politique prend toute sa forme. De Tanger à Agadir, en passant par Marrakech, Rabat ou Khénifra, la Har(a)ka a assuré le spectacle. Cinq kermesses, cinq shows où le spectacle était assuré, même dans sa dimension la plus folkorique. C'est dans la ville ocre, à quelques kilomètres de son fief des Rhamna, que Fouad Ali El Himma a réussi sa démonstration la plus aboutie. C'était le week-end dernier, un témoin raconte : “Le meeting a eu lieu au Palais des congrès, enceinte la plus prestigieuse de la ville. A l'intérieur, la salle était comble quand El Himma est arrivé à la tête d'un cortège quasi royal. Il était entouré de partout, de ses partisans comme de simples badauds. On lui tapotait les épaules, on le saluait, on lui embrassait la main, des gens ont tenté l'impossible pour lui remettre des lettres de doléances destinées au roi”. Carrément. A Marrakech, où le spectacle a été assuré tant à l'extérieur qu'à l'intérieur du prestigieux Palais des congrès, la star du MTD a eu des allures de vice-roi. “Pour ce qui est du discours, poursuit notre témoin, il est resté le même que lors des précédentes escales du MTD”. En gros : il est temps de décentraliser le Maroc, d'aller dans les régions, de faire du travail de terrain, de solliciter les potentialités locales, etc. Aide-toi, le Maroc t'aidera.
Un observateur qui a suivi les déplacements du MTD relève, lucide : “Cela s'appelle de la langue de bois. Le MTD n'a aucun programme politique, aucune solution dans le sens pratique du terme. Il reproduit un discours proche de la ligne officielle du pays…”. Mais les gens acclament avant de rentrer chez eux, contents d'avoir vu de près, serré ou baisé la main, à l'ami du roi.
Ce qui peut passer pour une fantasia dans la plus pure tradition makhzénienne est considéré, avec le plus grand sérieux, par la garde rapprochée du député des Rhmana. “Entendons-nous bien : le MTD n'a pas de potion magique dans sa besace. Nous sommes dans une première phase, nous écoutons”, résume un membre de l'entourage “himmien”. Ce que notre source suggère entre les lignes peut être reformulé, avec une très faible marge d'erreur, comme suit : “Nous approfondissons nos réseaux locaux, nous draguons, nous recrutons, pour être prêts demain, au cas où”.
El Himma. le ONE man show et ce qu’il cache
• Ses projets
• Ses moyens
• Ses zones d’ombre
Fouad Tracteur a beaucoup de succès sur Internet. Son profil est l'un des plus visités sur Facebook, la nouvelle Mecque du Net. Il recrute des amis à une vitesse qui défie tous les Don Juan de la toile : 30 pour la seule journée du 2 juin. Femmes et hommes, les 20-40 ans se jettent littéralement sur la liste d'amis du faux Fouad. Et souscrivent, déjà, à
l'un des forums qui font fureur chez le tracteur de Skhour Rhamna : “Et si on parlait de Fouad Ali Himma”. Ben oui. “Afine a l'makhzen, ça va ?”, “Mes respects, naâmassi”, etc. Les post et les messages d'accueil sont variés, colorés, débridés. Le tracteur est traité comme n'importe quel produit de grande consommation sur le Net : avec ce mélange de candeur et d'ironie, d'excès en tous genres, qui caractérisent si bien le monde du Net.
Roule, roule, le tracteur. El Himma a rejoint en quelques semaines le cortège des célébrités marocaines sur le Web. Il récolte un succès fou. Le faux Fouad marche sur les traces du vrai, le virtuel n'est qu'un reflet de la réalité. En un mot, Si Fouad est partout. A la télévision, dans les journaux, parmi les happy few des fins de soirée mondaines, chez les politiques comme chez les VIP de la haute, un micro de tribun ou une coupe de champagne à la main, sur le terrain poussiéreux de Benguérir ou les pistes rutilantes d'une boîte chic de la nuit casablancaise.
Un phénomène. Fouad Ali El Himma a plus de visibilité que le Premier ministre, la bande-annonce du film de la semaine et la dernière campagne de communication institutionnelle réunis. Seul son ami le roi parvient à faire mieux. Evidemment. Mais comment séparer l'un de l'autre. Ils sont copains de classe, trente ans plus tard il leur arrive encore de se donner rendez-vous pour une pause-café doublé d'une séance de briefing, ou simplement pour prendre la route ensemble. Mohammed VI est roi, Fouad est son ombre. Le deuxième est une sorte de Sisyphe qui porte la parole, les soucis et les desseins du premier comme un poids sur les épaules, un devoir, une obligation. Hier encore, Fouad le faisait à partir des couloirs du ministère de l'Intérieur. Il a déplacé, aujourd'hui, son combat sur le terrain, les terrains du Maroc qu'il laboure inlassablement. Comme un tracteur !
La caravane du MTD
Fouad trône au sommet de l'association la plus courue de tout le royaume : le MTD, Mouvement pour tous les démocrates. 5 mois d'existence à peine, instantanément légalisée, bientôt reconnue d'utilité publique. Il la conduit comme un bolide à 200 km / heure, même s'il n'en est ni le président (Ahmed Akhchichine), ni même le trésorier (Khadija Rouissi). “Je suis membre du bureau (de onze personnes), je suis comme tout le monde”, répète-t-il à qui veut l'entendre. Personne ne veut le croire. A raison, bien entendu.
“Je suis simplement au service de mon pays”, répond El Himma, tout sourire dehors, à ceux qui s'étonnent de son activité tous azimuts. La star du MTD bouge comme mille. Quand il accorde un rendez-vous, il rappelle très souvent pour se décommander, repousser, changer d'adresse. Huit mois après son élection haut la main aux Rhamna, il carbure à plein régime, jonglant, volant, entre ses activités parlementaires (il conduit un groupe de 36 élus et préside la Commission des affaires étrangères et de la défense nationale au Parlement) et son travail dit de terrain, via ce qu'on peut appeler la caravane du MTD. Sans oublier les mondanités auxquelles Si Fouad ne manque pas de sacrifier, entre deux affaires à régler, deux rendez-vous à honorer.
“Il y a comme une sorte d'utilisation du pouvoir pour préparer à la création d'un parti politique”, dénonce Mohamed Boukili, un des principaux dirigeants de l'Association marocaine des droits humains (AMDH). Parti politique, l'idée est en l'air. “On a choisi de ne pas aller plus vite que la musique, alors on verra, la piste n'est pas exclue. Pour le moment, le plus important est de posséder une expression politique. Déjà. Et d'écouter”, exprime un des proches collaborateurs de l'ancien ministre délégué de l'Intérieur.
Plus qu'avec le groupe Authenticité et Modernité, pourtant bien campé au Parlement, c'est avec le MTD que l'expression politique prend toute sa forme. De Tanger à Agadir, en passant par Marrakech, Rabat ou Khénifra, la Har(a)ka a assuré le spectacle. Cinq kermesses, cinq shows où le spectacle était assuré, même dans sa dimension la plus folkorique. C'est dans la ville ocre, à quelques kilomètres de son fief des Rhamna, que Fouad Ali El Himma a réussi sa démonstration la plus aboutie. C'était le week-end dernier, un témoin raconte : “Le meeting a eu lieu au Palais des congrès, enceinte la plus prestigieuse de la ville. A l'intérieur, la salle était comble quand El Himma est arrivé à la tête d'un cortège quasi royal. Il était entouré de partout, de ses partisans comme de simples badauds. On lui tapotait les épaules, on le saluait, on lui embrassait la main, des gens ont tenté l'impossible pour lui remettre des lettres de doléances destinées au roi”. Carrément. A Marrakech, où le spectacle a été assuré tant à l'extérieur qu'à l'intérieur du prestigieux Palais des congrès, la star du MTD a eu des allures de vice-roi. “Pour ce qui est du discours, poursuit notre témoin, il est resté le même que lors des précédentes escales du MTD”. En gros : il est temps de décentraliser le Maroc, d'aller dans les régions, de faire du travail de terrain, de solliciter les potentialités locales, etc. Aide-toi, le Maroc t'aidera.
Un observateur qui a suivi les déplacements du MTD relève, lucide : “Cela s'appelle de la langue de bois. Le MTD n'a aucun programme politique, aucune solution dans le sens pratique du terme. Il reproduit un discours proche de la ligne officielle du pays…”. Mais les gens acclament avant de rentrer chez eux, contents d'avoir vu de près, serré ou baisé la main, à l'ami du roi.
Ce qui peut passer pour une fantasia dans la plus pure tradition makhzénienne est considéré, avec le plus grand sérieux, par la garde rapprochée du député des Rhmana. “Entendons-nous bien : le MTD n'a pas de potion magique dans sa besace. Nous sommes dans une première phase, nous écoutons”, résume un membre de l'entourage “himmien”. Ce que notre source suggère entre les lignes peut être reformulé, avec une très faible marge d'erreur, comme suit : “Nous approfondissons nos réseaux locaux, nous draguons, nous recrutons, pour être prêts demain, au cas où”.
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