Le grand jeu de la Chine en Afrique
(extraits)
mercredi 26 septembre 2007 par J.-P. Thompson
En ce début de siècle, la Chine affiche des ambitions globales. Elle vise à se hisser au rang de superpuissance, capable de rivaliser sur tous les plans avec les États-Unis. Au cours des 15 dernières années, c’est dans cette optique que la Chine s’est attachée à développer un réseau de relations économiques allant bien au-delà de ses partenaires économiques traditionnels. Sans complexe, le pays s’intègre aux économies sud-américaines et, bien sûr, africaines.
L’image que la Chine cultive auprès de ses nouveaux partenaires est celle d’un champion de la coopération entre les États du Sud. Elle se présente aussi comme une alternative crédible au renforcement des liens avec l’Occident. Joignant la parole aux actes, la Chine n’a pas ménagé ses largesses envers les pays africains. [...] La création d’un Fonds de placements d’un milliard de dollars pour consolider les liens entre les entreprises chinoises et les États africains constitue la plus récente illustration de cette opération charme.
En Afrique, la Chine se taille une place remarquable, principalement aux dépens de l’Occident, qui perd graduellement de l’influence sur un continent qu’il a dominé jadis de manière scandaleuse. L’Occident est handicapé par son passé colonial, qui évoque de cuisants souvenirs. Mais plus que tout, ce sont les grossières erreurs de calcul et l’imposition de politiques économiques catastrophiques aux pays africains, notamment par des organisations comme la Banque mondiale ou le Fonds monétaire international, qui ont laissé des traces.
Au point où l’Afrique est parfois aux prises avec des conditions de sous-développement, de dette, de pauvreté pire que celles d’il y a 50 ans...
Pas étonnant que les pays occidentaux soient régulièrement accusés de faillite morale, en plus d’être soupçonnés de caresser des ambitions néocoloniales en Afrique. Une véritable révolution devrait survenir dans la manière dont l’Occident envisage ses rapports avec le monde en développement. Malheureusement, ce n’est pas demain la veille. Pour l’instant, un examen attentif des chiffres du commerce africain révèle que l’Occident constitue encore le principal acteur en Afrique et qu’il défendra bec et ongles sa suprématie. Mais sans vouloir jouer les prophètes, il n’est pas difficile d’imaginer que d’ici une génération, la Chine deviendra la première force économique du continent africain.
En surface, la Chine constitue l’antithèse même de l’Occident. D’abord, elle n’a pas de passé colonial en Afrique pour corrompre les bonnes relations. En fait, depuis la Seconde Guerre mondiale, la Chine a réussi avec succès à rompre avec son passé colonial. Ensuite, la Chine n’a pas de gouvernement démocratiquement élu et elle a réussi à s’industrialiser, au point d’avoir extirpé la majorité de sa population de la pauvreté extrême. Pour une partie des élites africaines, elle incarne un modèle qui prouve que la démocratie ne constitue pas un prérequis au développement économique.
De plus, la Chine ne se soucie guère des orientations politiques de ses partenaires, à part le fait d’exiger une condamnation sans appel de Taïwan. Le pays ne tente pas d’imposer un modèle en matière d’économie ou de gouvernance. Sans compter qu’elle ne craint pas les risques lorsque les occasions d’affaires se présentent. Finalement, la Chine s’évertue à se distinguer des Occidentaux en insistant pour se présenter comme une avenue à travers laquelle les pays africains peuvent desserrer les liens avec l’Occident. La preuve en est que la Chine est parvenue à procurer du financement à une échelle jamais vue sur le continent, en plus de mener à terme un grand nombre de projets d’infrastructures.
Reste que les pays africains doivent quand même agir avec prudence lorsqu’ils s’engagent dans un partenariat économique avec la Chine. L’approche de base du pays, du moins en matière d’extraction des ressources naturelles, ne se distingue pas beaucoup des entreprises coloniales précédentes en Afrique. [...] Ce qui saute aux yeux immédiatement [en observant les chiffres du commerce sino-africain], c’est la prépondérance des ressources naturelles.
(extraits)
mercredi 26 septembre 2007 par J.-P. Thompson
En ce début de siècle, la Chine affiche des ambitions globales. Elle vise à se hisser au rang de superpuissance, capable de rivaliser sur tous les plans avec les États-Unis. Au cours des 15 dernières années, c’est dans cette optique que la Chine s’est attachée à développer un réseau de relations économiques allant bien au-delà de ses partenaires économiques traditionnels. Sans complexe, le pays s’intègre aux économies sud-américaines et, bien sûr, africaines.
L’image que la Chine cultive auprès de ses nouveaux partenaires est celle d’un champion de la coopération entre les États du Sud. Elle se présente aussi comme une alternative crédible au renforcement des liens avec l’Occident. Joignant la parole aux actes, la Chine n’a pas ménagé ses largesses envers les pays africains. [...] La création d’un Fonds de placements d’un milliard de dollars pour consolider les liens entre les entreprises chinoises et les États africains constitue la plus récente illustration de cette opération charme.
En Afrique, la Chine se taille une place remarquable, principalement aux dépens de l’Occident, qui perd graduellement de l’influence sur un continent qu’il a dominé jadis de manière scandaleuse. L’Occident est handicapé par son passé colonial, qui évoque de cuisants souvenirs. Mais plus que tout, ce sont les grossières erreurs de calcul et l’imposition de politiques économiques catastrophiques aux pays africains, notamment par des organisations comme la Banque mondiale ou le Fonds monétaire international, qui ont laissé des traces.
Au point où l’Afrique est parfois aux prises avec des conditions de sous-développement, de dette, de pauvreté pire que celles d’il y a 50 ans...
Pas étonnant que les pays occidentaux soient régulièrement accusés de faillite morale, en plus d’être soupçonnés de caresser des ambitions néocoloniales en Afrique. Une véritable révolution devrait survenir dans la manière dont l’Occident envisage ses rapports avec le monde en développement. Malheureusement, ce n’est pas demain la veille. Pour l’instant, un examen attentif des chiffres du commerce africain révèle que l’Occident constitue encore le principal acteur en Afrique et qu’il défendra bec et ongles sa suprématie. Mais sans vouloir jouer les prophètes, il n’est pas difficile d’imaginer que d’ici une génération, la Chine deviendra la première force économique du continent africain.
En surface, la Chine constitue l’antithèse même de l’Occident. D’abord, elle n’a pas de passé colonial en Afrique pour corrompre les bonnes relations. En fait, depuis la Seconde Guerre mondiale, la Chine a réussi avec succès à rompre avec son passé colonial. Ensuite, la Chine n’a pas de gouvernement démocratiquement élu et elle a réussi à s’industrialiser, au point d’avoir extirpé la majorité de sa population de la pauvreté extrême. Pour une partie des élites africaines, elle incarne un modèle qui prouve que la démocratie ne constitue pas un prérequis au développement économique.
De plus, la Chine ne se soucie guère des orientations politiques de ses partenaires, à part le fait d’exiger une condamnation sans appel de Taïwan. Le pays ne tente pas d’imposer un modèle en matière d’économie ou de gouvernance. Sans compter qu’elle ne craint pas les risques lorsque les occasions d’affaires se présentent. Finalement, la Chine s’évertue à se distinguer des Occidentaux en insistant pour se présenter comme une avenue à travers laquelle les pays africains peuvent desserrer les liens avec l’Occident. La preuve en est que la Chine est parvenue à procurer du financement à une échelle jamais vue sur le continent, en plus de mener à terme un grand nombre de projets d’infrastructures.
Reste que les pays africains doivent quand même agir avec prudence lorsqu’ils s’engagent dans un partenariat économique avec la Chine. L’approche de base du pays, du moins en matière d’extraction des ressources naturelles, ne se distingue pas beaucoup des entreprises coloniales précédentes en Afrique. [...] Ce qui saute aux yeux immédiatement [en observant les chiffres du commerce sino-africain], c’est la prépondérance des ressources naturelles.
Commentaire