Sahara occidental : Les raisons légitimes du peuple sahraoui Written by Luis Portillo Pasqual del Riquelme
Thursday, 12 June 2008
Plus de 32 ans se sont écoulés depuis que le Maroc a expulsé l’Espagne du Sahara occidental et s’y est substitué, par le feu et par le sang, dans le rôle de puissance coloniale et de pays occupant.
Cette manœuvre a pu être menée avec l’assistance stratégique et la bénédiction d’Henry Kissinger, alors secrétaire d’État des Etats-Unis, et elle a pris la forme de la tristement célèbre Marche verte, par laquelle le Roi du Maroc envoya 350 000 de ses sujets civils à la frontière nord-ouest du Sahara espagnol (novembre 1975). Quelques jours auparavant, et sans aucune publicité, les troupes marocaines pénétraient dans le territoire par la frontière nord-est [1].
Hassan II profitait ainsi sans vergogne de l’agonie du dictateur espagnol Francisco Franco (qui mourra le 20 novembre 1975), dont le régime caduc était très affaibli par la longue lutte des forces démocratiques.
Reculant devant la perspective d’un massacre de civils (les participants à la Marche Verte) et la menace d’une guerre avec le Maroc, le gouvernement espagnol – paralysé par l’agonie de Franco – choisit de se retirer et de laisser la voie libre aux troupes marocaines, abandonnant à leur sort les Sahraouis (qui étaient alors citoyens espagnols).
Après la Marche Verte, l’invasion et l’occupation du Sahara Occidental furent formalisées, le 14 novembre 1975, par les “Accords (illégaux) tripartites de Madrid”, en vertu desquels l’Espagne cédait de façon temporaire l’administration (mais non la souveraineté) de sa province africaine au Maroc (les deux tiers du territoire) et à la Mauritanie (le tiers restant au Sud), s’engageant à la quitter avant le 28 février 1976[2].
C’est à partir de cette date qu’éclata la guerre du Maroc et de la Mauritanie contre le Front Polisario[3]. Les militaires marocains persécutèrent et bombardèrent la population civile sahraouie, tant dans ses localités que dans sa fuite en débandade à travers le désert, perpétrant un horrible massacre destiné à éliminer tout un peuple, et obligeant la population survivante à traverser la frontière algérienne et à se réfugier dans la zone la plus aride du désert (les campements de Tindouf), où la plus grande partie de la population autochtone – qui a créé son propre État en exil : la République arabe sahraouie démocratique (RASD)[4] – survit de manière exemplaire.
Depuis lors, l’ONU (tant son Assemblée générale que le Conseil de Sécurité) a adopté des dizaines et des dizaines de résolutions sur le Sahara Occidental, reconnaissant de manière réitérée le droit du peuple sahraoui à son autodétermination et exhortant le Maroc à quitter un territoire qui ne lui appartient pas et sur lequel il ne peut faire valoir aucun titre de souveraineté[5].
En Espagne, après la mort de Franco, les premiers gouvernements de l’étape de transition à la démocratie et l’ensemble des partis politiques de l’opposition ont soutenu de manière claire le Front Polisario et le peuple sahraoui dans leur lutte contre l’envahisseur et en faveur d’un référendum d’autodétermination.
En 1991, après 16 ans de guerre, la médiation de l’ONU et de l’ OUA aboutit à un cessez-le-feu et à un accord sur la tenue d’un référendum d’autodétermination, accepté par le Maroc. Mais depuis cette date, après la signature d’un Traité d’amitié et de coopération entre l’Espagne et le Maroc [6], la positon officielle espagnole a connu un changement de cap, qui se maintient à ce jour et qui apparaît inexplicable à la majorité de la société espagnole, largement solidaire de la cause sahraouie [7].
Après diverses tentatives de solution au conflit, toujours rejetées par les élites gouvernantes marocaines [8], finalement, le Conseil de Sécurité de l'ONU a adopté le 30 avril dernier la résolution 1754 appelant le Maroc et le Front POLISARIO à des négociations directes pour parvenir à une solution politique définitive à la question du Sahara. Dans le cadre de la mise en oeuvre de cette résolution, le Secrétaire Général a invité l'ensemble des parties à un premier round de négociations les 18 et 19 juin 2007 à Manhasset, dans la banlieue de New York. Le deuxième round a eu lieu les 10 et 11 août. Un troisième round a eu lieu, en janvier 2008. Cette fois-ci on avait envisagé de se réunir à Genève, siège du Haut Commissariat des Nations unies aux Droits humains (HCNUDH) et du Haut Commissariat des Nations unies aux Réfugiés (HCR), organismes auxquels les représentants légitimes du peuple sahraoui ont eu à recourir tant de fois pour dénoncer les atrocités récurrentes du régime marocain [9]. Mais la tenue des dites négociations dans une ville européenne comme Genève aurait attiré l'attention de toute l'Europe; il n'est donc pas à exclure que Rabat, Washington et Paris aient fait pression pour qu'elles aient finalement lieu à New York, loin de l'Europe et de l'Afrique, sur le terrain des groupes de pression (lobbys) marocains, puissants, influents et miltimillionnaires, dont parlent Frank Ruddy et Tomás Bárbulo dans la bibliographie présentée dans cet article.
Ce troisième round s'est conclu sans grandes avancées et a fixé le prochain rendez-vous à la mi-mars 2008, aussi à Manhasset (New Jersey, USA).
Le présent travail est né de l’impérieuse nécessité de répondre aux arguments d’un article publié dans le quotidien espagnol EL PAÍS, qui a semé la confusion dans l’opinion publique espagnole et a suscité la colère dans les rangs du vaste mouvement de solidarité avec le peuple sahraoui. Dans les lignes qui suivent, nous réfutons point par point les principaux arguments exposés dans cet article.
Thursday, 12 June 2008
Plus de 32 ans se sont écoulés depuis que le Maroc a expulsé l’Espagne du Sahara occidental et s’y est substitué, par le feu et par le sang, dans le rôle de puissance coloniale et de pays occupant.
Cette manœuvre a pu être menée avec l’assistance stratégique et la bénédiction d’Henry Kissinger, alors secrétaire d’État des Etats-Unis, et elle a pris la forme de la tristement célèbre Marche verte, par laquelle le Roi du Maroc envoya 350 000 de ses sujets civils à la frontière nord-ouest du Sahara espagnol (novembre 1975). Quelques jours auparavant, et sans aucune publicité, les troupes marocaines pénétraient dans le territoire par la frontière nord-est [1].
Hassan II profitait ainsi sans vergogne de l’agonie du dictateur espagnol Francisco Franco (qui mourra le 20 novembre 1975), dont le régime caduc était très affaibli par la longue lutte des forces démocratiques.
Reculant devant la perspective d’un massacre de civils (les participants à la Marche Verte) et la menace d’une guerre avec le Maroc, le gouvernement espagnol – paralysé par l’agonie de Franco – choisit de se retirer et de laisser la voie libre aux troupes marocaines, abandonnant à leur sort les Sahraouis (qui étaient alors citoyens espagnols).
Après la Marche Verte, l’invasion et l’occupation du Sahara Occidental furent formalisées, le 14 novembre 1975, par les “Accords (illégaux) tripartites de Madrid”, en vertu desquels l’Espagne cédait de façon temporaire l’administration (mais non la souveraineté) de sa province africaine au Maroc (les deux tiers du territoire) et à la Mauritanie (le tiers restant au Sud), s’engageant à la quitter avant le 28 février 1976[2].
C’est à partir de cette date qu’éclata la guerre du Maroc et de la Mauritanie contre le Front Polisario[3]. Les militaires marocains persécutèrent et bombardèrent la population civile sahraouie, tant dans ses localités que dans sa fuite en débandade à travers le désert, perpétrant un horrible massacre destiné à éliminer tout un peuple, et obligeant la population survivante à traverser la frontière algérienne et à se réfugier dans la zone la plus aride du désert (les campements de Tindouf), où la plus grande partie de la population autochtone – qui a créé son propre État en exil : la République arabe sahraouie démocratique (RASD)[4] – survit de manière exemplaire.
Depuis lors, l’ONU (tant son Assemblée générale que le Conseil de Sécurité) a adopté des dizaines et des dizaines de résolutions sur le Sahara Occidental, reconnaissant de manière réitérée le droit du peuple sahraoui à son autodétermination et exhortant le Maroc à quitter un territoire qui ne lui appartient pas et sur lequel il ne peut faire valoir aucun titre de souveraineté[5].
En Espagne, après la mort de Franco, les premiers gouvernements de l’étape de transition à la démocratie et l’ensemble des partis politiques de l’opposition ont soutenu de manière claire le Front Polisario et le peuple sahraoui dans leur lutte contre l’envahisseur et en faveur d’un référendum d’autodétermination.
En 1991, après 16 ans de guerre, la médiation de l’ONU et de l’ OUA aboutit à un cessez-le-feu et à un accord sur la tenue d’un référendum d’autodétermination, accepté par le Maroc. Mais depuis cette date, après la signature d’un Traité d’amitié et de coopération entre l’Espagne et le Maroc [6], la positon officielle espagnole a connu un changement de cap, qui se maintient à ce jour et qui apparaît inexplicable à la majorité de la société espagnole, largement solidaire de la cause sahraouie [7].
Après diverses tentatives de solution au conflit, toujours rejetées par les élites gouvernantes marocaines [8], finalement, le Conseil de Sécurité de l'ONU a adopté le 30 avril dernier la résolution 1754 appelant le Maroc et le Front POLISARIO à des négociations directes pour parvenir à une solution politique définitive à la question du Sahara. Dans le cadre de la mise en oeuvre de cette résolution, le Secrétaire Général a invité l'ensemble des parties à un premier round de négociations les 18 et 19 juin 2007 à Manhasset, dans la banlieue de New York. Le deuxième round a eu lieu les 10 et 11 août. Un troisième round a eu lieu, en janvier 2008. Cette fois-ci on avait envisagé de se réunir à Genève, siège du Haut Commissariat des Nations unies aux Droits humains (HCNUDH) et du Haut Commissariat des Nations unies aux Réfugiés (HCR), organismes auxquels les représentants légitimes du peuple sahraoui ont eu à recourir tant de fois pour dénoncer les atrocités récurrentes du régime marocain [9]. Mais la tenue des dites négociations dans une ville européenne comme Genève aurait attiré l'attention de toute l'Europe; il n'est donc pas à exclure que Rabat, Washington et Paris aient fait pression pour qu'elles aient finalement lieu à New York, loin de l'Europe et de l'Afrique, sur le terrain des groupes de pression (lobbys) marocains, puissants, influents et miltimillionnaires, dont parlent Frank Ruddy et Tomás Bárbulo dans la bibliographie présentée dans cet article.
Ce troisième round s'est conclu sans grandes avancées et a fixé le prochain rendez-vous à la mi-mars 2008, aussi à Manhasset (New Jersey, USA).
Le présent travail est né de l’impérieuse nécessité de répondre aux arguments d’un article publié dans le quotidien espagnol EL PAÍS, qui a semé la confusion dans l’opinion publique espagnole et a suscité la colère dans les rangs du vaste mouvement de solidarité avec le peuple sahraoui. Dans les lignes qui suivent, nous réfutons point par point les principaux arguments exposés dans cet article.
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